Les combattants du Hamas envahissent Israël, tout en capturant et tuant nombre de ses soldats

Très tôt, ce samedi, le Hamas a lancé contre l’armée israélienne une opération surprise d’une ampleur sans précédent et dont le nom de code était « Déluge d’Al-Aqsa », a déclaré le chef militaire de l’organisation de résistance.

 

Les combattants du Hamas envahissent Israël : Ce 7 octobre 2023, des Palestiniens grimpent sur un char israélien en flammes à proximité de la clôture de frontière entre Gaza et Israël.

Ce 7 octobre 2023, des Palestiniens grimpent sur un char israélien en flammes à proximité de la clôture de frontière entre Gaza et Israël.

 

Maureen Clare Murphy & Ali Abunimah, 7 octobre 2023

Cette journée marque pour Israël un terrible échec stratégique en même temps qu’une cinglante défaite, même s’il bombarde Gaza en guise de représailles.

Après des heures de silence public, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a déclaré que le Hamas allait payer un « prix sans précédent », dans le même temps que, dans divers endroits non loin de Gaza, les combats se poursuivaient entre les combattants de la résistance palestinienne et les forces israéliennes.

 

Des combattants palestiniens venus de Gaza se sont infiltrés en Israël en même temps que, pendant plusieurs heures, des milliers de roquettes étaient lancées vers Israël à partir de l’enclave.

Le Hamas prétend avoir capturé plusieurs douzaines d’Israéliens.

 

Des civils palestiniens venant de Gaza sont également entrés en Israël. La grande majorité de la population de Gaza (plus de deux millions d’habitants) est constituée de réfugiés venus de terres situées à la périphérie de l’enclave côtière, laquelle subit le châtiment d’un siège israélien depuis 16 longues années et une occupation militaire depuis plus d’un demi-siècle.

Une vidéo montre des Palestiniens écrasant à l’aide d’un bulldozer la clôture frontalière de la périphérie de Gaza, communément décrite comme une prison en plein air en raison du siège que lui impose Israël :

 

Des vidéos en provenance de communautés israéliennes à proximité de la bande de Gaza montrent des scènes sans précédent de combattants armés qui se répandent dans les rues.

D’autres vidéos montrent un soldat israélien blessé ou tué traîné hors d’un véhicule à Gaza. Une autre vidéo, paraît-il, montre le corps d’un Israélien à l’arrière d’un camion à Gaza également.

Sur de nombreuses vidéos, on peut voir des soldats – et peut-être des civils – israéliens arrêtés par des Palestiniens.

D’autres vidéos encore montrent des combattants palestiniens avec ce qui s’avère être un véhicule militaire israélien capturé, lors du retour à Gaza de l’attaque surprise. Une foule en extase est massée autour d’eux :

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Un char israélien au moins a été détruit et un soldat israélien au moins est visible sur une vidéo au moment où on le sort d’un char afin de l’emmener à Gaza.

Sur une autre vidéo, un homme debout près d’un engin en feu prétend que tout l’équipage a été capturé par les combattants palestiniens :

 

Les combattants de la résistance palestinienne se sont emparés entièrement d’une base militaire israélienne. Une vidéo prise par des combattants de la résistance et diffusée sur Al Jazeera et d’autres sites montre des soldats morts ainsi que des positions, des véhicules blindés et des chars israéliens abandonnés.

Une vidéo diffusée par l’aile militaire du Hamas montre les corps d’une douzaine de soldats israéliens.

Aucun soldat israélien survivant ne semble avoir pu fuir de la base, une importante installation fortifiée à l’aide de murs en béton.

Armées uniquement d’armes légères, les forces palestiniennes se déplaçant à l’aide de mobylettes ont en fait engrangé un étonnant succès tactique contre ce que l’on présente comme l’une des plus fortes armées du monde.

L’aile militaire du Hamas a également publié une vidéo de son escadron d’élite, « Saqr », utilisant des parapentes motorisés, une sorte d’ULM. On dit que l’unité a participé à l’attaque de ce matin, bien qu’il soit possible que la vidéo montre une opération d’entraînement filmée quelque temps auparavant :

https://twitter.com/shejae3a/status/1710564720795627720?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1710564720795627720%7Ctwgr%5E3582cf59f1f58e204d3de03ab5dc3708d7222939%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fcontent%2Fhamas-fighters-gaza-storm-israel-capture-and-kill-soldiers%2F38631

 

Une autre vidéo montre un homme fait prisonnier dans un véhicule à Gaza, apparemment sans blessure sérieuse.

Il a été dit également que les combattants palestiniens avaient infiltré un poste de police en Israël, où une fusillade a eu lieu vers 9 heures du matin, heure locale.

Quatre personnes ont été tuées, dit-on, par des frappes de roquettes dans des villages bédouins du sud d’Israël et une Israélienne a elle aussi été tuée lors d’un tir de roquette.

Les villages bédouins où il y a eu des morts n’avaient probablement pas d’abris.

 

Israël a déclaré l’état d’urgence dans le sud et le centre du pays, y compris à Tel-Aviv. Les médias israéliens sont désormais soumis à la censure militaire.

 

La résistance bien décidée à agir

Muhammad Deif, le chef militaire du Hamas, a déclaré « Nous avons décidé de mettre un terme à tous les crimes de l’occupation », y compris les attaques contre les fidèles et les provocations à la mosquée al-Aqsa de Jérusalem.

Ismail Haniyeh, le chef du bureau politique du Hamas, a expliqué que les provocations à al-Aqsa ces derniers jours constituaient la principale raison de l’attaque surprise.

Deif a également dit que les appels en faveur d’un échange de prisonniers

« avaient essuyé un refus et que les violations quotidiennes se poursuivaient en Cisjordanie ».

De plus, Deif a annoncé qu’« à partir de ce jour, la coordination sécuritaire était terminée », faisant allusion à l’Autorité palestinienne fonctionnant en tant que bras policier de l’occupation israélienne en réprimant les activistes de la résistance en Cisjordanie.

L’Autorité palestinienne s’est engagée avec l’Arabie saoudite à tirer parti d’un accord de normalisation entre le royaume du Golfe et Israël, accord encouragé par les EU, mais rejeté par le Hamas et le reste de l’axe de la résistance.

Deif a insisté pour que les Palestiniens de Jérusalem et d’Israël rejoignent le combat et pour que « la résistance islamique au Liban, en Irak, en Syrie et au Yémen » se mette en marche vers la Palestine.

Certaines mosquées de Jérusalem-Est, dit-on, ont invité instamment les Palestiniens à se mobiliser.

Le Hamas s’était abstenu de s’engager dans un combat direct contre Israël après que ce dernier avait assassiné trois dirigeants du Djihad islamique au coures d’attaques aériennes surprises contre Gaza un peu plus tôt cette année.

Mais le Hamas considère Jérusalem, avec al-Aqsa au beau milieu, comme une cause nationale pour laquelle il est entré en guerre contre Israël dans le passé, et récemment encore, en mai 2021.

Yoav Galant, le ministre israélien de la Défense, a déclaré ce samedi qu’Israël « allait gagner cette guerre ».

Et d’ajouter que « les soldats israéliens combattaient l’ennemi sur tous les sites d’infiltration ». N’empêche que des résidents de communautés israéliennes infiltrées par des Palestiniens ont expliqué aux médias qu’ils avaient été abandonnés par les autorités.

Kobi Shabtai, le chef de la police israélienne, a déclaré samedi matin : « Nous sommes en état de guerre. Nous subissons une attaque massive depuis la bande de Gaza », avec plus de 21 scènes de confrontations dans le sud du pays.

Alors que le cabinet israélien de la sécurité se réunissait ce samedi, les Palestiniens à Gaza faisaient des réserves de provisions en anticipation d’une nouvelle opération militaire majeure contre le territoire :

Des centaines de Palestiniens vivant le long de la frontière entre Gaza et Israël se sont enfuis de leurs foyers, dans la crainte de frappes israéliennes :

 

Un échec massif

Des images de Palestiniens prenant l’armée israélienne tant vantée totalement par surprise seront perçues en Israël et dans le monde entier comme un échec stratégique massif et ce, quoi que fasse Israël par la suite.

Cette opération est venue près de 50 ans jour pour jour après que l’Égypte avait créé une surprise stratégique historique. Le 6 octobre 1973, les forces égyptiennes avaient mené une offensive amphibie massive de l’autre côté du canal de Suez, en vue de libérer la péninsule du Sinaï qu’Israël avait occupée en même temps que la bande de Gaza, la Cisjordanie et les hauteurs syriennes du Golan, en 1967.

Contre toute attente, l’Égypte avait percé une brèche dans ce qu’on appelait la ligne Bar-Lev, des fortifications militaires qu’Israël considérait comme imprenables, mais qui avaient néanmoins été enfoncées en quelques heures par les forces égyptiennes.

Bien qu’avec l’aide d’un énorme pont aérien de l’armée américaine, Israël fût parvenu à modifier le cours de la guerre et à réoccuper la majeure partie du territoire égyptien libéré, les récriminations et le sentiment d’échec avaient finalement abouti à la fin du mandat et de la carrière politique de la Première ministre israélienne Golda Meir.

Les événements de samedi sont déjà décrits comme un « échec colossal » par les commentateurs israéliens.

Samedi matin, Eli Maron, un ancien chef de la marine de guerre israélienne, a déclaré lors d’une interview télévisée : « Tout Israël se demande où est l’armée israélienne, où est la police, où est la sécurité ? »

« C’est un échec colossal ; les hiérarchies ont tout simplement échoué, avec d’immenses conséquences », a ajouté Maron.

La résistance palestinienne a dépassé incroyablement tout ce qu’on pouvait attendre de ses capacités, bien qu’elle connaisse un immense désavantage sur le plan des ressources, quand on la compare à Israël.

Même si la situation militaire suit un cours logique, il est d’ores et déjà certain que le 7 octobre 2023 aura des implications politiques profondes dans toute la région, particulièrement du fait qu’Israël et l’Arabie saoudite s’avèrent plus proches que jamais d’une officialisation de leurs liens longtemps gardés secrets.

Netanyahou avait été bien inspiré de dire que la normalisation avec Riyadh allait être un « bond quantitatif » qui transformerait la région en faveur d’Israël.

Le mois dernier, il avait affirmé qu’un accord avec les Saoudiens allait « changer à jamais le Moyen-Orient ». Cela allait faire tomber les « murailles de l’hostilité » et créer

« un corridor de pipelines d’énergie, de lignes de chemin de fer, de câbles de fibre optique qui rapprocherait l’Asie en passant par l’Arabie saoudite, la Jordanie, Israël et les Émirats arabes unis ».

Les scènes choquantes, sans précédent, qui se déroulent aujourd’hui ont pulvérisé cette chimère.

Un message sans équivoque émane du Hamas : Que les régimes arabes comme l’Arabie saoudite normalisent ou pas leurs relations avec Israël, la question de la Palestine ne sera pas brossée sous le tapis.

Le peuple palestinien refuse d’être enterré sous la tyrannie israélienne, loin des regards et des esprits, pendant que les régimes de la région font la fête.

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Maureen Clare Murphy est rédactrice en chef de The Electronic Intifada.

                                      

 

Ali Abunimah, cofondateur et directeur exécutif de The Electronic Intifada, est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine, paru chez Haymarket Books.

Il a aussi écrit : One Country : A Bold Proposal to end the Israeli-Palestinian Impasse

             

 

Publié le 7 octobre 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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