Afin de plaire à Israël, l’UE punit les cancéreux palestiniens

Dans le cadre d’une campagne visant à apaiser le lobby israélien à Bruxelles, l’Union européenne va encore faire souffrir davantage les cancéreux palestiniens.

Elle va le faire en retenant quelque 320 millions de USD d’un financement qui avait déjà été prévu afin de soutenir les Palestiniens vivant sous l’occupation militaire israélienne.

La présidente du Parlement européen Roberta Metsola, à gauche, avec le Premier ministre israélien Naftali Bennett. Lors de sa visite en Israël cette semaine, Madame Metsola a insisté sur la nécessité de « renforcer plus encore le partenariat entre l’UE et Israël ». (Photo : via Twitter)

Ali Abunimah, 27 mai 2022

Le paiement a été retardé depuis l’an dernier

« du fait que l’Union européenne continue à conditionner la libération de l’argent à des changements spécifiques dans les manuels scolaires palestiniens »,

a déclaré le Conseil norvégien des réfugiés mardi dernier.

La suspension de l’aide – qui rappelle les coupes sombres imposées par le président américain Donald Trump après son entrée en fonction en 2017 –

« handicape les secteurs critiques et les services, dont les soins de santé à Jérusalem-Est, avec des conséquences sévères pour les patients qui ont besoin de traitements dans les hôpitaux »,

a ajouté le Conseil.

« Ces restrictions punissent les patients en phase terminale qui ne peuvent disposer de médicaments vitaux et elles forcent les enfants à souffrir de la faim quand les parents n’ont pas les moyens d’acheter à manger »,

a déclaré Jan Egeland, secrétaire général du Conseil.

« Les Palestiniens paient le prix le plus cruel pour des décisions politiques qui sont prises à Bruxelles. »

Par conséquent, au moins 500 patients aux diagnostics récents de cancéreux n’ont pas eu la possibilité d’accéder à des traitements vitaux à l’hôpital Augusta Victoria de Jérusalem-Est occupée. D’autres subissent de graves retards dans l’application de leurs traitements on ne peut plus importants.

Des mensonges à propos des manuels scolaires

Ces décisions politiques résultent en grande partie d’une campagne menée par Olivér Várhelyi, un important responsable de la Commission européenne, le corps exécutif de l’UE.

Várhelyi a fait la promotion des mensonges du lobby pro-israélien affirmant que les manuels scolaires palestiniens contiennent des passages antisémites et « glorifient le terrorisme ».

Ces mensonges à propos des manuels palestiniens font partie d’une très longue campagne de désinformation menée par Israël et ses groupes de pression.

La campagne vise à promouvoir l’allégation selon laquelle les Palestiniens sont hostiles à Israël non parce que ce dernier viole brutalement leurs droits fondamentaux depuis des décennies, mais parce que, dans leurs classes, on leur lave le cerveau afin de haïr Israël et les juifs.

Ces fausses allégations sont également un outil servant à exercer des pressions constantes sur l’Autorité palestinienne afin qu’elle collabore plus encore avec Israël.

Bien que cette campagne ait démarré aux États-Unis voici plus de vingt ans, elle a été reprise plus récemment par l’extrême droite européenne favorable à Israël.

Il convient de remarquer que Várhelyi a été désigné à son poste par Viktor Orbán, Premier ministre de sa Hongrie natale.

Orbán a fait circuler des slogans antisémites au cours de campagnes électorales et il a accordé le statut de héros à un collaborateur nazi.

Pourtant, comme l’a fait remarquer David Cronin, journaliste de The Electronic Intifada, Várhelyi n’a toujours pas dénoncé ces manifestations d’un authentique sectarisme antijuif.

Malgré le caractère fallacieux des allégations de Várhelyi, l’homme parvient à atteindre ce qui constitue peut-être l’un de ses buts non déclarés : faire souffrir, voire mourir les Palestiniens les plus vulnérables.

Le feu vert de l’UE à davantage encore d’abus israéliens

Au moment où Israël continue d’attaquer et de molester les Palestiniens, les élites de l’Union européenne signalent publiquement leur plein soutien à Israël.

Plus tôt cette semaine, Roberta Metsola, la présidente du Parlement européen, a effectué un périple de haut profil en Israël, dont elle a rencontré le président, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères.

Madame Metsola n’a pas eu un mot de critique à propos du rôle brutal d’Israël vis-à-vis de millions de Palestiniens, qualifié d’apartheid par nombre d’organisations palestiniennes, israéliennes et internationales des droits de l’homme. L’apartheid est l’un des crimes les plus haïssables contre l’humanité repris dans le Statut de Rome, à partir duquel a été fondée la Cour pénale internationale.

En lieu et place, Madame Metsola s’est adressée au Parlement israélien, l’encensant en tant que « maison de la démocratie ».

Ignorant l’escalade des crimes israéliens contre le peuple palestinien, y compris l’assassinat récent – suivi d’une opération de camouflage – de la journaliste d’Al Jazeera Shireen Abu Akley, Madame Metsola a mis l’accent sur « la nécessité de renforcer plus encore le partenariat entre l’UE et Israël ».

La seule reconnaissance publique par Roberta Metsola de l’existence des Palestiniens a consisté en une visite superficielle de la ville de Ramallah occupée par Israël afin d’y rencontrer le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Le long soutien dont Abbas bénéficie de la part de l’UE est directement lié à son empressement à collaborer avec Israël pour réprimer la résistance palestinienne. C’est ce qu’on appelle par euphémisme la « coordination sécuritaire ».

 

Israël ferme ses portes aux membres du Parlement européen

Alors que la flatterie à l’égard d’Israël et la complicité avec ses crimes constituent la norme aux yeux des dirigeants de l’Union européenne, la visite de Roberta Metsola a même été plus abjecte encore que ce que l’on nous sert d’habitude. Elle s’est poursuivie même après qu’Israël a refusé l’entrée à une délégation dirigée par Manuel Pineda, l’un de ses collègues du Parlement européen.

La mission constituait partiellement une réponse à l’assassinat de la journaliste d’Al Jazeera, Shireen Abu Akleh.

Pineda est le président de la délégation parlementaire des relations UE-Palestine et il joue donc un rôle essentiel dans le contrôle du financement de l’Union européenne et des actions des responsables du bloc sur le terrain.

Madame Metsola n’a pas témoigné la moindre solidarité avec ses collègues, pas plus qu’elle n’a demandé à Israël de respecter le Parlement européen en annulant sa visite. Au lieu de cela, elle a publié un tweet exprimant son « regret » de l’exclusion de Pineda et prétendant qu’elle allait « soulever la question directement avec les autorités concernées ».

Israël va presque certainement percevoir ce langage édulcoré, suivi des louanges copieuses et inconditionnelles envers l’État d’apartheid, comme une reconnaissance et même comme un feu vert pour continuer d’exclure toute personne qu’il considère comme insuffisamment obséquieux.

Ce n’est vraisemblablement pas un hasard si, actuellement, Pineda est la cible d’une campagne d’assassinat de personne par le lobby pro-israélien.

Mercredi, le Centre Simon Wiesenthal a publié une « lettre ouverte » à Ursula von der Leyen, la présidente non élue de la Commission européenne, lui demandant que Pineda, pourtant élu populairement, « soit expulsé du Parlement européen » sur base qu’il est un « porte-parole des terroristes ».

La longue liste de doléances du groupe de pression pro-israélien contre Pineda inclut le fait qu’en 2011, il a rallié une flottille pour Gaza visant à rompre le blocus brutal imposé par Israël au territoire ainsi que le fait qu’il est associé à des membres de groupements politiques et organisations de résistance de Palestine arbitrairement désignés par Israël et ses alliés européens comme des « terroristes ».

L’organisation antipalestinienne ressasse même des calomnies sans fondement disant que le parti de gauche de Pineda, Podemos – membre de la coalition gouvernementale en Espagne – est « probablement financé par l’Iran ».

Ces allégations sont apparues en 2016, dans le cadre de ce qu’un électeur de Podemos a qualifié de « campagne honteuse » menée par le gouvernement espagnol de l’époque, qui était très à droite.

Pourtant, ce sont exactement le genre de calomnies et d’insinuations qu’Israël et ses groupes de pression utilisent régulièrement contre tous ceux qui osent le critiquer ou se ranger du côté des Palestiniens.

Mercredi, les principales organisations palestiniennes en faveur des droits humains ont adressé une lettre ouverte à la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola.

Elles y dénonçaient sa décision de se rendre en visite en Israël même après que les autorités avaient empêché l’entrée de la délégation dirigée par Pineda – qu’elles étaient censées rencontrer.

Elles y condamnaient également sa proposition de liens plus forts encore avec Israël, alors qu’elle s’abstenait même de mentionner l’assassinat de Shireen Abu Akleh, de même que l’escalade dans les expulsions par Israël des villageois palestiniens de la zone de Masafer Yatta, en Cisjordanie.

Les organisations ont dit à Madame Metsola :

« Nous n’avez pas assumé vos responsabilités vis-à-vis des lois internationales et vous vous rendez complice de la domination institutionnalisée et de l’oppression systématique du peuple palestinien. »

Certaines des organisations qui ont écrit à Madame Metsola font partie des six organisations désignées sans fondement par Israël comme « terroristes » l’an dernier, dans un effort de contrecarrer et discréditer leur travail dans le recensement des crimes israéliens.

L’UE, qui a financé plusieurs de ces organisations, a permis à Israël de s’en tirer, sur le plan des calomnies. Aujourd’hui, l’UE permet à Israël de faire la même chose avec ses représentants élus.

Bruxelles mettra tout en œuvre pour servir et apaiser Israël et son lobby, même si cela signifie d’infliger délibérément et sciemment des souffrances additionnelles aux cancéreux palestiniens.

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Ali Abunimah, cofondateur et directeur exécutif de The Electronic Intifada, est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine, paru chez Haymarket Books.

Il a aussi écrit : One Country : A Bold Proposal to end the Israeli-Palestinian Impa

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Publié le 27 mai 2022 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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Lisez également : Le député européen Manu Pineda interdit de se rendre en Palestine occupée : solidarité !

Manu Pineda, recevant Khaled Barakat, écrivain palestinien et Charlotte Kates de Samidoun au parlement européen (photo Samidoun)

Manu Pineda, recevant Khaled Barakat, écrivain palestinien et Charlotte Kates de Samidoun au parlement européen (photo Samidoun)

 

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