Palestine Media Watch : une trompette de la propagande sioniste

Plus Israël est critiqué au niveau international pour ses pratiques répressives et brutales à l’encontre des Palestiniens, plus il crée des méthodes et moyens malicieux détournés afin de couvrir et de justifier son comportement et de poursuivre la réalisation de ses rêves. Il fabrique sans la moindre honte des mensonges qu’il diffuse ensuite en vue de diffamer et de diaboliser les Palestiniens, de ternir leur image et de taxer de terrorisme leur refus de cette répugnante occupation israélienne. L’un de ces moyens n’est autre que Palestine Media Watch.

Palestine Media Watch a été fondé en 1996. (Photo : The Palestine Chronicle)

Palestine Media Watch a été fondé en 1996. (Photo : The Palestine Chronicle)

Issam Khalidi, 14 novembre 2020

Lors d’une de ses visites aux États-Unis, la membre du comité exécutif de l’OLP, Hanan Ashrawi, avait fait état de cette organisation :

« Puis il y a des organisations toxiques, comme vous le savez, et elles ont été très efficaces dans la distorsion du message palestinien concernant la réalité (…) Vous avez PM Watch qui attend également que le moindre Palestinien, homme ou femme, ouvre la bouche, pour passer aussitôt à l’attaque. »

Israël a toujours été très fort pour diffuser sa propagande sur base du raisonnement disant :

« Répétez un mensonge suffisamment fréquemment et il se muera en vérité ».

De la sorte il a pu gagner la sympathie de la communauté internationale et se profiler comme une victime qui tombe entre les griffes de Palestiniens « violents » qui, en fait, ne sont eux-mêmes que les victimes de l’occupation israélienne. Et il n’y a là rien de neuf. Tout cela est inhérent à la nature coloniale du sionisme. En 1928, Arthur Ruppin, considéré par un écrivain israélien comme le « père spirituel » de la colonisation sioniste en Palestine, écrivait :

« Il m’est apparu clairement à quel point il était malaisé de concrétiser le sionisme d’une façon compatible avec les exigences de l’éthique universelle. Je m’en suis retrouvé absolument déprimé. »

Ces propos n’émanaient pas d’un dirigeant antisémite, d’un homme qui haïssait les Juifs, mais bien d’un ardent penseur et dirigeant sioniste.

Palestine Media Watch a été créé en 1996. Il reflète les véritables intentions israéliennes dans le processus de paix et ses plans prévoyant de poursuivre son occupation et d’accélérer l’expansion des colonies en Cisjordanie. Et, malgré la coordination sécuritaire avec Israël et les concessions faites par l’AP lors des négociations de paix, cette trompette n’a jamais cessé de diaboliser chaque aspect de la Palestine et des Palestiniens, y compris l’AP. Et ce, parce que rien ne peut satisfaire suffisamment l’appétit d’expansion d’Israël et son penchant sadique pour l’humiliation et l’injustice.

Le fondateur et directeur de PMW, Itamar Marcus, est un colon qui a quitté New York pour aller vivre dans la colonie israélienne d’Efrat, construite sur des terres palestiniennes volées à proximité de Bethléem, en Cisjordanie occupée, ce qui constitue un crime de guerre. Il avait été interviewé pour le film antimusulman, Obsession, et il entretient des liens avec des islamophobes notoires d’extrême droite, tels Geert Wilders et David Horowitz. Il est également publié par le Gatestone Institute, un think tank extrémiste célèbre pour sa propagation de hoaxes destinés à attiser la haine et la crainte des musulmans.

Quand on examine le site internet de PMW, la première chose qui vient à l’esprit, c’est qu’on a l’impression que la Nakba (la « catastrophe » de 1948) n’a jamais eu lieu, alors que 750 000 Palestiniens ont été forcés de fuir la Palestine, en laissant derrière eux tout ce qu’ils avaient, leur terre, leur maison, leur village, qui furent livrés ensuite au pillage et à la destruction. Ce site légitime les 53 années d’occupation israélienne, l’expansion des colonies israéliennes, la poursuite de la construction du mur de l’apartheid, le blocage militaire de la vallée du Jourdain et l’annexion de Jérusalem-Est, le massacre de milliers d’enfants et de jeunes, dont une grande partie de sang-froid, sans oublier les 13 années du siège de Gaza par Israël, siège qui a condamné le 1,9 million d’habitants de l’enclave à des conditions de vie terribles.

Il n’existe aucune idéologie qui, comme le sionisme, soit capable d’interpréter des faits en fonction de ses propres intérêts. Le dictionnaire d’Oxford définit la résistance comme le refus d’accepter quelque chose ou de s’y plier. La résistance palestinienne ne diffère d’aucune autre résistance à l’occupation et au colonialisme, telles, par exemple, la résistance de la France à l’occupation de l’Allemagne nazie ou la longue lutte de l’Algérie contre les colonialistes français, ou d’autres encore. La résistance est un droit pour tous les peuples à s’opposer aux forces de la répression, à l’injustice et à l’humiliation. La dictionnaire israélien est truffé de conceptions trompeuses, il définit la résistance palestinienne contre l’occupation israélienne comme de la violence et du terrorisme et le combat non violent de BDS comme de l’antisémitisme. Le sionisme est la seule idéologie politique qui prétend qu’être en désaccord avec elle constitue un délit de haine.

Israël considère quasiment tous les partis et organisations de Palestine comme des organisations terroristes, y compris le Comité olympique palestinien et la PFA (Association palestinienne de football), qui ont été accusés par le PMW d’avoir nommé des compétitions et tournois sportifs d’après des « meurtriers », en réalité des personnes qui ont sacrifié leur vie pour la liberté, qui ont été des symboles et des icônes de la lutte des Palestiniens pour leurs droits.

Israël pratique le terrorisme et l’épuration ethnique contre les Palestiniens depuis les années 1930. Je suis absolument persuadé qu’Itamar Marcus et son organisation toxique sont bien conscients qu’il y a eu des terroristes sionistes qui sont devenus Premiers ministres, tels Menahem Begin, qui dirigea l’organisation terroriste Irgoun, et Yitzhak Shamir, qui dirigea le Lehi (Combattant pour la liberté d’Israël). En sus du Palmah, du Vaad Leumi et de la Haganah, ces organisations terroristes jouèrent un rôle prépondérant dans la création de l’État d’Israhël.

Au cours des matches de football, les fans du Beitar Jérusalem scandaient « Mort aux Arabes » comme une forme de célébration. Ses fans attaquaient également les boutiquiers et travailleurs arabes du Malha Mall de Jérusalem, proche du Teddy Stadium. Le Beitar a été fondé par le révisionniste Jabotinsky en 1926, et il a émergé comme un mouvemernt opposé à la Histadrut des travailleurs de Palestine et ses membres portaient des chemises brunes, ce qui faisait partie de la coloration fasciste du mouvement. Quant à ceux qui se sont séparés de la Haganah en 1930 et qui ont créé l’Etzel et le Lehi, ils étaient membres du Beitar. Dans les années 1930, leurs membres ont été impliqués dans des actes terroristes en Palestine.

Ce club de football présente la caractéristique de n’avoir jamais eu le moindre footballeur arabe dans ses rangs et, à en juger par un rapport de la chaîne de télévision du sport, ESPN, il ne semble en aucun cas avoir l’intention d’engager le moindre joueur qui ne soit pas d’origine juive.

Deux citoyens palestiniens d’Israël qui jouent dans des équipes israéliennes ont décrit pour ESPN le racisme et la violence auxquels ils sont soumis par les fans du Beitar. Alaa Abu Saleh, qui joue pour Bnei Sakhnin, déclare : « C’est comme une guerre. »

Il est certain qu’Israël a été en mesure d’infiltrer la FIFA. Avec les États-Unis, tous deux ont contribué à la désignation d’Infantino à la présidence de la FIFA. Malheureusement, après un rapport longuement attendu, la FIFA avait refusé en 2017 d’entreprendre quelque action contre les clubs de football situés dans les colonies israéliennes et installés sur des terres volées aux Palestiniens.

La FIFA se soumit aux allégations figurant dans un rapport de la très discréditée « Palestinian Media Watch » accusant le président de l’Association palestinienne de football, Rajoub, d’« incitation à la violence » et de « glorification du terrorisme » ou de « ne pas avoir condamné » un terrorisme présumé. La FIFA n’a pas répondu à un courriel de The Electronic Intifada lui demandant pourquoi elle prenait au sérieux les allégations de semblable organisation et pourquoi il avait apparemment fallu deux ans à la FIFA pour lancer son enquête.

Dans une de ses déclarations, PMW mentionnait qu’il était ironique d’entendre l’important dirigeant de l’AP, Jibril Rajoub (chef du Conseil suprême de la jeunesse et des sports), dire lors d’une exhibition de football à Paris que le sport était « un pont d’amour et une connexion avec la communauté internationale », si l’on considérait qu’il avait interdit à des joueurs, entraîneurs et équipes palestiniens de jamais s’engager en sport avec des Israéliens.

Tout d’abord, dans son discours à Paris, Rajoub parlait de la communauté internationale et non de la communauté israélienne. Secundo, les Palestiniens ne sont pas prêts à concourir avec des équipes et athlètes israéliens sous l’ombre de l’occupation, mais plutôt dans le cadre d’un État palestinien indépendant, avec Jérusalem comme capitale.

PMW critiquait la déclaration de Rajoub à propos de la normalisation des sports avec Israël :

[Jibril Rajoub] « a transmis ses bénédictions à tous les athlètes arabes qui ont refusé de concourir avec des athlètes israéliens ».

En fait, Rajoub invitait les pays arabes et islamiques à cesser toute espèce de normalisation avec Israël aussi longtemps qu’il n’adhérerait pas à la Charte olympique et qu’il ne reconnaîtrait pas le droit des athlètes palestiniens à se déplacer et à boycotter tous les sports et institutions de la jeunesse qui ont leur quartier général dans les colonies illégales, ou ceux qui exercent ou promeuvent leurs activités à l’intérieur des colonies.

Cette question fut abordée d’une manière adéquate par les intellectuels israéliens Ofir Winter et Yoel Guzansky, qui faisaient remarquer le dilemme à propos de la normalisation entre Israël et les États arabes depuis la création de l’AP :

D’une part, l’AP dépend de relations réciproques « normales » avec Israël, particulièrement dans les domaines de la sécurité et de l’économie, ce qui implique une interaction quotidienne entre les deux parties. Pour cette raison, depuis les accords d’Oslo, les Palestiniens ont été moins conservateurs sur la question de la normalisation que d’autres pays arabes – même ceux qui ont signé des accords de paix avec Israël.

D’autre part, en dépit de la flexibilité relative des Palestiniens, ils ont habituellement entrepris des actions en vue de restreindre tout déploiement de normalisation entre Israël et les pays arabes, particulièrement les États du Golfe et les pays maghrébins, afin de conserver un levier sur les négociations avec Israël à propos d’une implantation permanente.


Publié le 14 novembre 2020 sur The Palestine Chronicle
Traduction : Jean-Marie Flémal

Issam Khalidi est un intellectuel indépendant vivant à Monterey, en Californie. Il est l’auteur de History of Sports in Palestine 1900-1948 (en arabe), de One Hundred Years of Football in Palestine (en arabe et en anglais), il a coédité Soccer in the Middle East (Rutledge), et il est également l’auteur d’articles et d’essais sur des sujets sportifs, que l’on peut trouver sur le site www.hpalestinesports.net

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