L’opération Break the Wave se poursuit et Israël tue deux jeunes, dont un de 16 ans
L’opération Break the Wave (Briser la vague) se poursuit afin de s’emparer des vies des combattants de la résistance. Désormais, la campagne des exécutions extrajudiciaires, qui est partie de Naplouse, s’est étendue à Jénine.
Mariam Barghouti, 21 octobre 2022
Ce jeudi 20 octobre, les forces israéliennes ont effectué un raid dans la ville de Jénine (NE de la Cisjordanie), tuant Salah al-Buraiki, 19 ans, et arrêtant Bara’a Alawneh lors d’une incursion dans le camp de réfugiés de Jénine. Alawneh est le cousin d’Ahmad Alawneh, le combattant de 26 ans tué par l’armée israélienne le 28 septembre, lors d’un précédent raid dans le camp.
La mort d’al-Buraiki porte le nombre de Palestiniens tués ces dix derniers mois à 175 environ. Un autre adolescent palestinien a succombé à ses blessures lors du raid et d’autres ont été blessés par balles.
Le même jour de la mort d’Alawneh, Mohammed Fadi Naouri, 16 ans, a été blessé d’une balle réelle dans l’abdomen lors de confrontations au check-point militaire de la colonie illégale de Beit El, près de Ramallah. Naouri, étudiant de 11e année, succombait à ses blessures jeudi matin.
Break the Wave cible la rébellion palestinienne
Selon Israël, Buraiki et Alawneh faisaient partie du Djihad islamique, la faction politique ciblée par l’offensive militaire d’Israël à Gaza au mois d’août et baptisée opération Breaking Dawn (Rupture de l’aube). L’attaque, qui avait duré deux semaines, avait tué 49 Palestiniens rien à Gaza.
Toutefois, dans le cadre d’une campagne à grande échelle baptisée opération Break the Wave (Briser la vague), Israël ne vise pas seulement des membres de certaines factions, mais aussi la moindre apparence d’opposition active à sa colonisation de la Palestine. En intensifiant son recours aux munitions réelles, Israël a peaufiné sa politique du « tirer pour tuer » l’an dernier. Selon des données recueillies par le Bureau de coordination des affaires humanitaires, la plupart des blessures par munitions réelles cette année ont été enregistrées à Naplouse, ensuite à Jénine, puis à Ramallah.
Cela suggère que, par le biais de Break the Wave, Israël cible toute personne qui se trouve sur le chemin de son expansion territoriale et politique, et même des journalistes comme Shireen Abu Akleh, tuée d’une balle dans le cou le 11 mai dernier à Jénine. Sa mort a été suivie d’une pratique habituelle des soldats israéliens consistant à perturber grandement les cortèges funéraires des Palestiniens. Dans le cas présent, les personnes présentes aux funérailles de Shireen Abu Akleh ont été tabassées et son cercueil a même été malmené.
La mort d’al-Buraiki ce jeudi a également eu lieu en même temps que la Commission d’enquête des Nations unies découvrait que l’occupation israélienne des Palestiniens était illégale, selon les lois internationales. Cela signifie que les combattants de la résistance palestinienne qui sont ciblés pratiquent leur droit, inscrit dans les lois internationales, de résister à une occupation militaire illégale. Donc, du fait qu’ils participent à cette forme légitime de résistance, leur assassinat constitue en réalité une exécution extrajudiciaire préméditée.
Lors du cortège funéraire d’al-Buraiki vendredi, les Palestiniens ont également scandé des slogans et appelé à une intervention internationale immédiate afin de réclamer des comptes à Israël. Pourtant, au beau milieu de cette violence destine à dissuader les Palestiniens d’entrer en confrontation, la résistance semble uniquement gagner en intensité. Cela à la lumière d’un climat d’hésitation internationale, de même que de complicité dans la perpétuation des abus et violences contre les Palestiniens.
La collusion entre les colons et l’armée dans les attaques contre les Palestiniens
Alors que l’armée israélienne continue de menacer la résistance palestinienne d’assassinats, les invasions de colons et les opérations militaires s’intensifient contre les civils dans les villes et les villages – une pratique qui a longtemps précédé l’apparition des groupes armés organisés à Jénine et à Naplouse cette année.
Pendant qu’Israël cible la résistance en Cisjordanie, Jérusalem est confrontée à une répression brutale. Près de la moitié du nombre total d’arrestations cette année par les forces israéliennes concernaient des jeunes et des résidents de Jérusalem, affirme la Société des prisonniers palestiniens.
Le raid sur Jénine a eu lieu quelques jours après que les colons israéliens ont intensifié leur attaque contre le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem – la ville qui, l’an dernier, a déclenché le Soulèvement de l’Unité. Le lendemain de la mort d’al-Buraiki, le vendredi 21 octobre, des colons israéliens ont envahi le quartier de Sheikh Jarrah et ont attaqué des Palestiniens, déchirant un drapeau palestinien dans la foulée. Le député kahaniste d’extrême droite, Itamar Ben Gvir conduisait l’intrusion dans le quartier, dégainant son arme de poing et ordonnant :
« S’ils jettent des pierres, abattez-les ! »
En outre, on a assisté à des attaques de colons israéliens (protégés par l’armée) contre les fermiers et les activistes engagés dans la cueillette des olives, puisque c’est début de la récolte de ces dernières, en Palestine.
La résistance s’obstine
Même si les conclusions de la Commission d’enquête de l’ONU sont l’écho d’enquêtes et de conclusions similaires émanant d’organisations indépendantes comme Human Rights Watch et Amnesty International et, en dépit de la confirmation par des organisations et institutions internationales de ce que les Palestiniens répètent depuis des décennies à propos de l’occupation israélienne, il n’y a aucune exigence de responsabilisation nationale pour mettre un terme à ces abus. Pourtant, malgré le manque de soutien international et le nombre croissant de Palestiniens tués par les colons et les militaires israéliens, on assiste à un soulèvement ininterrompu qui persiste en Palestine afin d’affronter l’occupation et d’y mettre fin.
Vendredi après-midi, lors des funérailles de Naouri, près de Ramallah, la mère de l’adolescent de 16 ans rappelle certains des derniers mots de son fils au moment où elle l’a couché pour qu’il se repose.
« Il m’a parlé, le jour où il a été tué, et il m’a dit qu’il allait au check-point », a expliqué sa mère aux journalistes. Toujours en pleurant, elle a continué : « J’ai dit non, mais il a insisté et m’a dit : ‘Si nous ne libérons pas la Palestine, qui donc va le faire ?’ »
*****
Publié le 21 octobre 2022 sur Mondoweiss
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine