Les ventes d’armes entre l’Europe et Israël récompensent le génocide
Les fabricants d’armes actifs en Europe évitent-ils délibérément le mot « Israël » ?
David Cronin, 1er octobre 2024
Récemment, la firme allemande Diehl Defence annonçait qu’elle avait signé avec Elbit Systems un « accord de partenariat » portant sur des munitions d’artillerie pour roquettes. L’annonce ne mentionnait pas qu’Elbit est une firme israélienne.
Le surlendemain, Elbit Systems UK (Grande-Bretagne) sortait une déclaration expliquant comment elle avait « mené à bien » un « examen critique de la conception » dans sa livraison de nouveaux équipements à l’armée britannique. La déclaration mettait en évidence le fait que ces équipements allaient permettre aux troupes d’« identifier des cibles avec une grande précision » et assurer « des centaines d’emplois en Grande-Bretagne ».
La déduction qu’Elbit Systems UK est aussi britannique que les sandwiches au concombre est malhonnête. C’est une filiale de la firme israélienne Elbit Systems – bien que la déclaration n’ait pas repris ce fait marquant.
Ce genre d’omission est éloquent.
Après près d’un an d’une offensive génocidaire contre Gaza et maintenant que le Liban est sous bombardements lui aussi, les ventes d’armes entre l’Europe et Israël sont naturellement perçues comme un sujet sensible. Il reste vital de contrôler ce commerce taché de sang.
Par définition, le commerce est une chose à double sens.
La Grande-Bretagne et quelques autres pays occidentaux ont réduit – sans toutefois y mettre fin – leurs exportations d’armes vers Israël. Les importations et investissements en provenance des producteurs d’armes israéliens ont reçu moins d’attention.
Et ce, bien qu’il soit établi depuis longtemps qu’Israël cherche à vendre ses outils d’oppression et d’occupation à l’étranger.
Des commandes records
L’Europe occupe est la deuxième destination des produits d’Elbit, après l’armée israélienne.
La firme a tenté de tirer parti des opportunités offertes par l’augmentation des budgets militaires en Europe, à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022.
On peut s’en rendre compte à voir la façon dont Elbit commercialise ses fameuses « munitions errantes ». Au cours de « récents conflits, telle la guerre entre la Russie et l’Ukraine », drones et munitions errantes sont « de plus en plus utilisés, fournissant un complément rentable aux méthodes traditionnelles », fait remarquer la firme.
Rafael, un autre fabricant d’armes israélien, fournit à la Finlande – qui a rejoint l’OTAN depuis que la guerre a éclaté en Ukraine – un « système de défense antimissile ».
Il y a quelques semaines, Alexander Stubb, le président finlandais, a défendu le contrat avec Rafael en prétendant : « Nous avons besoin de ces armes. »
Ces douze derniers mois, la Pologne, les Pays-Bas et l’Espagne ont tous signé des accords en vue d’acheter des missiles ou des lanceurs de missiles à la firme Rafael.
Les plus modestes des fabricants d’armes israéliens eux aussi, dit-on, décrochent pas mal de contrats.
En mars, la BBC rapportait que l’armée britannique avait été équipée de nouvelles lunettes de visée fabriquées par SmartShooter. La technologie « recourt à l’intelligence artificielle (IA) pour éliminer les drones du ciel ».
La BBC a oublié de faire remarquer que SmartShooter est une entreprise israélienne et que ses produits ont été testés au préalable sur les Palestiniens.
La nouvelle technologie de surveillance qu’Israël a introduite au cours du siège de Gaza comprend le Rooster (grille de cuisson), un « drone robotique hybride ».
Robotican, la firme derrière le Rooster, s’est vantée d’avoir vendu plus de 50 « systèmes robotiques » aux armées de l’OTAN et d’Israël cette année.
La soif de sang apparemment inextinguible témoignée par le Premier ministre Benjamin Netanyahou et ses collègues du gouvernement a sans incontestablement fait du tort à l’économie israélienne.
Les firmes d’armement israéliennes se révèlent optimistes, malgré le déclin économique général.
Certaines ont rapporté que la demande avait grimpé à des niveaux records. Elbit a un carnet de commandes de plus de 21 milliards de USD.
Du fait que ces firmes tirent profit du génocide, les pays européens qui achètent des armes israéliennes se retrouvent accusés de récompenser ce même génocide. Il convient de les en tenir responsables.
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David Cronin est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Europe Israël : Une alliance contre-nature (Ed. La Guillotine – 2013) et Europe’s Alliance With Israel: Aiding the Occupation (Pluto Press, 2011 – L’Alliance de l’Europe avec Israël contribue à l’occupation). Il a participé à la rédaction du rapport “The israeli lobby and the European Union”.
Son dernier livre est : Balfour’s Shadow: A Century of British Support for Zionism and Israel (Pluto Press – Londres 2017).
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Publié le 1er octobre 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine