Entre la victoire de 2006 et aujourd’hui, le Hezbollah a-t-il été « affaibli et dissuadé » ?

Il y a exactement 19 ans (le 14 août 2006), les canons se taisaient, les tirs de roquettes cessaient et le vrombissement des avions de combat sionistes abandonnait le ciel du Liban après une guerre qui avait duré 33 jours. L’ennemi sioniste avait lancé une guerre contre « les chiites du Liban » mais la résistance, sous la direction du Hezbollah, avait tenu bon et pulvérisé le mythe de « l’invincible armée ». Nous connaissons tous la suite de l’histoire : L’ennemi sioniste admettait sa défaite et son échec dans son célèbre rapport Winograd et le Parti pouvait panser ses blessures et reconstruire ce que la guerre avait détruit.

 

 

Khaled Barakat, 15 août 2025

 

Aujourd’hui, la patience et les principes sont de nouveau mis à l’épreuve sous une réalité bien plus dure, avec l’intensification de l’offensive israélo-américano-saoudienne contre la résistance au Liban et dans la région. Tout ce qui a eu lieu le confirme : Le camp ennemi n’a pas cessé un seul instant de se préparer au combat, après juillet 2006, ainsi qu’à la vengeance et aux représailles.

Rappelons les faits. Le rapport de la Commission Winograd avait décrit la performance de l’armée et du gouvernement de l’entité sioniste comme « un échec retentissant dans le processus décisionnel et la gestion des opérations » et avait admis que la guerre contre le Liban « s’était terminée sans avoir atteint le moindre de ses objectifs stratégiques », dont le principal était « l’élimination ou le désarmement du Hezbollah ».

L’ancien Premier ministre de l’ennemi sioniste, Ehud Olmert, avait été confronté à un scandale politique majeur en raison de son « incapacité à empêcher les roquettes d’atteindre le plus profond de l’entité et ce, jusqu’au tout dernier jour de la guerre ». Quant aux commandants de l’armée d’occupation, ils avaient admis que la performance de la résistance les avait surpris, en termes de préparation, de surprises sur le champ de bataille et de discipline militaire, et ils avaient reconnu « n’avoir jamais dû affronter auparavant une organisation animée d’une telle résilience ».

Revenons-en à l’actualité. Les réalités de ces 22 derniers mois – l’actuelle guerre américano-sioniste d’extermination à Gaza, la guerre au Liban, les frappes puissantes subies par le Hezbollah (l’incident des beepers et autres coups sévères) et la poursuite par l’ennemi de sa politique d’assassinat et d’agression – confirment toutes que l’ennemi sioniste et ses soutiens se sont préparés à la guerre. Pourtant, même aujourd’hui, ils ne sont pas convaincus que le Parti est « dissuadé », « paralysé » ou même « affaibli », malgré ce que tentent de dépeindre certaines voix illusoires. Il y a plus important : Les armes du Parti restent la force que l’ennemi cherche le plus à cibler et à oblitérer, dans son intention de dépouiller le peuple libanais de son dernier bouclier et de sa seule épée.

Le signe peut-être le plus éloquent de l’anxiété impérialiste américaine, occidentale et sioniste à propos du rôle et de l’influence du Hezbollah est apparu lors de la « 14e Rencontre annuelle en vue de faire face au Hezbollah » – c’est textuellement la traduction du nom adopté depuis 2011 pour cette réunion annuelle organisée par le département d’État des EU, leur département de la Justice et Europol les 9 et 10 juillet de cette année. Des représentants de plus de trente pays de tous les continents se sont rassemblés pour discuter de ce qu’ils ont qualifié de « menace du Hezbollah » !

Lors de cette rencontre, ils ont discuté de « la capacité du Parti à mener des opérations à grande échelle sans avertissement préalable » et ils ont exprimé leurs inquiétudes à propos de l’expansion de ses réseaux populaires, politiques et financiers et de la croissance de sa présence en Afrique et en Amérique latine. Bref, trente pays se sont réunis voici tout juste un mois, non parce que le Hezbollah est faible, paralysé ou dissuadé, mais parce qu’il est fort, bien vivant et préparé, qu’il représente une menace réelle pour leurs projets dans la région, malgré les démons du siège, les assassinats et l’incessante guerre politique, médiatique et psychologique contre le Liban, le Parti et ses soutiens.

Ce genre de rencontre « internationale » a posé les fondations de ce que nous voyons aujourd’hui en termes de « décisions concernant le Liban » et visant les armes de la résistance. Pourtant, rien de tout cela n’affaiblit le Parti ; au contraire, cela confère à ses armes et positions une légitimité plus grande même et dévoile les objectifs des forces qui lui sont inféodées. Le Hezbollah reste une nécessité nationale et politique pour la protection du Liban. Il refuse de se transformer en une petite « organisation libanaise » détruite par les guerres absurdes dirigées par des assassins et des criminels de guerre. En soi, la mobilisation de tous ces États contre le Parti réfute les prétentions du criminel de guerre sioniste Netanyahou de vouloir « soumettre le Hezbollah » !

Entre juillet 2006 et août 2025, une nouvelle génération est née et a grandi qui a combattu avec bravoure sur les lignes de front. Beaucoup de choses ont changé : de l’eau a coulé sous les ponts, les réalités, les États et les régimes ont changé. Ce qui n’a pas changé, c’est le but fixé par l’ennemi d’« écraser le Parti » et d’établir un « nouveau Moyen-Orient », le même slogan, le même objectif annoncés par les États-Unis à l’époque. Pas plus que n’a changé la position déterminée du Parti, malgré les nombreuses blessures infligées à sa tête et à son corps en général.

Plus encore : Dans notre région, une nouvelle situation révolutionnaire a émergé que personne n’aurait pu prédire : la victoire de la révolution au Yémen. Cette réalité a renversé la situation et l’équilibre des pouvoirs, en particulier dans la région du Golfe. Cette force est un allié essentiel et déclaré de la résistance et du Parti et elle n’est pas aussi « distante » du champ de bataille que d’aucuns l’imaginent, mais elle est passée au cœur même de la lutte. C’est la seule force arabe à avoir réalisé des accomplissements qualitatifs sur terre et sur mer, forçant les États-Unis à la retraite grâce à son seul pouvoir, sans faire de concessions politiques et en imposant un blocus naval aux ports de l’ennemi. Le rôle du Yémen dans la défense du Liban et du Hezbollah se poursuivra bien au-delà bien au-delà de ce que peuvent imaginer de petits politiciens.

Depuis le 7 octobre 2023, le Parti a bénéficié d’un plus large soutien populaire arabe et international, spécialement parmi les jeunes et les étudiants, en particulier au niveau international, et ce, sans le moindre effort délibéré de sa part pour bâtir ce genre de « base nouvelle de soutien ». Il suffit de voir les dizaines de requêtes, de déclarations et de prises de position diffusées par les forces, organisations et mouvements de libération de tous les continents qui condamnent le ciblage du Liban et du Parti.

Des bannières du Hezbollah ont été hissées lors de conférences des droits humains en Europe (je doute que le Parti en ait jamais entendu parler), de festivals de musique – comme récemment à Londres avec le célèbre rappeur Mo Chara, membre du groupe de rap nord-irlandais « Kneecap », qui a été accusé d’avoir « commis un délit terroriste » après avoir agité le drapeau du Hezbollah au milieu des acclamations de milliers de fans.

Aujourd’hui, au moment où l’ennemi sioniste poursuit la guerre contre Gaza depuis plus de 22 mois et où le siège du Liban s’intensifie, une campagne psychologique, politique et médiatique concentrée est menée contre « les armes du Hezbollah ». Elle cherche à détruire son image et son prestige, à inciter sa base populaire et à semer le doute sur la réalité, les priorités et les alliances du Parti.

Chaque attaque des médias ne requiert pas nécessairement une déclaration, une réponse ou une clarification de la part du Parti. Le seul qui a protégé le Liban et sa voie djihadiste avec le sang des martyrs et les sacrifices des combattants de la résistance et des dirigeants historiques n’est pas en position d’avoir à se justifier face à des mercenaires et à des forces achetées. Pourtant, il est vrai aussi que le Parti a été plus patient et tolérant avec ces voix qu’il n’aurait dû l’être.

La réponse la plus importante aux tentatives de saper le Parti repose sur les épaules du bloc populaire qui soutient la résistance au Liban et dans la région – et qui s’étend bien au-delà des frontières de la « secte chiite ».

Le devoir et le droit de ces bases populaires est de transformer toute occasion en une arène d’action pacifique massive qui exprimera la colère populaire contre les tentatives d’entraîner le Liban dans « un nouveau 17 mai », affirmera son adhésion à la voie de la résistance, réclamera la libération des prisonniers libanais des prisons de l’ennemi et élèvera ses voix contre la normalisation et la reddition. Car, lorsqu’elle est dirigée par la lucidité et la loyauté, la position populaire reste plus forte que toute plate-forme médiatique et plus éloquente que n’importe quel discours.

Dans ce contexte, les masses de la résistance au Liban devraient se préparer à commémorer le martyre de Sayyed Hassan Nasrallah, de Sayyed Hashem Safieddine et des dirigeants du Parti qui se sont dressés sur la route de Jérusalem.

Cette commémoration, qui aura lieu les 27 et 28 septembre 2025, ne doit pas se limiter à une cérémonie du souvenir, mais doit devenir une grande occasion populaire qui renouvellera la demande de soutenir le peuple palestinien et sa résistance, de défendre la souveraineté du Liban et de libérer sa terre et d’affirmer une fois de plus que la résistance, tel un puissant olivier, continuera de reproduire ses branches même si elle croît plus profondément en ses racines, sa résilience et son don de soi.

 

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Publié le 15 août 2025 sur Masar Badil (L’article a d’abord été publié en arabe dans Al-Akhbar).
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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