Un sniper israélien tue « tout ce qui bouge » dans un hôpital de Gaza

Les forces israéliennes continuent de bombarder, assiéger et détruire les hôpitaux de Gaza, menant ainsi ce qu’un responsable de la santé des Nations unies a appelé une « guerre incessante » contre le système des soins de santé de l’enclave côtière.

Le système des soins de santé de Gaza connaît un effondrement cataclysmique.

Le système des soins de santé de Gaza connaît un effondrement cataclysmique. (Photo : Omar Ashtawy / APA images)

 

Nora Barrows-Friedman, 14 décembre 2023

 Les médecins préviennent que, s’il n’est pas mis immédiatement un terme aux bombardements israéliens, et s’il n’y a pas d’abris décents, de mesures d’hygiène, de médicaments, de vivres et d’eau, le système des soins de santé de Gaza va connaître un effondrement cataclysmique.

Mercredi, le ministère palestinien de la santé à Gaza a également rapporté que tous les vaccins pour enfants étaient épuisés, ce qui aura des

« répercussions catastrophiques pour la santé des enfants et accélérera la propagation de maladies, particulièrement chez les personnes déplacées des zones de refuge surpeuplées ».

Au cours de la semaine écoulée, les soldats israéliens ont attaqué à diverses reprises deux hôpitaux du nord de la bande de Gaza tout en bombardant les zones entourant deux autres hôpitaux de Khan Younis, dans le sud.

Seulement 11 des 36 hôpitaux de Gaza – dont le seul qui reste en zone nord – sont « partiellement opérationnels », estiment les Nations unies, et ils sont contraints de limiter leurs services. Les taux d’occupation des services d’hospitalisation sont à plus de 200 pour 100 de leurs capacités, alors que les unités de soins intensifs parlent d’un taux stupéfiant de 250 pour 100 !

« Nous affirmons que le crime perpétré par Israël contre les hôpitaux de la partie nord de Gaza cherche à mettre un terme à la présence des soins de santé et à forcer les habitants de la région à s’en aller »,

a déclaré mercredi Ashraf al-Qedra, porte-parole du ministère palestinien de la santé à Gaza.

Et d’ajouter que la situation de la santé dans les hôpitaux du sud de Gaza, où les forces israéliennes ont ordonné aux Palestiniens de se réfugier,

« est intenable, et nous avons perdu notre capacité d’absorption et de traitement ».

 

 

Mardi, les forces israéliennes ont pris d’assaut l’hôpital Kamal Adwan dans le nord de Gaza et arrêté son directeur et son personnel médical.

Les forces israéliennes ont – comme à leur habitude – arrêté et emprisonné des médecins et des travailleurs médicaux à Gaza et, depuis le 7 octobre, elles ont tué au moins 300 travailleurs des services de santé.

Le ministère palestinien de la santé de Gaza rapportait mercredi que les forces israéliennes avaient interrogé et torturé le personnel médical de l’hôpital Kamal Adwan.

« Après qu’un certain nombre de détenus ont été relâchés et forcés de retourner à l’hôpital, on leur a tiré dessus et cinq membres du personnel médical et des blessés déplacés ont été blessés »,

a déclaré le ministère.

Cinq médecins et le personnel féminin ont été relâchés de la garde à vue par les Israéliens mercredi, a rapporté le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires.

Mais le directeur de l’hôpital et quelque 70 autres membres du personnel médical « restent en détention dans un lieu inconnu à l’extérieur de l’hôpital »,

a déclaré l’ONU.

« Les forces d’occupation assiègent toujours l’hôpital, tirant des balles et des obus à l’intérieur, empêchant ainsi tout mouvement et privant d’eau, de nourriture et d’électricité les personnes qui sont à l’intérieur »,

a expliqué le ministre de la santé.

Les médecins ont déclaré qu’ils craignaient pour la vie de douze enfants de l’unité des soins intensifs de l’hôpital,

« du fait qu’ils ont été laissés sans lait et sans les équipements indispensables pour les maintenir en vie ».

 

L’hôpital al-Awda en état de siège

Entre-temps, les forces israéliennes « durcissent le siège et le ciblage » de l’hôpital al-Awda dans le nord de la bande de Gaza, déclare le ministère de la santé.

« Nous craignons que [les forces israéliennes] ne l’envahissent, après l’hôpital Kamal Adwan. »

 

Un travailleur de l’hôpital al-Awda, dans le nord de Gaza, a rapporté le 8 décembre que le personnel avait déjà

« subi un siège pendant trois jours, avec un sniper israélien qui tuait toute personne qu’il voyait remuer ».

Ce matin, a déclaré la source, un sniper « a tué une collègue infirmière ».

Une femme enceinte et sa belle-sœur ont été abattues par un sniper à leur arrivée à l’hôpital pour des services de maternité, a déclaré le travailleur. La belle-sœur a été tuée.

L’homme a expliqué à The Electronic Intifada mercredi que le siège était toujours en cours.

Les forces israéliennes ont bombardé les réservoirs d’eau sur le toit, rendant la seule eau disponible de l’hôpital impropre – et peu sûre – à la consommation, a expliqué l’homme.

D’autres fournitures nécessaires, comme le carburant, sont pour ainsi dire épuisées.

« Nous n’avons plus de carburant que pour quelques jours, [afin d’alimenter] un petit générateur lié aux fournitures médicales »,

a encore expliqué le travailleur.

« Cela ne suffit pas, et notre réserve [de carburant] se trouve dans un autre bâtiment – nous ne pouvons pas nous y rendre, à cause du sniper. »

Le travailleur de l’hôpital a déclaré à The Electronic Intifada qu’il y avait 250 personnes, membres du personnel, patients et proches de ces derniers (dont 45 enfants) à l’intérieur de l’hôpital assiégé.

Les chirurgiens sont forcés d’amputer les membres en raison des infections et du manque d’antibiotiques, a ajouté la source.

Le travailleur a montré au correspondant de The Electronic Intifada une vidéo d’une jeune fille à qui on avait amputé une jambe.

« En situation normale, nous aurions pu la sauver mais, en état de siège, voilà ce qui s’est produit »,

ont-ils dit.

« Son corps est OK, après l’amputation. Mais, sur le plan psychologique, je ne sais pas… »

 

Réunis à nouveau

Le mois dernier, les forces israéliennes lançaient un raid contre l’hôpital al-Shifa à Gaza même (le plus grand complexe hospitalier de l’enclave), sous le prétexte fallacieux que les forces de la résistance palestinienne géraient un centre de commandement et de contrôle dans les sous-sols de l’hôpital.

Personnel, patients et personnes déplacées cherchant refuge à l’hôpital avaient reçu l’ordre de s’en aller à la pointe du fusil.

Des douzaines d’enfants prématurés dans l’unité des soins intensifs néonataux d’al-Shifa avaient été évacués et finalement transférés en Égypte pour leurs soins.

 

Deux mamans au moins, qui avaient été séparées de leurs enfants en bas âge, ont pu retrouver ces derniers récemment.

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Publié le 14 décembre 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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