Israël bombarde un restaurant au moment où la famine fait rage à Gaza
Mercredi 7 mai, à Gaza même, les forces israéliennes ont bombardé un restaurant bondé, l’un des derniers endroits où les gens pouvaient encore prendre un repas, a rapporté le ministère palestinien de la santé à Gaza. Plus de 30 Palestiniens ont été tués.

Le 7 mai, plus de 30 Palestiniens ont été tués par des frappes de l’aviation israélienne contre l’un des rares restaurants encore opérationnels dans la ville de Gaza. (Photo : Omar Ashtawy / APA images)
Nora Barrows-Friedman, 9 mai 2025
Le texte qui suit est un condensé des informations communiquées lors du livestream du 8 mai. Vous pouvez voir l’émission au complet ici.
Cette semaine, Israël a perpétré une série de massacres dans la bande de Gaza, tuant des centaines de personnes lors d’attaques aériennes massives, également par drones, contre des immeubles résidentiels, des tentes-abris et des zones très peuplées.
Ces attaques au moment où le gouvernement israélien a annoncé qu’il allait grandement intensifier ses assauts contre Gaza.
Le suspect de crimes de guerre et Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a déclaré qu’il était « temps de lancer les derniers mouvements » ou, en d’autres termes, d’appliquer la solution finale aux Palestiniens, après deux mois de siège total, 18 mois d’un génocide implacable et 77 années d’opérations de nettoyage ethnique colonial en Palestine.
À la date du 6 mai, selon les Nations unies, plus de 428 000 personnes avaient été déplacées depuis la reprise par Israël de ses attaques à grande échelle, le 18 mars. Ces personnes n’ont aucun endroit sûr où aller.
Mercredi, à Gaza même, les forces israéliennes ont bombardé un restaurant bondé, l’un des derniers endroits où les gens pouvaient encore prendre un repas, a rapporté le ministère palestinien de la santé à Gaza. Plus de 30 Palestiniens ont été tués.
Al Jazeera a rapporté que deux missiles avaient été tirés en même temps sur deux endroits distants de 100 mètres.
Le journaliste Hani Mahmoud a déclaré :
« Les tables et les chaises ont été complètement éparpillées et le sol est couvert de sang à la suite des hémorragies sévères [dues à l’attaque]. »
À proximité, a-t-il dit, des corps jonchaient le sol,
« trempés de sang et complètement déchiquetés ».
Toujours à Gaza, ce 7 mai, 13 personnes ont été tuées par une frappe de l’aviation israélienne sur le quartier d’al-Tuffah. Il y a eu trois tués à Jabaliya dans le nord, huit à Khan Younis dans le sud et trois, dont un enfant, à Deir al-Balah, dans la partie centrale de la bande de Gaza, après que les forces israéliennes ont attaqué des familles réfugiées dans des tentes.
Le nombre de victimes pour la seule journée de mercredi était au moins de 102, avec près de 200 blessés un peu partout à Gaza, d’après le bureau gouvernemental des médias de Gaza.
Les massacres de mercredi ont eu lieu le lendemain du ciblage par l’armée israélienne de l’école Abu Hamisa au camp de réfugiés d’al-Bureij, dans le centre de l’enclave, et qui a tué au moins 33 personnes en deux attaques presque consécutives.
Le bureau gouvernemental des médias de Gaza a déclaré qu’Israël continuait
« de cibler délibérément et systématiquement des abris et des centres de déplacement. Le nombre des centres bombardés est jusqu’à présent de 234, et ce, en violation flagrantes de toutes les lois internationales et humanitaires et dans une tentative on ne peut plus manifeste de causer le plus grand nombre possible de pertes en vies humaines ».
Ces massacres, a ajouté le bureau des médias,
« ont lieu en même temps que la destruction du système de santé par l’occupation israélienne, la destruction des hôpitaux et le refus de leurs services. Le personnel médical est soumis à une pression terrible, doit faire face à une pénurie sévère de fournitures médicales, à la fermeture des passages aux blessés et au blocage des importations de carburant, ce qui exacerbe la catastrophe humanitaire dans la bande de Gaza ».
Les Palestiniens à Jabaliya, dans le nord, ont utilisé leurs mains et de petits outils pour tenter de retrouver leurs êtres chers ensevelis sous les décombres après une attaque israélienne contre des immeubles résidentiels le 2 mai.
Le reporter Mahmoud Abusalama a déclaré que l’attaque avait détruit la totalité du quartier et que des les gens grattaient dans les décombres pour tenter d’en extraire les corps des tués et des blessés.
On a également fait état d’attaques contre la partie orientale de la ville de Gaza le 2 mai. L’une d’elles a tué neuf Palestiniens dans un immeuble résidentiel.
Le 3 mai, onze personnes ont été tuées, dont trois enfants en bas âge et un autre, lors d’une frappe israélienne sur un immeuble de Khan Younis.
Les forces israéliennes continuent d’attaquer les tentes qui abritent des familles déplacées.
Le 4 mai, le journaliste Ahmed al-Najjar rapportait depuis al-Mawasi, où les forces israéliennes avaient bombardé des familles palestiniennes réfugiées dans des tentes. Il a expliqué que 10 personnes, dont un enfant, sept femmes et deux personnes âgées, avaient été tuées.
Ce même jour, une frappe contre un immeuble résidentiel dans l’est de la ville de Gaza a tué 15 Palestiniens, d’après l’OCHA. On a fait état de tirs contre des personnes qui tentaient d’en secourir d’autres piégées sous les décombres de l’immeuble en question.
À Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le journaliste Hussein Khreis s’est entretenu avec une dame de 88 ans qui, en début de semaine, a été agressée et frappée d’un coup de poing au visage par des soldats israéliens.
La vieille dame en question, Hisen Alayan, dit qu’elle a été emmenée vers un site militaire israélien où elle a été interrogée par un soldat israélien. Elle a ensuite été transférée vers un hôpital pour y recevoir un traitement médical.
En début de semaine, Sulaiman Hejji, un photojournaliste, a réalisé des photos aériennes des ruines de Rafah, dans le sud.
Le crime d’affamement à Gaza est pleinement avéré et est perpétré au grand jour
Avec l’entrée dans son troisième mois de la fermeture totale par Israël de tous les passages, les Palestiniens de Gaza sont soumis à la famine dans des proportions catastrophiques, estime Euro-Med Human Rights Monitor.
L’organisation de défense des droits a fait savoir cette semaine qu’« une augmentation spectaculaire des décès adultes avaient été constatée parmi les habitants de la bande de Gaza, en même temps que des niveaux alarmants de mortalité infantile, au cours du très long siège total imposé par Israël depuis le début de sa campagne génocidaire ».
On fait état de dizaines de morts en raison de la malnutrition ou du manque de soins médicaux, a ajouté l’organisation.
« Le dernier est un bébé de 4 mois, Jenan Saleh al-Skafi, décédé de malnutrition sévère à l’hôpital Al-Rantisi dans l’ouest de la ville de Gaza – au beau milieu de ce qu’Euro-Med a qualifié de pire campagne d’affamement systématique de l’histoire moderne.
Lima Bastami, directrice du département juridique d’Euro-Med, a déclaré :
« Le crime d’affamement à Gaza est pleinement avéré et est perpétré au grand jour ; nul n’est besoin de commissions d’enquête ou de décisions judiciaires pour le prouver. »
Environ 60 000 enfants à Gaza sont mal nourris et nécessitent un traitement d’urgence ; et 16 000 femmes enceintes et allaitantes ont désespérément besoin de soins de santé, d’après le ministère de la Santé à Gaza.
Le Dr Ezzideen Shehab, un médecin et écrivain à Gaza, a parlé du sort des patients mal nourris et mourant de faim qu’il traite ; de nombreux d’entre eux sont de jeunes enfants, dont beaucoup en bas âge. Il déclare qu’il assiste également à une augmentation des malformations à la naissance.
Voici ce qu’il écrivait sur sa page X le 3 mai :
« Hier, à l’hôpital Al-Awda, dans le nord de Gaza, une fille est venue au monde et le monde l’a rejetée. Elle n’avait pas de cerveau. Non pas dans le sens poétique de l’innocence ou de la pureté, mais anatomiquement, littéralement : anencéphalie. Pas de cerveau, pas de vision du futur, pas de rêves, pas de souvenirs à engranger… »
Des journalistes tués
Les forces israéliennes ont tué deux journalistes cette semaine à Gaza. Un total de 214 journalistes et travailleurs des médias ont été tués depuis octobre 2023, d’après le bureau gouvernemental des médias à Gaza.
Mercredi 7 mai, Nour el-Din Matar Abdu, qui travaillait comme diffuseur et journaliste, a été tué par une frappe de missile dans l’est de la ville de Gaza.

Nour el-Din Matar Abdu
À peine quelques heures plus tard, les forces israéliennes tuaient Yahya Sobeih, un reporter travaillant pour plusieurs médias et dont nous avions montré, dans le livestream de la semaine dernière, la photo qu’il avait prise de deux filles en train de manger. Sobieh a été tué lors du massacre qui a eu lieu mercredi dans la ville de Gaza, quelques heures à peine après la naissance de sa fille.
Le dernier post de Sobieh sur Instagram parlait d’une mère qui essayait de nourrir sa famille.
Ce 3 mai, c’était la Journée mondiale de la liberté de la presse. Chaque année, dans le monde, les gouvernements et les patrons des médias se congratulent en célébrant la liberté de la presse et le travail héroïque des journalistes.
Le bureau gouvernemental des médias à Gaza a déclaré :
« Toutefois, Gaza et, en son cœur, ses journalistes héroïques, célèbrent cette journée dans un langage différent : le langage du sang, de la faim, des larmes et des cendres. »
« Alors que le monde entier célèbre la liberté de la presse, le sang des journalistes palestiniens coule dans les rues de Gaza, leurs bureaux et leurs voitures sont bombardés, les stylos et leurs caméras sont mis en pièces, leurs domiciles et leurs biens sont ciblés et ils sont parfois ensevelis avec leurs familles sous les décombres, tout simplement parce qu’ils ont décidé de rapporter la vérité », a ajouté le bureau des médias.
Depuis Gaza, le journaliste Ahmed al-Najjar a délivré ce message à l’adresse du monde entier :
« La presse à Gaza saigne et est prise en otage parce qu’elle couvre pour vous un génocide en exclusivité. »
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Publié le 9 mai 2025 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine