Un mouvement de lutte pour la libération de la Palestine qui ne craint pas de clamer son nom

Bien que Masar Badil soit pour une Palestine unique et indivisée du fleuve à la mer, il se définit comme un mouvement de lutte pour la libération de toute la Palestine, ce qui n’est pas exactement la même revendication que celle exprimée par « un seul État démocratique », qui cherche à démanteler l’apartheid en Israël, plutôt qu’à libérer (décoloniser) la Palestine.

 

Photo : Masar Badil

Photo : Masar Badil

 

Rima Najjar, 14 novembre 2021

Maintenant que les informations sur Masar Basil commencent à faire surface, certains Palestiniens et leurs alliés sont sans doute un peu confus. En quoi ce mouvement diffère-t-il d’autres initiatives, tel le mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) et la Campagne pour un seul État démocratique (ODSC), qui ont déjà pris une certaine ampleur sur la scène internationale ?

À l’instar de BDS et d’ODSC, Masar Badil est un mouvement populaire de masse soutenu à partir de divers points de vue palestiniens. Mais il y a une différence fondamentale – et pas simplement théorique – dans l’approche de la lutte palestinienne au sein de ces mouvements. BDS constitue une tactique (inclue dans Masar) dénuée de programme politique. Et, bien que Masar soit pour une Palestine unique et indivisée du fleuve à la mer, il se définit comme un mouvement de lutte pour la libération de toute la Palestine, ce qui n’est pas exactement la même revendication que celle exprimée par « un seul État démocratique », qui cherche à démanteler l’apartheid en Israël, plutôt qu’à libérer (décoloniser) la Palestine.

Du fait que la rhétorique de Masar Badil dérive de l’idéologie communiste et de l’histoire révolutionnaire de l’OLP à l’époque de ses débuts (voir : The Palestinian National Charter: Resolutions of the Palestine National Council July 1–17, 1968 – La Charte nationale palestinienne : Résolutions du Conseil national palestinien – 1er-17 juillet 1968), et du fait que le mouvement identifie correctement les ennemis de la révolution palestinienne comme étant le sionisme, Israël, l’impérialisme et la réaction arabe, certaines personnes l’associent au Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP), mais il n’est en fait lié à aucun des blocs politiques palestiniens existants.

En fin de compte, de plus en plus de personnes s’expriment, bien qu’avec prudence, contre le sionisme, non seulement en tant que régime d’apartheid légalisé qui déshumanise les Palestiniens depuis qu’il s’est manifesté avec violence en Palestine en tant qu’État juif en 1948, mais surtout en tant que régime colonial de peuplement. Ces personnes rejettent les revendications sionistes (autrement dit, le « discours » d’Israël) portant sur la terre de Palestine en tant que terre appartenant aux juifs du monde entier et non à sa population autochtone, et elles allient la lutte palestinienne de libération de la colonisation sioniste à d’autres luttes partout dans le monde, y compris les luttes des peuples des Philippines, de l’île de la Tortue (Amérindiens) et de l’Afrique du Sud.

 Parmi les personnes s’exprimant contre l’idéologie sioniste figurent des juifs, et ce, dès l’époque où un mouvement antisioniste juif était déjà bien vivant, comme l’expriment, par exemple, les paroles d’une chanson de 1931 intitulée « Oy Ir Narishe Tsienistn / Oh You Foolish Little Zionists / Глупые Сионисты » (Oh ! Vous les petits sionistes ridicules) :

Vous voulez nous emmener à Jérusalem
Afin que nous puissions mourir comme une nation
Nous préférerions rester dans la diaspora
Et lutter pour notre libération

Il vaut la peine de remarquer que, parmi les nombreuses organisations et activistes qui ont participé à la conférence de Masar Badil figurait l’International Jewish Anti-Zionist Network (Réseau international juif antisioniste).

Masar Badil salue « la lutte tout entière de notre peuple palestinien dans tous ses lieux de résidence, et toutes les forces de la résistance en Palestine ». Masar Basil promeut une voie alternative de résistance révolutionnaire dont l’objectif est d’isoler l’État sioniste.

Ses cris de ralliement sont audacieux, directs, sans équivoque ni compromission :

Longue vie à la lutte de notre peuple palestinien où qu’il se trouve !
Aucune voix n’est plus forte que la voix du peuple Palestinien !
Gloire aux martyrs, liberté pour les prisonniers !
Nous reviendrons, et en vainqueurs !

Bien qu’enraciné dans la pensée politique révolutionnaire, Masar Badil est allé bien au-delà des généralités. Lors de la conférence qui s’est tenue à Madrid (Espagne), à Beyrouth (Liban) et à Sao Paulo (Brésil) entre le 30 octobre et le 2 novembre 2021, Masar Badil  

(…) a discuté non seulement de la politique de l’organisation et de la résistance palestiniennes, mais il a également développé un plan quinquennal et de nombreuses propositions politiques d’élaboration d’un plan distinct des activités à venir. Des comités se concentrant sur l’organisation des étudiants palestiniens, la protection et la concrétisation du droit palestinien au retour et la progression du boycott d’Israël ont été lancés, dans le même temps que la conférence prévoyait le développement d’un réseau de centres palestiniens dans de nombreuses villes du monde entier, censés se concentrer sur les besoins des réfugiés palestiniens ainsi que sur leur organisation et éducation politiques.

Masar Badil a devant soi une tâche très sacrée, à savoir la tâche de protéger la révolution palestinienne en ce moment critique de l’histoire de la Palestine, une histoire de quatre millénaires, comme la détaille l’historien Nur Masalha dans son ouvrage intitulé « De l’Égypte de l’âge tardif du bronze à l’ère contemporaine, en passant par les empires grec, romain, byzantin et islamique ».

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Publié le 14 novembre 2021 sur le blog de Rima Najjar
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine
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Lisez également : Le mouvement alternatif de la voie révolutionnaire palestinienne est fondé, rejoignez-le !

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