Ça n’a pas commencé le 7 octobre. 77 ans de Nakba.
Samedi 17 mai, la Plateforme Charleroi-Palestine était présente dans le centre de la Ville avec une tonnelle, des calicots, des flyers, appelant à l’arrêt du génocide, au soutien à la résistance et au boycott d’Israël.

Ca n’a pas commencé le 7 octobre 2023. 77 ans de Nakba.
Alors que depuis 19 mois, l’offensive génocidaire à Gaza ne fait que s’intensifier et qu’Israël entre dans la phase finale de son plan d’éradication des Palestinien·nes de Gaza, la Plateforme proposait un moment collectif autour d’une table d’écriture aux prisonnières palestiniennes, de la diffusion d’informations, de quelques interventions et d’appels à l’action.
Témoignage
Lors de l’événement, plusieurs personnes ont pris la parole. Le docteur chirurgien Ahmed Moghrabi a fait un témoignage poignant sur la Nakba toujours en cours en Palestine et la nouvelle offensive génocidaire contre Gaza, qui a comme objectif : l’expulsion des Palestiniens de leur terre.
Ce qui se passe depuis une semaine est vraiment horrible. Après que l’otage américain a été libéré, l’armée israélienne a commencé à commettre des massacres jour après jour. Chaque jour, elle attaque de nouveau les hôpitaux. Elle a bombardé le département que je dirigeais dans l’hôpital Nasser, le département des brûlures et de chirurgie plastique. Elle a tué le journaliste Hassan Eslayeh, le journaliste le plus connu à Gaza. Elle l’a tué alors qu’il était patient dans mon département.
Et maintenant, les Israéliens ont commencé leur plan d’évacuation. Ils détruisent tout un quartier. Ils forcent les gens à fuir. Et ils attaquent les gens pendant qu’ils s’enfuient. Et le plan maintenant est d’évacuer tous les Palestiniens vers Rafah. Et s’ils ont la chance d’être encore en vie, ils les pousseront hors de Gaza. L’objectif est de les sortir de Gaza et de Palestine. Ils veulent que les Palestiniens quittent Gaza. Ils mettent en œuvre un plan diabolique : faire sortir les gens de Gaza.
Ce qui est le plus terrible, c’est que nous voyons ce génocide en direct, tous ces crimes sont commis devant nos y yeux et nous ne pouvons rien faire.
Aujourd’hui, lors d’une réunion de la Ligue arabe, le Premier ministre de l’Espagne a dit : « Nous devons agir contre Israël, pas parler uniquement ». Nous avons besoin de faire des actions, de faire des choses, pas seulement de parler. Nous devons boycotter Israël. Certains pays en Europe, comme la Norvège, l’Espagne et l’Irlande ont décidé d’entreprendre des actions contre Israël, qui est un Etat criminel. C’est bien de se rassembler, de parler, de crier, mais nous devant faire des actions plus significatives, parce que ces criminels, cet Etat criminel, personne ne parvient à l’arrêter. Il n’écoute personne.
Je reçois des messages de mon hôpital : Il n’y a pas de place pour déposer les corps des martyrs à l’intérieur de l’hôpital, tellement il y en a beaucoup.
Nous avons parlé des bombardements, des destructions, nous n’avons même pas encore parlé de la faim. Les gens meurent à cause des bombardements, mais ils meurent aussi de famine. Il n’y a rien à manger. Ils ne trouvent rien à manger.
Je reçois des messages d’adieu de mes patients, ne sachant plus s’ils seront encore là le lendemain. C’est déchirant.
77 ans de Nakba
La Plateforme Charleroi-Palestine rappelle dans son intervention les 77 ans de la Nakba.
Il y 77 ans, le 15 mai 1948, une nouvelle colonie de peuplement était officialisée : la création de l’État d’Israël. Son corollaire : l’expulsion, la déportation et l’élimination physique des populations vivant en Palestine ; la destruction de villages entiers, de cultures agraires, d’édifices. La négation de la Palestine et des Palestiniens et des Palestiniennes, les condamnant ainsi à la mort ou l’exil. Plus de 700 000 Palestiniens et Palestiniennes ont ainsi été déplacé·es de force. Et depuis cette date, 77 années sont passées. 77 années de colonisation, de nettoyage ethnique, de génocide, d’incarcération de masse, de vol des terres et d’exploitation des ressources. 77 années d’oppression. 77 années de Nakba.
Et rappelle la situation actuelle et la complicité et responsabilité de nos gouvernements
Aujourd’hui, la réalité de cette colonisation est d’une intensité insoutenable, après plus d’un an et demi de destructions et de tentatives d’éradication de la population palestinienne de Gaza, qui ont fait plus de 70 000 morts, et des milliers et milliers de disparus dont les corps sont encore ensevelis sous les décombres. Ce sont plus de 70 000 vies détruites, arrachées, assassinées. Des enfants qui aimaient chanter et jouer, des jeunes hommes qui rêvaient de leur avenir, des grands-mères qui prenaient soin des leurs.
Israël ne se cache de rien. Son gouvernement a depuis longtemps annoncé sa volonté d’en finir à Gaza, et la semaine qui vient de s’écouler a été l’une des plus meurtrières à Gaza depuis octobre 2023. Les attaques sont tant aériennes que terrestres avec la présence renforcée de véhicules et de tanks entrant à Gaza. Des leaders de la Résistance sont ciblés par des attaques assassines, à Beyrouth ou Gaza. En Cisjordanie, l’occupation continue ses attaques et destructions notamment à Jénine, tandis que l’armée et les colons s’attaquent directement à la population. Des dizaines de personnes sont arrêtées, le nombre total de prisonnier·es palestinien·nes dans les geôles coloniales s’élève à environ 10.000, ils et elles y subissent mauvais traitements, torture et arbitraire.
A l’heure actuelle, alors que se déroule sous nos yeux, en live sur nos téléphones, le massacre d’enfants, la destruction des hôpitaux et habitations, le gouvernement belge, comme d’autres, est coupable de complicité. Comment ?
– En ne faisant rien pour empêcher le génocide, en ne formulant aucune sanction contre Israël et pire, en étant activement complice :
– En refusant d’arrêter Netanhyaou pourtant visé par un mandat d’arrêt international, s’il se trouvait sur notre sol.
– En continuant les relations diplomatiques et commerciales avec Israël. Le Conseil d’État vient d’ailleurs de casser l’arrêt qui devait empêcher le transit d’armes pour Israël dans les aéroports wallons. Ce transit est donc de facto à nouveau autorisé.
– En réprimant les voix qui ici, en Belgique, en Europe, soutiennent la libération de la Palestine.
Répression
La Plateforme a également rappelé la répression qui s’abat quotidiennement en Belgique. Voir aussi notre article.
Elle a appelé également à la mobilisation pour des militants emprisonnés.
– En Allemagne Musaab Abu Atta, un jeune militant palestinien est emprisonné depuis le 26 février dernier. Son crime ? Faire entendre sa voix pour la libération de la Palestine, protester contre la colonisation, l’apartheid et le génocide. Liberté pour Musaab ! (Trouvez ici une cagnotte pour ses frais juridiques)
– En France, Georges Ibrahim Abdallah est emprisonné depuis 40 ans. Libanais, actif dans la résistance palestinienne, condamné à perpétuité, il est libérable depuis 1999. Libéré en 2013 par la justice française, il a été maintenu en prison sur décision politique du Ministère de l’intérieur. Récemment, la justice française a à nouveau ordonné sa libération et se prononcera sur cette possibilité le 19 juin prochain, dans 1 mois. D’ici là, il nous faut maintenir la pression pour exiger sa libération. Une grande manifestation est organisée à Paris le 14 juin, pour la libération de Georges Abdallah. Nous souhaitons organiser un départ collectif, contactez-nous si vous êtes intéressés ! Liberté pour Georges Abdallah !
Un mot d’espoir sur la force de nos mobilisations.
La Plateforme rappelle comment notre mobilisation collective est cruciale.
En effet, quand nous voyons tout cela, nous nous sentons tristes, en colère, impuissants. Que pouvons-nous faire ? Nous nous sentons seuls. Et pourtant, nous sommes des milliers, des millions. Les Palestiniens eux-mêmes, comme d’autres peuples opprimés, nous apprennent ce que « résister » veut dire.
Et lorsqu’ensemble, nous disons « non », nous disons « ça suffit », lorsqu’ensemble, nous nous réunissons, nous manifestons, nous crions, nous protestons, par tous les moyens à notre disposition, nous ne sommes plus seuls. Lorsque nous honorons la résistance à l’oppression et à l’injustice, lorsque nous honorons la vie des martyrs, lorsque nous honorons le courage des prisonniers et le sumud du peuple palestinien, nous ne sommes plus seuls. Nous sommes une voix, avec toutes celles et ceux qui refusent l’injustice et l’oppression, qui refusent de rester à genou ou qui refusent de détourner le regard.
Et la Plateforme rappelle les mots justes de la camarade palestinienne Ruba prononcés lors de la commémoration de la Nakba à Bruxelles :
« Jamais nous n’oublierons ni ne pardonnerons. Nous sommes les enfants et les petits-enfants des survivants de la Nakba et, que ce soit en Palestine, ou ailleurs dans le monde, on ne pourra nous imposer le silence. Palestiniens ou pas, nous avons le devoir d’affronter le sionisme, d’affronter nos institutions, nos entreprises, notre État quand ils tirent profit de la souffrance, du colonialisme, du génocide. C’est un devoir qui nous incombe : affronter le sionisme là où il est financé, là où il est légitimé et protégé politiquement, c’est-à-dire ici, en Occident.
Le combat pour la Palestine ne concerne pas que la Palestine – c’est la ligne de front d’une bataille mondiale contre l’impérialisme. Du Congo à Kanaky, du Soudan à Haïti, du Kurdistan au Cachemire, des usines de Belgique aux rues de Gaza, le système est le même. Quand la machine de guerre génocidaire bombarde Gaza, c’est le même système qui encage les réfugiés en Europe, ici, en Belgique, c’est le même système qui exploite les travailleurs du Sud mondial et c’est le même système qui protège les hooligans dans nos rues . Et, quand nous ripostons, quand nous résistons, quand nous protestons, que ce soit dans nos universités ou dans les rues, ils répondent par la répression. Ils lancent la police sur nous. Ils nous balancent leurs gaz lacrymogènes, nous cognent dessus, nous arrêtent, nous menacent. Parce que nous faisons du bruit, que nous perturbons le statu quo, que nous luttons, au centre même de l’impérialisme, pour la libération de la Palestine. Nous combattons l’empire lui-même.
Et, bien que la répression ait fini par faire partie de notre vie de tous les jours, nous puisons notre force dans Gaza. Chez les mères qui enseignent à leurs enfants dans les débris des écoles défoncées par les bombes. Chez les prisonniers qui subissent la torture et qui s’organisent néanmoins à l’intérieur des murs des prisons. Chez les fermiers qui replantent les oliviers que les colons ont arrachés. Chez les étudiants qui, en plein siège, étudient avec une lampe de poche. Dans 77 années de résistance que rien n’a pu briser. »
Pour conclure :
Les peuples opprimés savent pourquoi ils se battent et résistent. Eux aussi aiment la vie et ont le droit de défendre les leurs.
De nombreux exemples nous ont prouvé que la résistance paie, même lorsque l’oppresseur semble invincible. Il y a plus de 2 siècles, les Haïtiens ont battu une des plus grandes puissances coloniales et empire européen de l’époque, la France. Les Vietnamiens ont défait l’armée la plus puissante du monde, les États-Unis. Les Algériens ont mis fin à 132 ans de colonisation française.
La libération n’est pas impossible, elle est inévitable.
Vietnam a vaincu, Algérie a vaincu, Palestine vaincra !
Le moment d’intervention s’est clôturé par la lecture d’un poème de Mahmoud Darwich, qui résonne douloureusement, encore et toujours, avec l’actualité récente. Le poème « Passant parmi les paroles passagères » a été déclamé par deux jeunes militantes.
Rejoignez-nous
La Plateforme Charleroi pour la Palestine a vu le jour en 2009 ; depuis lors, nous organisons une activité permanente en soutien au peuple palestinien et pour le boycott d’Israël. Nous prônons la libération de la Palestine de la mer au Jourdain, le droit au retour des réfugiés, la libération de tous les prisonniers palestiniens et nous soutenons la résistance légitime du peuple palestinien.
Nous menons de nombreuses activités à Charleroi : stand, formations, manifs, discussions, conférences… Venez nous voir si vous souhaitez être tenu informé de nos activités. Vous pouvez aussi nous suivre sur notre site et nos réseaux Instagram, Facebook et Telegram.
La Plateforme sera présente au Resistance Festival les 6, 7 et 8 juin à Bruxelles et organise un départ collectif à Paris pour la manifestation européenne pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah.