Des mobilisations pour les prisonnier.e.s palestinien.ne.s à Bruxelles et Charleroi
Le 17 avril marque la Journée des prisonnier.e.s palestinien.ne.s, la journée internationale annuelle en vue de se concentrer sur la lutte et la libération des prisonnier.e.s palestinien.ne. A cette occasion, parmi d’autres, une soirée impressionnante a eu lieu à Bruxelles et une action a été organisée dans le centre de Charleroi.
Une délégation de la Plateforme Charleroi-Palestine s’est rendue ce vendredi 18 avril à l’excellente rencontre publique « Prisonniers palestiniens – Enjeux actuels et perspectives de libération ».
Nous publions ici le témoignage qu’un ami bruxellois nous a fait parvenir et qui traduit tout à fait nos sentiments. Merci à lui.
« Le 18 avril, j’ai participé à la conférence organisée par Samidoun et d’autres collectifs à Bruxelles (Pianofabriek – Saint-Gilles) à l’occasion de la Journée des prisonnier.e.s politiques palestinien.ne.s.
Ce fut une soirée de très haut niveau, tant sur le fond que sur la forme. Il y avait plus de 100 participants, dont 95 % de jeunes et 80 % de jeunes femmes motivées. C’est une participation très remarquable et pleine d’espoir.
Les deux camarades qui animaient la soirée sont de jeunes Palestiniennes qui étudient à la VUB, l’une de Gaza et l’autre du camp de réfugiés d’Ain al-Helweh (Saïda, Liban). Elles parlaient couramment le français et l’anglais (ainsi que l’arabe et le néerlandais) et ont mené la discussion de manière excellente, en se concentrant sur les thèmes centraux de la résistance et de la lutte pour la libération de la Palestine.
Cinq personnes ont été invitées à prendre la parole : Hadeel Shattara et Fadia Barghouti, deux Palestiniens libérés par la résistance dans les Accords de Toufan al Ahrar ; Adel, un camarade de Samidoun Paris Banlieue ; Nathan, un camarade actif au sein de l’Université Populaire de Bruxelles (l’occupation étudiante de l’ULB au printemps 2024) ; ainsi qu’une camarade du collectif Getting the Voice Out, qui lutte contre l’enfermement des sans-papiers, pour souligner la convergence des luttes.
Les anciennes prisonnières, avec nous sur Zoom, ont dénoncé la répression et décrit la misère en prison. Mais leurs propos n’étaient ni des plaintes, ni des lamentations, leurs témoignages étaient pleins de dignité et illustratifs de la volonté et de la force de tout un peuple, que l’on peut caractériser par le terme ‘sumud’.

Hadeel Shattara et Fadia Barghouti
Le discours du camarade de Samidoun Paris était très intéressant. Il a expliqué l’immense importance politique de la lutte des prisonnier.e.s, leur rôle central dans la lutte de libération (« les prisonniers sont notre boussole ») et la façon dont leur existence et leurs actions nous accompagnent dans nos luttes au-delà des murs de la prison. Il a notamment évoqué Georges Ibrahim Abdallah et Walid Daqqah (et l’œuvre de ce dernier, exemple de l’importance de la littérature produite par les prisonniers pour comprendre le système carcéral colonial). Il a également rappelé la place de Toufan al Aqsa (le 7 octobre) dans un contexte où la libération des prisonniers est au cœur de la lutte palestinienne. Enfin, il a parlé de toutes ces autres luttes, pour nous rappeler la force des peuples lorsqu’ils se soulèvent contre l’oppresseur, d’Haïti (peuple de prisonniers asservis qui a arraché sa liberté au pouvoir colonial français il y a 200 ans) à l’Algérie. Ce slogan l’illustre : Haïti a gagné, le Vietnam a gagné, l’Algérie a gagné, la Palestine gagnera elle aussi.
Adel, un camarade de Samidoun Paris Banlieue
Le camarade qui a participé à l’occupation de la Palestine par l’ULB a expliqué comment lui et ses camarades ont mené des discussions approfondies et développé une position politique anticoloniale, qui ne se limitait pas à « libérer la Palestine », « arrêter le génocide » et obtenir une « trêve », mais soutenait la lutte, y compris la lutte armée, des Palestiniens pour retrouver l’intégralité de leur patrie. Par conséquent, cette occupation est allée beaucoup plus loin que la courageuse occupation de Gand.
La camarade du collectif Getting the voice out, qui défend les sans-papiers détenus, a témoigné de la façon dont ces personnes sans défense sont humiliées et isolées sans aucune perspective de trouver la liberté et la protection qu’elles ont recherchées dans notre pays.
La soirée s’est terminée sur l’appel de Hadeel Shattara, ancienne prisonnière :
« Continuons à affaiblir l’entité sioniste et ses soutiens impérialistes, partout où nous le pouvons et de toutes les façons que nous le pouvons. »
Action dans le centre-ville de Charleroi
Le lendemain, samedi 19 avril, une équipe de la Plateforme s’est installée Place Verte à Charleroi. Une tonnelle a été dressée, décorée des photos des prisonnier.e.s palestinien.ne.s et des prisonnier.e.s martyr.e.s, ainsi que des calicots pour la libération de Georges Abdallah, d’Ahmad Sa’adat et de tou.te.s les prisonnier.e.s palestinien.ne.s. Les drapeaux palestiniens flottaient sur la place et les passants découvraient également des messages contre le génocide en cours, pour le boycott d’Israël et en faveur de la résistance palestinienne.
Au stand, les passant.e.s retrouvaient des foulards et bracelets en soutien à la Palestine, des T-shirts et des livres et pouvaient également adresser des cartes aux prisonnières palestiniennes.
Deux participantes ont lu un texte écrit par plusieurs résistantes palestiniennes qui ont connu les geôles sionistes.
Elles ont écrit ce texte le 25 novembre dernier en soutien à leurs sœurs enfermées. Depuis, une partie d’entre elles sont sorties grâce à l’accord d’échange arraché par la Résistance et le peuple de Gaza, en ce début d’année.
Actuellement 29 prisonnières Palestiniennes restent incarcérées . Ce texte nous est parvenu par la campagne Dismantle Damon.
Voici le texte :
Chers camarades,
Depuis la Palestine, je vous écris avec ma voix, avec la voix de toutes les prisonnières opprimées dans la prison de Damon, avec la voix de Khalida Jarrar depuis sa cellule d’isolement, et avec la voix de toutes les femmes de Palestine, qui subissent en permanence diverses formes d’oppression et de violence – que ce soit de la part de la dite « Autorité palestinienne » locale ou de l’armée coloniale sioniste.
Elles sont ciblées à plusieurs niveaux : d’abord parce qu’elles sont Palestiniennes, ensuite parce qu’elles sont des femmes. Leurs corps deviennent alors des instruments de pression et de violence – une réalité constante qui ne prendra fin qu’avec une
libération totale et complète.Dans une boîte de fer fermée, glaciale en ces jours, sans nourriture, sans traitement pour les maladies, sans vêtements ni couvertures, les filles de Damon souffrent aujourd’hui. Elles sont maintenant près d’une centaine. Dans ces conditions difficiles et inhumaines, chacune est privée de ses enfants, de sa mère ou de l’être aimé: ce sont autant d’histoires que le monde doit écouter.
L’un des aspects les plus durs de leur détention est la rupture avec leurs familles, l’absence totale de lien avec l’extérieur, et la
négligence des institutions et des avocats, qui se comportent comme des marchands dans cette guerre. Un autre point crucial est l’absence de toute intimité, les geôliers surveillant les prisonnières 24 heures sur 24.Bien que les femmes prisonnières décrivent Damon comme un cimetière pour les vivantes, elles résistent avec patience et résilience, sachant avec certitude qu’un jour elles seront libres. Elles ne laissent pas l’occupation, avec tous ses outils (explicites ou implicites) briser leurs âmes. Les prisons politiques ont été conçues pour nous briser, mais nous les transformons en espaces
d’apprentissage où nous devenons plus fortes.Aujourd’hui, les masques tombent : tous les colonisateurs et oppresseurs se reconnaissent dans Israël, et tous les colonisés et opprimés se reconnaissent dans la Palestine. Les oppresseurs croient que leur voix est la plus forte, mais la nôtre, celle du peuple, est plus puissante.
De nombreux pays sont complices du génocide : ils continuent de soutenir Israël non seulement financièrement, mais aussi militairement. Ces mêmes pays qui se prétendent défenseurs des droits humains et du droit international ont révélé leur double discours et standards en réagissant au mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale contre deux criminels sionistes brutaux alors même qu’il s’agissait d’appliquer l’égalité des droits et le droit international.
Le monde continue d’ignorer la vie de deux millions de personnes à Gaza. Nous voyons chaque jour, sous nos yeux, la violence du colonialisme en Cisjordanie, sans qu’aucun compte ne soit exigé et rendu. Le nombre de captifs palestiniens dans les prisons israéliennes augmente rapidement, en particulier celles et ceux sous le coup des détentions administratives.
Les Palestinien-nes dans les prisons sionistes sont confrontés à la famine délibérée, aux maladies et aux épidémies.
Nous promettons de ne pas laisser nos femmes seules à Damon ! Nous ne nous plierons jamais
à l’oppression, au nettoyage ethnique, ni au génocide !Aux gouvernements et régimes abusifs, nous disons: votre violence ne fera pas taire nos voix. Nous
ne serons pas du mauvais côté de l’Histoire !Comme Khalida Jarrar l’a dit :
« Ils essaient de faire taire nos voix, mais ils n’y arriveront pas, et nous continuerons à les
élever haut et fort. »Libérez nos femmes de la prison de Damon et toutes les femmes victimes de disparition forcée par l’état sioniste.
Libérez nos pères, frères et maris bien-aimés de toutes les prisons coloniales israéliennes.
Et souvenez-vous : là où il y a oppression, la résistance est un devoir.
Génération après génération, jusqu’à la libération totale !
Rejoignez-nous lors de notre prochaine présence Place Verte : ce sera le samedi 17 mai, de 15 h à 17 h.