Une guerre s’achève, une autre commence
La vie à Gaza après la guerre n’est pas facile. Mais il y a une croyance profonde en ce que, un jour, toute cette douleur ne sera plus qu’un souvenir lointain.
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21 janvier 2025. Une Palestinienne est assise au milieu des ruines de sa maison à Rafah, dans le sud de Gaza. (Photo : Yousef Zaanoun / ActiveStills)
Saeda Hamdona, 6 février 2025
C’est une vie pleine de défis quotidiens, comme si Israël n’avait jamais déposé les armes, mais les avait remplacées par des combats qui s’insinuent dans tous les aspects de l’existence.
L’offensive totale d’Israël contre Gaza s’est terminée, du moins pour l’instant. Les bruits des avions et les sifflements des obus ont cessé, de même que les moments de terreur à l’état pur et l’obligation de se dissimuler contre les attaques israéliennes.
Désormais les gens de Gaza sont confrontés à une nouvelle lutte – une lutte en vue de chercher une vie valant la peine d’être vécue parmi les décombres des maisons, les rues défigurées et les rêves enterrés sous les débris. C’est une guerre de patience et de persévérance en l’absence du moindre plan de reconstruction bien défini. Il n’y a pas de solutions rapides, il n’y a que des personnes qui luttent pour survivre et qui refusent de se résigner à la ruine.
Des défis énormes
Imaginez que vous tentez de quitter votre maison, uniquement pour découvrir que la route devant vous n’est que décombres. Les rues qui naguère encore bourdonnaient d’activité et de vie sont désormais un labyrinthe de ruines et de cratères. Les rues ne sont plus praticables ; même les conducteurs d’ambulance et de l’aide humanitaire luttent pour accéder à des quartiers dévastés.
Les tâches quotidiennes les plus simples, comme se rendre à un magasin ou chez un proche, sont devenues d’énormes défis. Les décombres ne sont pas que des pierres éparpillées ; ce sont des témoignages silencieux d’une guerre qui a laissé des marques profondes à chaque carrefour et dans chaque rue. Refaire ces routes pourrait prendre des années, peut-être même des générations.
L’absence d’électricité est une autre cause inévitable de souffrance. Même avant la guerre, l’électricité n’était disponible que quelques heures par jour. Actuellement, elle est pour ainsi dire inexistante. Les quartiers subsistent dans l’obscurité. Les générateurs, qui constituaient naguère l’habituel dernier recours, sont devenus un luxe, en raison des pénuries de carburant.
La nuit à Gaza est un combat avec les ténèbres. Les enfants étudient à la lueur d’une bougie pendant que les mères luttent pour gérer les affaires du ménage.
Le manque d’eau, un élément essentiel de la vie, reste une crise quotidienne à Gaza. Quand Israël a coupé la distribution d’eau et détruit les sites de désalinisation et de distribution, il a laissé d’innombrables familles sans le moindre accès à l’eau potable.
Certaines personnes dépendent de l’achat d’eau à un prix exorbitant en provenance de réservoirs mobiles ; d’autres recourent à l’eau de puits, en sachant qu’elle peut être contaminée et impropre à la consommation. Des enfants portent de lourds conteneurs d’eau sur de longues distances. La soif n’est plus un problème éphémère mais un mal constant qui affecte tout le monde.
Il est possible que le spectacle le plus pénible à Gaza après le cessez-le-feu soit celui des maisons détruites. Les quartiers résidentiels ont été transformés en amas de décombres, faisant de leurs anciens habitants des sans-abri.
Refuges temporaires et écoles sont devenus des foyers pour les familles qui ont tout perdu, y compris leur intimité, leur confort et leur stabilité.
La détermination
Malgré toute cette destruction et cette douleur, Gaza continue de résister. Chaque jour est une bataille pour trouver de l’eau, pour avoir accès à l’électricité, pour dégager les décombres – et une bataille plus grande encore pour se reconstruire et affirmer sa dignité humaine.
La vie à Gaza après la guerre n’est pas facile. Mais il y a une croyance profonde en ce que, un jour, toute cette douleur ne sera plus qu’un souvenir lointain. Avec détermination, nous allons reconstruire tout ce qui a été détruit – non seulement dans les rues, mais aussi dans nos cœurs.
La route qui nous attend est longue et difficile. Mais cette terre, qui a payé un lourd tribut à maintes reprises, retournera à la vie une fois de plus. Nous, les gens de Gaza, ne connaissons pas le sens du mot impossible, pas plus que nous n’acceptons la destruction par Israël comme un point final.
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Saeda Hamdona est traductrice et elle enseigne l’anglais à Gaza.
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Publié le 6 février 2025 sur The Electronic Intifada.
Traduction: Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine.