Israël ferme Al Jazeera et continue de tuer des journalistes

La semaine dernière, le cabinet du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a voté la fermeture des opérations du réseau Al Jazeera en Israël actuellement.

 

Le responsable du bureau d'Al Jazeera à Gaza, Wael Al-Dahdouh, reçoit du réconfort lors des funérailles de son fils Hamza Wael Dahdouh, lui aussi journaliste pour le réseau de télévision d'Al Jazeera, tué à Rafah, dans la bande de Gaza, le 7 janvier 2024.

Le responsable du bureau d’Al Jazeera à Gaza, Wael Al-Dahdouh, reçoit du réconfort lors des funérailles de son fils Hamza Wael Dahdouh, lui aussi journaliste pour le réseau de télévision d’Al Jazeera, tué à Rafah, dans la bande de Gaza, le 7 janvier 2024. (Photo : Bashar Taleb / APA images)

 

Tamara Nassar, 11 mai 2024

 

Le génocide perpétré par Israël à Gaza a fait disparaître totalement le vernis de la liberté de la presse.

Alors que le New York Times reçoit un prix Pulitzer pour ses reportages internationaux malgré des révélations démystifiant des articles qu’il a publiés et qui accusent le Hamas d’avoir recouru au viol massif comme arme de guerre, et alors que les élites des médias traditionnels occidentaux sont rassemblées au souper de la presse de la Maison-Blanche en compagnie du président Joe Biden, malgré son infatigable soutien au génocide israélien à Gaza, les attaques délibérées d’Israël contre les journalistes se poursuivent en toute impunité. .

La semaine dernière, le cabinet du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a voté la fermeture des opérations du réseau Al Jazeera en Israël actuellement.

La démarche succédait à une loi récemment adoptée à la Knesset, le parlement israélien, permettant la fermeture temporaire d’émetteurs étrangers si le gouvernement israélien estime qu’ils posent une menace pour la sécurité nationale alors qu’Israël est occupé à bombarder les Palestiniens à Gaza.

Dimanche dernier, la police israélienne a fait irruption dans les bureaux d’Al Jazeera à Jérusalem, révoquant ses accréditions de presse et interdisant au réseau de diffuser ses informations.

Al Jazeera a condamné la fermeture de ses opérations par Israël en la qualifiant d’« acte criminel », affirmant qu’il s’agissait d’une violation des lois internationales et des lois humanitaires.

« Al Jazeera affirme son droit de continuer de diffuser des nouvelles et des informations à l’adresse de ses audiences dans le monde entier »,

a déclaré le réseau.

« Le ciblage direct et l’assassinat par Israël de journalistes, les arrestations, les intimidations et les menaces ne dissuaderont pas Al Jazeera de poursuivre son engagement à vouloir couvrir les événements, et ce, alors que plus de 140 journalistes palestiniens ont été tués depuis le début de la guerre contre Gaza. »

Al Jazeera est le principal réseau international d’information à émettre ce qui s’est mué en images de définition du génocide israélien à Gaza, avec ses journalistes qui travaillent courageusement sur le terrain dans l’enclave côtière, y compris dans les zones du nord.

C’est également la première plate-forme à diffuser, souvent en exclusivité, des vidéos des opérations de la résistance filmées par les Brigades Qassam, l’aile armée du Hamas.

Les chefs de mission de l’Union européenne dans la ville de Ramallah occupée par Israël, ont visité les bureaux d’Al Jazeera afin de prendre des photos en compagnie des membres du personnel :

 

 

Prises de vue par drone

Ces dernières semaines, Al Jazeera a également diffusé de multiples vidéos dont le réseau affirme qu’elles ont été prises par des drones israéliens à Gaza.

Le réseau dont le siège est situé au Qatar ne révèle pas explicitement la source de ces prises de vue. Des analyses présument que les drones ont apparemment été capturés par les organisations de résistance à Gaza, soit en télécommandant les quadricoptères en l’air comme les organisations l’ont montré, à moins qu’elles ne les aient abattus et sauvegardé ensuite leurs données.

Les vidéos servent de documentation pour les crimes de guerre potentiels perpétrés par l’armée israélienne.

Une vidéo en particulier, prise par un drone aérien, montrait l’assassinat sans pitié de quatre hommes palestiniens au moment où ils déambulaient dans un quartier de la zone sud de Khan Younis afin d’examiner les retombées de l’invasion terrestre d’Israël dans le secteur.

 

La prise de vue par le drone montre l’incessante poursuite des quatre hommes et le tir répété de missiles contre eux, jusqu’à ce qu’ils soient tous tués.

Une autre vidéo diffusée par Al Jazeera montrent des soldats israéliens exécutant deux hommes qui tentent de se rendre vers le nord, et qui ne posent manifestement aucune menace. Un bulldozer israélien dissimule ensuite les deux cadavres sous des débris.

Des prises de vue plus récentes, publiées par Al Jazeera, montrent des soldats israéliens qui utilisent un Palestinien comme bouclier humain.

L’homme est forcé d’entrer dans une école abandonnée sous la surveillance de deux drones israéliens afin de repérer les lieux.

Le même fragment de vidéo propose également des images additionnelles prises par un drone israélien et qui révèlent la présence de véhicules blindés israéliens stationnés dans ce qui s’avère être une base militaire improvisée à l’intérieur d’une école abandonnée dans le quartier de Shujaiya à Gaza même.

 

 

Durant la perpétration de son génocide à Gaza, l’armée israélienne a tué et blessé un certain nombre de journalistes et de membres du personnel d’Al Jazeera, de même que bon nombre de leurs proches.

Une attaque de drone israélien a tué un cameraman d’Al Jazeera et a blessé le responsable local du réseau, Wael al-Dahdouh, en décembre. Le 25 octobre, Israël avait tué la femme d’al-Dahdouh, son fils, sa fille et son petit-fils dans le camp de réfugiés de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza.

Des journalistes massacrés

Samedi, une frappe aérienne israélienne a tué le photographe Baha Akasheh et des membres de sa famille au camp de réfugiés de Jabaliya, dans la partie nord de Gaza, portant ainsi à 143 le nombre de journalistes palestiniens tués dans la bande de Gaza au cours du génocide israélien, d’après le bureau des médias du Hamas à Gaza.

 

Le Comité de protection des journalistes dit qu’il a pu confirmer les décès d’au moins 92 journalistes palestiniens et trois journalistes libanais.

Les attaques israéliennes ont également tué quatre contributeurs de The Electronic Intifada, ainsi que des membres de leurs familles, depuis le 7 octobre.

Parmi ces tués, Mohammed Hamo, un journaliste et traducteur vivant à Gaza, et qui a été tué en compagnie de membres de sa famille en novembre.

En août 2023, Hamo avait rédigé un article pour The Electronic Intifada à propos d’un photographe qui avait été capturé par des soldats israéliens alors qu’il couvrait la Grande Marche du Retour en mai 2018.

Les forces israéliennes avaient tiré sur Hatim Abu Sharia et son collègue, puis les avaient capturés, les accusant d’être entrés illégalement en Israël et d’avoir photographié des sites militaires sans autorisation. Hatim Abu Sharia avait été condamné à cinq années d’emprisonnement et avait été libéré en 2023.

La semaine dernière, Hatim Abu Sharia a été tué par une frappe aérienne israélienne en compagnie de nombreux membres de sa famille.

Cette fois, le journaliste Hamo et le sujet de son article ont bel et bien été tous deux tués dans le génocide en cours.

Ç’a été « le conflit le plus dangereux de toute l’histoire récente, pour les journalistes », ont déclaré en février des experts des Nations unies.

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Publié le 11 mai 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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