La déclaration de Beyrouth sur le boycott d’Israël et le soutien à la résistance palestinienne
Il serait utile, en Occident, que nous écoutions les voix qui nous parviennent de ceux qui résistent dans le monde arabe en soutien à la Palestine. Le 24 novembre 2023, en plein génocide, un ensemble de campagnes, associations et coordinations arabes de boycott d’Israël, originaires du Liban, de Bahrein, de la Tunisie, de l’Égypte, du Maroc et de la Jordanie, ont signé une déclaration importante, la déclaration de Beyrouth.
Lisez-la, et qu’elle inspire nos combats.
Déclaration de Beyrouth des principes généraux pour une action arabe conjointe en vue d’affronter le projet sioniste et la normalisation
Ici, l’agression barbare d’Israël contre Gaza approche sa huitième semaine après l’opération historique Déluge d’Al-Aqsa et il est toujours difficile d’occuper Gaza. Gaza, cette partie chère de la terre bien-aimée de Palestine, a des arguments à faire valoir contre nous, avec le sang de son peuple, l’héroïsme de ses résistants et les pleurs de ses enfants face à l’hypocrisie mondiale, à la normalisation arabe et au silence suspect des autorités arabes.
Gaza a pulvérisé en un seul coup définitif l’illusion de la solution à deux États, a dénoncé la stérilité des voies de la négociation et la fragilité des accords de normalisation ; il a fait remonter à l’ordre du jour la question palestinienne en tant que question vraiment centrale et aussi en tant que question légitime pour tous les peuples libres du monde et, aujourd’hui, Gaza est l’essence de l’action et du discours. En présence de cette douleur intime, nous puisons une certaine force, de Gaza, de sa détermination et de sa résistance, au point de vous réciter, au nom de Gaza et de la Palestine, toute sourate de l’espoir dont nous pourrions disposer.
Nous, qui sommes réunis en ce jour, en provenance des campagnes, associations et coordinations arabes de boycott hostiles à la normalisation avec l’ennemi israélien, et face à son projet colonial de peuplement, nous vous annonçons depuis la résistance de Beyrouth, en ce deuxième anniversaire de l’absence de notre camarade et bien-aimé Samah Idriss, les principes généraux suivants qui nous guident sur la voie de notre longue lutte : la route de Jérusalem.
Primo : la Palestine
La Palestine est nôtre, du fleuve à la mer. Nous ne céderons pas un atome de son sol, ni de ses olives, ni du parfum de ses citrons, ni de la verdeur de son thym et nous n’accepterons jamais qu’un projet colonial de peuplement s’installe sur la moindre parcelle de ce sol. C’est cela, l’essence de notre lutte, le fondement de nos principes, le début de nos convictions. Voilà l’information.
Secundo : les lois internationales
Nous tirons nos droits de l’essence de nos intérêts, de la justice de notre orientation et de notre rejet de l’injustice, du racisme et du colonialisme sous toutes leurs formes, et non de ce qu’on appelle les « lois internationales », puisque la légitimité internationale n’est rien d’autre qu’une traduction de l’équilibre de pouvoir et des intérêts entre les principales puissances coloniales et qu’elle s’applique sélectivement pour faciliter leur hégémonie. Quand nous faisons allusion aux articles et principes des lois internationales, nous le faisons pour prouver les deux poids et deux mesures dans leur application et dénoncer le favoritisme dont jouit le sionisme et son entité, ainsi que le soutien dont il bénéficie de la part des grandes puissances en tant que base occidentale au cœur de notre région.
Tertio : Les accords de paix
Nous ne reconnaissons pas la légitimité de l’entité israélienne et la percevons comme une entité coloniale occidentale de peuplement dans notre pays, pas plus que nous ne reconnaissons le moindre accord arabe ou palestinien avec cette entité, ni ses effets et ramifications politiques, sécuritaires, économiques, culturels et diplomatiques. Nous condamnons toutes les autorités arabes qui ont signé ce genre d’accord et celles qui sont sur la voie de la normalisation. Cela inclut l’Autorité palestinienne même, avec ses administrations, ses agences, ses fonctionnaires et elle est un produit des accords d’Oslo, l’une de leurs dépendances, une partie centrale de la normalisation du colonialisme, une porte-parole des colonisateurs en même temps que leur représentante exclusive.
Quarto : la normalisation
Nous rejetons toute forme de normalisation avec l’entité israélienne et nous insistons pour que soit annulé tout accord avec l’ennemi. Nous cherchons également à faire passer des lois criminalisant la normalisation dans chaque pays arabe, de la même façon exactement que nous cherchons une transformation effective en vue d’affronter le projet colonial de peuplement sioniste en tant que menace pour notre région, nos peuples et le monde entier. La normalisation, telle que nous la voyons, consiste en la participation à toute activité qui réunira les Arabes et les Israéliens aussi longtemps qu’« Israël » existera. Avant cela, c’est toute action qui légitime le projet colonial de peuplement sioniste, embellit son image, consolide son hégémonie, promeut son discours et réduit le niveau du conflit antagoniste avec lui. Toutefois, les Israéliens sont exclus des propriétaires originels de la terre, autrement dit, des Palestiniens des territoires qui ont été occupés en 1948, à condition qu’ils ne promeuvent pas la normalisation avec l’ennemi.
Quinto : la résistance armée et le boycott
Notre lutte dans les mouvements de boycott n’est pas une alternative à la résistance armée et à la confrontation militaire avec l’ennemi. En général, les peuples ne triomphent pas de leur oppresseur en recourant à une unique méthode de confrontation et de résistance, mais plutôt en en combinant de multiples formes. La résistance armée est habituellement en première ligne et au centre de la lutte. Quant au boycott et à l’affrontement de la normalisation, il touche un public plus large et permet à tous les groupes de personnes de participer au travail de résistance.
À la lumière de ces principes, nous annonçons le lancement d’un atelier ouvert en vue de formuler un projet unifié qui affrontera le projet sioniste et la normalisation, et nous tiendrons sa porte ouverte à tout parti arabe ou international qui sera d’accord avec les principes susmentionnés et désirera nous rejoindre.
Voici les campagnes arabes qui ont signé cette déclaration :
La Société bahreinienne de résistance à la normalisation avec l’ennemi sioniste
La Campagne tunisienne de boycott et contre la normalisation avec l’entité sioniste
Le Mouvement de soutien à la résistance et à la lutte contre le rassemblement de la normalisation
La Campagne populaire égyptienne de boycott d’Israël
La Campagne populaire égyptienne de soutien à la résistance
Le Front marocain de soutien à la Palestine et de lutte contre la normalisation
La Campagne de boycott des supporters d’« Israël » au Liban
La Campagne nationale jordanienne en vue de laisser tomber l’accord gazier avec l’entité sioniste
Beyrouth, 24 novembre 2023
Traduit de l’anglais par Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine.