L’implication d’entreprises, de banques et du gouvernement belge dans la colonisation israélienne

672 institutions financières européennes ont des relations financières avec 50 entreprises activement impliquées dans les colonies israéliennes illégales. Une entreprise belge, Solvay, est citée. La banque BNP Paribas est quant à elle le plus grand créancier européen de ces sociétés. Telles sont les conclusions d’un rapport publié aujourd’hui par une coalition de 25 organisations dont le CNCD-11.11.11.

Communiqué de presse du CNCD-11.11.11 du 29 septembre 2021

 

Une entreprise belge, Solvay, est citée. La banque BNP Paribas est quant à elle le plus grand créancier européen de ces sociétés. Telles sont les conclusions d’un rapport publié par une coalition de 25 organisations dont le CNCD-11.11.11.

La coalition Don’t buy into occupation (DBIO) est un projet conjoint de 25 organisations palestiniennes et européennes. L’objectif de la coalition est d’examiner les relations financières entre les entreprises opérant dans les colonies israéliennes illégales dans le territoire palestinien occupé et les institutions financières européennes.

Entre 2018 et mai 2021, 672 institutions financières européennes, y compris des banques, des gestionnaires d’actifs, des compagnies d’assurance et des fonds de pension, ont eu des relations financières avec 50 entreprises (*) activement impliquées dans les colonies israéliennes. Au cours de la période analysée, 114 milliards USD ont été fournis à ces entreprises sous forme de prêts et de souscriptions. En mai 2021, les investisseurs européens détenaient également 141 milliards USD d’actions et d’obligations de ces sociétés.

« L’implication de ces entreprises dans les colonies leur fournit l’oxygène économique indispensable dont elles ont besoin pour se développer et prospérer »,

explique le rapporteur spécial des Nations Unies pour la situation des droits humains dans le territoire palestinien occupé, Michael Lynk, dans la préface du rapport. Or la construction et l’expansion des colonies israéliennes sont des crimes de guerre au sens du droit international. Les entreprises et les institutions financières qui les financent ont donc la responsabilité de s’assurer qu’ils ne sont pas impliqués dans des violations du droit international.

Solvay est à ce jour la seule entreprise belge identifiée dans le rapport. En 2019, des produits Solvay auraient été utilisés pour la construction d’un pipeline de « contournement » à Bardala, dans la vallée du Jourdain, en territoire palestinien occupé. Ce pipeline détourne l’eau douce des sources d’eau palestiniennes vers les colonies israéliennes, tandis que les communautés palestiniennes elles-mêmes n’y ont plus accès.

Les institutions financières belges impliquées sont KBC, Ackermans & van Haaren et la Banque Degroof Petercam. Leurs crédits et investissements dans les entreprises impliquées dans la colonisation s’élèvent ensemble à 2,14 milliards EUR (2,5 milliards USD).

BNP Paribas est quant à elle l’institution financière européenne la plus impliquée dans le financement de la colonisation. Elle est le premier créancier européen avec 14,81 milliards EUR (17,3 milliards USD) de prêts et de souscriptions, et est également le 12e investisseur européen avec 2,86 milliards EUR (3,34 milliards USD) investis dans les entreprises directement impliquées dans les colonies israéliennes.

Les 10 principaux créanciers (prêts et souscriptions) ont fourni à eux seuls 77,81 milliards  USD aux entreprises activement impliquées dans les colonies israéliennes

Les 10 principaux créanciers (prêts et souscriptions) ont fourni à eux seuls 77,81 milliards USD aux entreprises activement impliquées dans les colonies israéliennes

 

BNP Paribas

Une fiche jointe au communiqué de presse du CNCD précise les constatations spécifiques pour la Belgique. Voici ce qu’on y trouve concernant BNP Parisbas.

Prêts

Sur la période janvier 2018 – mai 2021, BNP Paribas a accordé des prêts à Siemens (2,767 milliards USD), Alstom (1,549 milliard USD), Volvo (1,361 milliard USD), Hewlett Packard Enterprise (1,260 milliard USD), Cemex (1,158 milliard USD) et Caterpillar (1,154 milliard USD).

Siemens et Alstom sont impliqués dans plusieurs projets de transport en territoire occupé, tandis que les machines Volvo et Caterpillar sont utilisées pour la construction de colonies et la destruction de maisons palestiniennes. Hewlett Packard Enterprise est impliquée dans le développement de systèmes de contrôle aux checkpoints israéliens, tandis que Cemex joue un rôle actif
dans la construction de colonies et du Mur de séparation.

En outre, BNP Paribas a également accordé des prêts à de grandes banques israéliennes telles que Bank Leumi (188 millions USD) et Mizrahi Tefahot Bank (150 millions USD), ainsi qu’un prêt de 83 millions USD à l’entreprise israélienne d’armement Elbit Systems.

Investissements

Sur la période janvier 2018 – mai 2021, BNP Paribas a investi dans Siemens (822 millions USD), Cisco Systems (564 millions USD), Alstom (509 millions
USD), Booking Holdings (285 millions USD), Motorola Solutions (252 millions USD) et Volvo Group (189 millions USD), entre autres.

Le rapport Don’t buy into occupation (DBIO) contient une étude de cas plus complète de BNP Paribas, qui expose en détail l’énorme écart entre la politique officielle de BNP Paribas en matière de droits humains, d’une part, et les relations financières de BNP Paribas avec les sociétés impliquées dans la colonisation, d’autre part.

Le gouvernement belge lourdement impliqué

« Le gouvernement belge est actionnaire de BNP Paribas à hauteur de 7,7% de son capital. Il a donc le poids pour empêcher la banque de financer la colonisation israélienne. 

souligne Nathalie Janne d’Othée, en charge du dossier au CNCD-11.11.11.

En tant que principal actionnaire de BNP Paribas, notre propre gouvernement fédéral a également beaucoup de reproches à se faire. Il est temps pour le ministre des Finances Vincent Van Peteghem de mettre la banque au pas.

 signalait Fairfin déjà au mois de mai

« Bien que le siège central se trouve en France, c’est également une question fondamentale pour la Belgique. En effet, les autorités fédérales sont le principal actionnaire de BNP Paribas. Elles se partagent les dividendes sur base des investissements recherchés »,

explique Jozef Vandermeulen, de FairFin, dans l’article « Belgische banken investeren in illegale Israëlische nederzettingen in Palestina« 

« La banque investit dans des entreprises de technologie spécialisées dans des activités de surveillance, des firmes qui démolissent des maisons en Palestine et même des producteurs d’armes. Elle fait écran avec sa politique en matière de droits de l’homme mais, dans la pratique, il s’avère que c’est surtout une belle petite histoire visant à endormir le monde extérieur. »  

 

Désinvestir est la réponse

Quelles sont les démarches que doivent précisément entreprendre, dans ce cas, les créditeurs et les entreprises concernées ?

Le rapport de la coalition DBIO (Don’t Buy into Occupation – N’achetez pas dans les régions sous occupation) formule une série de 26 recommandations pour les entreprises et les institutions financières, les gouvernements européens et les administrations locales des États membres de l’UE, précise 11.11.11.

L’une des principales recommandations s’adresse en particulier aux institutions financières internationales, comme les banques et les fonds de pension. Selon la coalition DBIO, une de leurs responsabilités consiste à faire valoir leur influence.

Si des entreprises refusent d’adapter leurs activités ou de mettre un terme à leurs activités dans les colonies, les institutions financières doivent dès lors entreprendre des démarches en vue de désinvestir.

Le rapport précise la responsabilité des gouvernements européens, actionnaires dans des institutions financières visées dans la recommandation 24 :

Dans les cas où un gouvernement européen à titre individuel serait actionnaire d’une institution financière impliquée dans une ou plusieurs des « activités répertoriées », il faut prendre les mesures appropriées afin de faire en sorte que l’institution financière, via des procédures d’engagement et d’exclusion, mette un terme à son engagement et développe une politique officielle empêchant tout investissement futur de ce genre, c’est-à-dire associé à des violations.


Traduction de l’article de 11.11.11 du 28 septembre 2021 et de la recommandation 24 du rapport DBIO : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine.

(*) Les 50 entreprises pour lesquelles il a été trouvé des relations financières avec des institutions financières européennes, sont :

ACS Group, Airbnb, Alstom, Altice Europe, Ashtrom Group, Atlas Copco, Bank Hapoalim, Bank Leumi, Bezeq Group, Booking Holdings, Construcciones y Auxiliar de Ferrocarriles (CAF), Caterpillar, Cellcom Israel, Cemex, CETCO Mineral Technology Group, Cisco Systems, CNH Industrial, Delek Group, Delta Galil Industries, DXC Technology, eDreams ODIGEO, Elbit Systems, Electra Group, Energix Renewable Energies, Expedia Group, First International Bank of Israel (FIBI), General Mills, HeidelbergCement, Hewlett Packard Enterprise (HPE), Israel Discount Bank, Magal Security Systems, MAN Group, Manitou Group, Matrix IT, Mivne Group, Mizrahi Tefahot Bank, Motorola Solutions, Partner Communications Company, Paz Oil Company, Rami Levy Chain Stores Hashikma Marketing 2006, RE/MAX Holdings, Shapir Engineering and Industry, Shikun & Binui, Shufersal, Siemens, Solvay, Terex Corporation, Tripadvisor, Volvo Group, et WSP Global.

Lisez également :

Les banques belges tirent profit de l’occupation des territoires palestiniens (mai 2021)

La liste noire des Nations Unies de 112 entreprises ayant des liens avec l’occupation (février 2020)

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