Une urgentiste révèle ce qu’elle a vu à Gaza

The Electronic Intifada a invité l’urgentiste Dre Mimi Syed, à participer à un podcast de The Electronic Intifada afin qu’elle parle de la situation actuelle des soins de santé à Gaza.

 


Nora Barrows-Friedman
, 3 mars 2025

En janvier, l’organisation humanitaire Save the Children (Sauvez les enfants) a publié un rapport sur les effets de l’utilisation par Israël d’armes explosives sur des enfants.

L’organisation estime qu’en 2024, une moyenne mensuelle de 475 enfants – soit 15 enfants par jour – sont restés avec des handicaps potentiellement définitifs, y compris des membres amputés ou sévèrement mutilés et de graves déficiences auditives.

Ces blessures, ajoute Save the Children, ont empiré en raison de la destruction du système de santé et des centres de soins de santé à Gaza, ainsi que du flux très restreint et de la faible disponibilité des médicaments, ce qui a rendu les traitements et les soins thérapeutiques ou de revalidation quasiment impossibles à l’intérieur de l’enclave.

Nous avons réinvité la Dre Mimi Syed, une urgentiste qui vit et opère normalement aux EU, à participer au podcast de The Electronic Intifada (vidéo en bas de l’article) afin qu’elle nous parle de la situation actuelle des soins de santé à Gaza et de la façon dont elle et ses confrères interpellent à la fois les représentants politiques américains et les Nations unies afin qu’ils se penchent sérieusement sur la catastrophe qui frappe la santé à Gaza.

La Dre Mimi Syed a également raconté comment elle avait traité deux – parmi bien d’autres – enfants alors qu’elle travaillait à Gaza, dont Mira, une fillette de 4 ans touchée à la tête par un drone sniper israélien. Mira a survécu, mais elle va devoir recevoir des soins spécialisés qui ne sont nullement disponibles à Gaza.

« Elle attend son évacuation médicale et, depuis le temps que nous nous en occupons, sa mère a en fait été touchée par une autre frappe aérienne [en janvier] et elle vient de subir l’amputation particulièrement traumatisante d’une jambe »

déclare Syed.

La mère de Mira est sa principale soignante.

« Ainsi donc, Mira doit être évacuée médicalement, mais la personne qui l’accompagne, et qui aurait dû être sa mère, n’est plus en état de le faire du fait qu’elle-même nécessite des soins médicaux en dehors de Gaza »,

explique Syed.

 

 

Cette vidéo sur Mira a été partagée par la Dre Syed dans les médias sociaux :

 

 

La Dre Syed a également traité Medo Halimi, 19 ans, tué en août 2024 lors d’une frappe de l’aviation israélienne. Halimi était largement suivi dans les médias sociaux où il partageait son expérience personnelle du génocide.

La Dre Syed montre à The Electronic Intifada les scanners du cerveau de Medo Halimi et dit qu’il a très vraisemblablement été abattu par un de ces drones snipers quadricoptères qu’Israël a l’habitude d’envoyer lors des frappes aériennes afin d’exécuter les personnes restées en vie après le bombardement initial.

« Malheureusement, Medo était l’une de ces personnes »,

dit Syed.

« Il a été amené ici, les infos ont dit de lui qu’il avait été blessé par un éclat d’obus mais, en fait, il présentait deux blessures à la tête, l’une d’un côté et la seconde de l’autre côté, comme une blessure de sortie de projectile. Ce devait donc être une balle, très probablement. »

Elle l’avait examiné, ajoute-t-elle, et s’était entretenue avec des témoins qui avaient assisté à la scène.

« Ils m’ont dit qu’il s’agissait d’un quadricoptère. »

La Dre Syed parle également du nouveau rapport d’une équipe internationale de médecins et d’avocats des droits humains qui documente « l’attaque à deux niveaux » contre les travailleurs des soins de santé à Gaza d’abord et au niveau mondial ensuite afin de réduire au silence les critiques à l’encontre du génocide commis par Israël à Gaza. Le rapport a été soumis aux Nations unies en janvier.

Mais la première préoccupation des thérapeutes de Gaza et de leurs collègues du monde entier concerne la reconstruction des infrastructures médicales et la nécessité de contraindre Israël à respecter ses obligations d’autoriser la livraison d’aide, de médicaments et de matériaux de construction qui avait été convenue selon les termes du cessez-le-feu.

« Nous devons être à même de pouvoir reconstruire tout ce qui a été détruit »,

explique la Dre Syed.

« Quand vous entrez à Gaza, vous découvrez que les routes ont été complètement détruites, de même que les lignes électriques, le système de l’eau, tout a été totalement anéanti. (…) Tout cela doit être reconstruit et ils doivent laisser passer les équipements nécessaires à cette reconstruction, ainsi que le personnel, les gens, le personnel qualifié pour ce faire – toutes ces personnes devraient pouvoir entrer à Gaza. »

Le refus par Israël d’autoriser l’entrée de ces essentiels, dit-elle,

« constitue un autre niveau d’inhumanité. Cela doit cesser. Cela doit absolument cesser ! »

 

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Production : Tamara Nassar.

Publié le 3 mars 2025 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

 

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