Israël transfère des douzaines de prisonniers palestiniens à la prison du désert

Depuis l’évasion de la prison de Gilboa, l’occupation essaie de briser les structures organisationnelles des prisonniers via des transferts massifs entre prisons.

La semaine dernière, des prisonniers ont annoncé une grève de la faim massive pour le premier jour du Ramadan

La semaine dernière, des prisonniers ont annoncé une grève de la faim massive pour le premier jour du Ramadan

 

Qassam Muaddi (Cisjordanie), 9 janvier 2023

On rapporte que les autorités carcérales israéliennes ont entamé le transfert de tous les prisonniers palestiniens de la prison de haute sécurité de Hadarim, dans le nord du pays, vers de nouveaux bâtiments aménagés à la prison de Nafha, dans le désert du Néguev, dans le sud.

« Depuis l’évasion de la prison de Gilboa, l’occupation essaie de briser les structures organisationnelles des prisonniers via des transferts massifs entre prisons »,

explique Ayah Shreiteh, du Club des prisonniers palestiniens.  

Le Club nous a confirmé que 40 des 80 prisonniers palestiniens condamnés à de lourdes peines à Hadarim avaient été transférés dimanche. Quant aux 40 détenus restants, il est prévu de les transférer lundi à la prison de Nafha, dans le désert, où ils seront placés en isolement.

Cette démarche a lieu moins d’une semaine après que la direction des prisonniers palestiniens a annoncé une future action de protestation contre les restrictions imposées à la vie en prison par les autorités carcérales israéliennes.

 

Mercredi dernier, les prisonniers palestiniens ont annoncé qu’ils intensifieraient leur désobéissance civile contre les services carcéraux israéliens et qu’il se pourrait que cela débouche sur une grève de la faim massive en mars.

L’annonce figurait dans un communiqué de presse du « Mouvement du Comité d’extrême urgence des prisonniers », le corps qui dirige les prisonniers palestiniens dans les geôles israéliennes et qui en regroupe toutes les factions. La déclaration a été rendue publique par le Club des prisonniers palestiniens.

« Compte tenu de l’escalade du terrorisme de l’État occupant et de la montée des kahanistes [l’extrême droite] au pouvoir dans ce même État occupant, et au vu de leurs menaces continuelles, nous affirmons que nous ne permettrons pas que l’on brise notre détermination »,

disait la déclaration.

« Les prisonniers de toutes les prisons affronteront les mesures fascistes du gouvernement sioniste en s’unissant sous le drapeau palestinien et sous un commandement unifié »,

poursuivait la déclaration.

« À toute agression contre nos droits, il sera répondu par la désobéissance et par un soulèvement à grande échelle dans toutes les prisons, lequel culminera par une grève de la faim de la liberté qui ne cessera qu’avec notre libération en vie ou avec notre martyre. »

Mercredi, l’avocat franco-palestinien des droits de l’homme, Salah Hamouri, déporté vers la France par Israël en décembre dernier après avoir été emprisonné pendant neuf mois sans accusation, a confirmé que les prisonniers palestiniens allaient sans doute déclarer une grève de la faim en mars.

Selon Salah Hamouri, qui a passé cinq mois à Hadarim même, les prisonniers palestiniens se sentent menacés,

« au vu du nouveau gouvernement israélien, surtout avec l’extrémiste Itamar Ben-Gvir qui vient d’être désigné comme ministre de la sécurité et qui a dans ses attributions les conditions carcérales et les prisonniers ».

Le dirigeant du parti israélien d’extrême droite « Force juive » est bien connu pour ses positions pures et dures contre les prisonniers palestiniens et il a déclaré qu’ils « durcirait » encore leurs conditions de vie.

La semaine dernier, Ben-Gvir a inauguré ses nouvelles fonctions de ministre de la sécurité en visitant la prison de Nafha, dans le désert. Il a inspecté les nouveaux bâtiments où l’on a commencé lundi à transférer les prisonniers palestiniens de Hadarim.

« Les prisonniers ont adressé une mise en garde aux autorités carcérales israéliennes en disant qu’il y aurait un énorme affrontement en mars, et ce, dès le premier jour du (mois de jeûne musulman du) Ramadan, si la moindre mesure répressive supplémentaire devait leur être appliquée »,

a déclaré Hamouri.

« Les prisonniers palestiniens jeûneront à leur manière bien à eux. »

 

Les prisonniers palestiniens avaient annoncé une grève de la faim massive l’an dernier en mars, afin de protester contre les restrictions appliquées par les autorités israéliennes suite à l’évasion de la prison de Gilboa en septembre 2021. La grève avait été suspendue un jour avant son lancement, après que les autorités israéliennes avaient accepté de suspendre toutes les restrictions.

La grève a été annoncée une nouvelle fois en septembre, un an après l’évasion de la prison de Gilboa, après que les prisonniers que les autorités israéliennes avaient rompu leur promesse précédente. La grève avait été annulée une fois de plus après un renouvellement de l’accord.

« Les prisonniers palestiniens ont gagné au fil des années le droit de s’organiser à l’intérieur même des prisons de l’occupation »,

nous a expliqué Ayah Shreiteh, porte-parole du Club des prisonniers palestiniens.

« Depuis l’évasion de la prison de Gilboa, l’occupation a tenté de briser les structures organisationnelles des prisonniers par le biais de transferts massifs de prisonniers entre les prisons, ainsi qu’en isolant nombre des dirigeants de haut rang des prisonniers, et c’est la raison pour laquelle les transferts de prisonniers constituent une question si délicate »,

a fait remarquer Ayah Shreiteh.

« Ces dernières semaines, la sécurité dans les prisons israéliennes a accru ses raids de perquisition dans les cellules de plusieurs prisons, raids qui, accompagnés des menaces de Ben-Gvir et de son accession au pouvoir, ont déclenché les sonnettes d’alarme des prisonniers »,

a-t-elle ajouté.

« Cela va très probablement s’intensifier au cours des semaines à venir et nous pourrions très bien faire route vers une confrontation à grande échelle entre les prisonniers et les autorités carcérales de l’occupation »,

a-t-elle encore dit.

Plus d’un million de Palestiniens ont été en détention en Israël depuis 1967. Actuellement, selon les organisations des droits humains, quelque 4 700 Palestiniens sont détenus dans les prisons israéliennes, dont 34 femmes, 150 enfants et 835 détenus administratifs, c’est-à-dire sans accusation ni procès.

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Publié le 9 janvier 2023 sur The New Arab
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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