L’histoire d’amour de Joe Biden avec Israël va reprendre là où elle avait été interrompue

Le Premier ministre Benjamin Netanyahou a toutes les raisons de s’attendre à ce que Joe Biden travaille pour Israël, exactement comme l’avait fait l’administration Obama.

Biden et Nethanyahou (Photo : Ambassade des États-Unis à Jérusalem)

Ali Abunimah, 8 novembre 2020

Alors que Donald Trump conteste toujours sa défaite aux élections présidentielles américaines, on a consacré beaucoup d’attention aux dirigeants étrangers mêmes qui ont félicité les vainqueurs une fois la course terminée, samedi.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahou a pris son temps, attendant que nombre de dirigeants mondiaux aient reconnu Joe Biden et Kamala Harris comme vainqueurs.

Finalement, dimanche, Netanyahou a rejoint le club.

« Joe, nous entretons de longues et chaleureuses relations personnelles depuis près de 40 ans, et je te sais un grand ami d’Israël », a écrit Netanyahou dans un tweet adressé au président élu Biden et à la vice-présidente élue Harris.

« J’attends impatiemment de travailler avec vous deux afin de consolider plus encore l’alliance particulière entre les États-Unis et Israël. »

Le moment était sans aucun doute délicat, pour Netanyahou, dont l’étroite identification au populisme ultranationaliste et suprémaciste blanc de Trump a été une image de marque au cours de ces quelques dernières années.

Mais Netanyahou a raison à propos de l’engagement inconditionnel envers Israël de Biden tout au long de sa carrière.

Déjà en 1986, Biden déclarait au Sénat qu’Israël était

« le meilleur investissement de 3 milliards de USD que nous ayons jamais fait ».

« SI Israël n’existait pas, les États-Unis d’Amérique devraient l’inventer afin de protéger nos intérêts dans la région »,

avait-il afirmé.

C’est un thème auquel il revient très régulièrement.

« Israël est la seule force très importante dont l’Amérique dispose au Moyen-Orient »,

avait déclaré Biden au cours d’une interview, en 2007.

« Lorsque j’étais un jeune sénateur, j’aurais dit, ”Si j’étais juif, je serais sioniste” »,

avait ajouté Biden. « Je suis sioniste, il n’est nul besoin d’être juif pour être sioniste. »

Une querelle d’amoureux

L’amour de Biden pour Israël a survécu à tout ce qu’il a pu endurer. Y compris l’humiliation publique infligée par le gouvernement Netanyahou à Biden en 2010, alors qu’il était vice-président.

Apparemment, Israël avait minuté l’annonce d’une nouvelle colonie à Jérusalem-Est dans l’intention particulière d’embarrasser Biden, qui était en visite en Israël dans un effort en vue de faire progresser les efforts de « paix » de l’administration Obama.

Obama avait instamment invité Israël à interrompre temporairement la mise en place des colonies, afin de donner une chance à l’initiative.

Toutefois, cette querelle d’amoureux avait été rapidement oubliée.

Pendant la seule administration Obama, Israël avait poursuivi la construction de presque autant d’unités de logement dans les colonies en Palestine occupée qu’il n’en avait construit durant l’administration George W. Bush.https://electronicintifada.net/blogs/rania-khalek/atrocities-mount-gaza-us-approves-israeli-request-more-bombs

Et ce n’est pas tout : Quand Israël avait tué une moyenne de 11 enfants par jour lors de son offensive contre Gaza durant l’été 2014, l’administration Obama-Biden avait refourni Israël en munitions.

Les vrais amis ne laissent pas leurs amis tomber à court de missiles quand ils sont occupés à bombarder une population appauvrie et sans défense de réfugiés entassés dans un ghetto.

Pendant les 51 jours de son offensive, Israël avait tué plus de 2 200 Palestiniens.

L’administration Obama-Biden s’était empressée d’entrer en action afin d’empêcher les Palestiniens de réclamer justice devant la Cour pénale internationale pour les crimes de guerre israéliens.

Tous ceux qui espéreaient quelque chose de différent en ces temps présents devraient se préparer à une désillusion rapide.

Biden adopte la politique de Trump

Biden a déjà adopté certaines des mesures politiques pro-israéliennes portant la signature de Trump.

Il a favorablement accueilli les accords de normalisation mis sur pied par l’administration Trump entre Israël et les Émirats arabes unis ainsi que Bahreïn.

Biden s’est engagé à ne pas ramener l’ambassade des États-Unis de Jérusalem à Tel-Aviv.

Néanmoins, il y a un léger changement de ton.

Dans une interview réalisée avant les élections, Kamala Harris avait promis que l’administration Biden allait restaurer l’aide humanitaire aux Palestiniens, interrompue par Trump, et rouvrir le consulat américain à Jérusalem-Est.

La restauration de l’aide aux hôpitaux de Jérusalem-Est ou à l’agence UNRWA pour les réfugiés serait la bienvenue – pour autant qu’elle aide réellement les Palestiniens dans le besoin.

Mais, au mieux, elle constituerait un retour à un statu quo dans lequel les Palestiniens sont maintenus sous la dépendance d’un soutien existentiel dans le même temps qu’Israël continue de façon on ne peut plus agressive à voler leurs terres et à violer leurs droits en toute impunité.

« Joe et moi croyons également en la dignité et la valeur de chaque Palestinien et de chaque Israélien, et nous nous emploierons à faire en sorte que les Palestiniens et les Israéliens bénéficient de mesures égales sur le plan de la liberté, de la sécurité, de la prospérité et de la démocratie »,

avait déclaré Harris.

« Nous sommes engagés vers une solution à deux États, et nous nous opposerons à toutes les démarches unilatérales qui contrecarrent cet objectif. Nous nous opposerons également à l’annexion et à l’expansion des colonies »,

avait-elle ajouté.

Laissant de côté le fait que la solution à deux États est morte et enterrée, il n’y a aucune raison de prendre pour argent comptant ces engagements, même s’ils sont minimes.

Les démocrates disent toujours qu’ils s’opposent aux colonies et qu’ils veulent voir une solution à deux États mais, comme l’ont prouvé les huit années de l’administration Obama-Biden, cela ne se traduit jamais dans les faits.

Dans son mémoire de 2018, Ben Rhodes, vice-conseiller en sécurité nationale sous l’administration Obama-Biden, défend opiniâtrement son patron contre les accusations prétendant qu’il soutenait trop les Palestiniens.

Rhodes écrit que les critiques qui accusaient Obama de ne pas être suffisamment pro-israélien

« ignoraient le fait qu’il [Obama] ne faisait rien de tangible pour les Palestiniens ».

Un paquet d’aide record

En effet, l’un des derniers actes de l’administration Obama-Biden consista à récompenser la prolifération des colonies d’Israël et ses massacres par le plus gros paquet d’aide militaire de l’histoire – un minimum de 38 milliards de USD en dix ans.

Cette fois, selon The Jerusalem Post,

« Israël prévoit dans les tout prochains mois de contacter l’administration du président élu des États-Unis, Joe Biden, afin d’entamer les discussions sur la formulation d’un nouveau plan d’aide militaire à long terme ».

« Nous voudrons parler d’un nouveau paquet et d’un nouveau programme »,

a expliqué un haut responsable israélien au journal.

« Le nouveau plan devra prendre en compte les menaces et défis changeants auxquels nous sommes confrontés dans le Moyen-Orient. »

En d’autres termes, Israël prévoit d’accroître ses demandes auprès des contribuables américains.

Chaque fois qu’une nouvelle administration s’installe, l’on assiste à une vague de spéculation et d’optimisme déplacé concernant les personnes qu’elle va désigner et ce qu’elle va faire pour relancer le « processus de paix ».

Personne ne devrait se laisser distraire par ces jeux de salon.

Les mots de bienvenue de Netanyahou à l’adresse de Biden sont sincères, parce qu’il sait que le président américain entrant va faire tout ce qu’il peut pour aider Israël, exactement comme chaque démocrate et chaque républicain l’ont fait avant lui.


Publié le 8 novembre 2020 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal

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