ULB : « Atteinte à nos droits et la liberté d’expression – Annemie Schaus interdit la conférence avec Mohammed Khatib »

Communiqué des cercles étudiants CEAE (Cercle des Étudiants Arabo-Européens) et BDS-ULB, avec le soutien de University workers for Palestine (groupe des travailleuses et travailleurs de l’ULB en soutien à la Palestine), Université populaire de Bruxelles, Occupation de la VUB et ULB Palestine (la plateforme inter-cercles de l’ULB pour la Palestine).

 

Affiche : interdiction d'une conférence avec Mohammed Khatib à l'ULB

Inscrite dans le cadre de la Semaine de Solidarité avec la Palestine, cette conférence a pour objectif de mettre en lumière les pressions et les mécanismes de censure exercés sur les militants et organisations solidaires de la cause palestinienne.

L’ironie est désormais incontestable : une conférence visant à dénoncer la censure et la répression des mouvements pro-palestiniens est elle-même censurée par une institution qui prétend défendre le libre examen.

La confirmation par le rectorat de l’interdiction de cet événement constitue une atteinte grave aux principes fondamentaux de liberté académique et de débat public.

De plus, nous attirons l’attention sur la situation spécifique de Mohammed Khatib, réfugié palestinien en Belgique et intervenant à cette conférence. Victime d’une campagne de désinformation et de harcèlement, notamment administratif, liée à son militantisme, Mohammed Khatib ne fait pourtant l’objet d’aucune accusation concrète ni de procédure judiciaire. Son témoignage illustre parfaitement les mécanismes de répression dénoncés par cet événement.

Que ses opinions soient partagées ou non n’a aucune incidence sur son droit fondamental de s’exprimer et c’est précisément la diversité des points de vue qui nourrit un débat démocratique et libre. De nombreuses organisations, dont plus de 250 académiques, l’UPJB ou encore l’ABP, ont déjà publié des communiqués de soutien à Mohammed Khatib, dénonçant cette tentative de le museler et rappelant les valeurs fondamentales que sont la liberté d’expression et le droit de participation au débat public.

Ce n’est pas la première fois que nos cercles, BDS-ULB et le Cercle des Étudiants Arabo-Européens, sont ciblés par des tentatives injustifiables d’interdiction de nos événements. Ces pressions ont atteint un point critique depuis le début du génocide à Gaza.

L’année dernière déjà, lors de la Semaine de Solidarité avec la Palestine, nous avons été convoqués par les autorités académiques. Nous avons également fait face à une pression significative lors de l’organisation d’une conférence avec Salah Hamouri, militant et ancien prisonnier politique. Cet acharnement systématique soulève de sérieuses questions sur les motivations politiques derrière ces décisions.

Ces tentatives répétées de censure et d’intimidation nous interpellent d’autant plus que nos cercles figurent parmi les rares à organiser des événements antiracistes au sein de l’ULB. Nous constatons avec regret que nos cercles sont régulièrement ciblés par ce type de tentative d’annulation, qui s’apparente à une véritable forme d’intimidation de la part de l’ULB.

Ces attaques récurrentes contre nos événements témoignent d’une volonté manifeste de réduire au silence les voix solidaires de la Palestine. L’ULB, en multipliant ces entraves systématiques, participe à une stratégie de répression insidieuse et, tolérant de telles pratiques, s’aligne sur des pressions politiques et sociales de marginalisation

Dans son mail justifiant l’interdiction de la conférence, la rectrice écrit :

« Le réseau de Samidoun, interdit dans plusieurs pays, est associé à des déclarations soutenant des organisations désignées comme terroristes, ainsi qu’à des positions glorifiant des actes de violence menant au massacre de civils. » De plus, elle affirme que « ces prises de position sont incompatibles avec les valeurs de notre Université » et que cette conférence pourrait « créer un climat anxiogène et d’insécurité sur notre campus ».

Cependant, les arguments qu’elle présente sont non seulement infondés, mais aussi profondément honteux.

Il est également important de remettre en question la notion de « positions et valeurs » de l’Université qui sont invoquées ici.

En effet, il est important de rappeler qu’elle a organisé la venue d’Élie Barnavi à l’ULB le 3 juin dernier, malgré ses appels publics à « tapisser Gaza de bombes ». Comment expliquer ce double standard ?

Comment peut-on admettre qu’un ancien ambassadeur d’un État génocidaire et meurtrier soit invité par notre université au nom de la « liberté d’expression », tandis qu’un réfugié palestinien politique se voit privé de ce même droit ?

Quels principes la rectrice cherche-t-elle réellement à promouvoir en refusant à un réfugié palestinien politique le droit de s’exprimer, tout en accueillant sur son campus un défenseur de politiques de guerre et de violence ?

Il est important de préciser que Samidoun a été interdit dans trois pays, sur des bases politiques (décision des exécutifs), mais ses membres n’ont fait l’objet d’aucune condamnation judiciaire. Ces interdictions ont été largement dénoncées par la société civile, en ce qu’elles visent justement à réprimer les voix pro palestiniennes. L’accusation de soutien au terrorisme semble être avancée de manière simpliste ; dans ce cas précis, elle ne repose pas sur des faits avérés et s’inscrit davantage dans une logique de campagne d’opinion.

Nous souhaitons également préciser que l’invitation de Mohammed Khatib à notre conférence s’inscrit dans un cadre où il est avant tout accueilli en tant qu’individu, réfugié palestinien politique victime de cette répression, et non en tant que « porte-parole de Samidoun ».

En ce qui concerne la prétendue création d’un “climat anxiogène et d’insécurité » par la conférence, il est difficile de comprendre comment de telles affirmations peuvent être prises au sérieux. Ces termes, à la fois vagues et stigmatisants, visent à criminaliser une voix dissidente, tout en ignorant les réelles violences et injustices que subissent les Palestiniens.

Ils relèvent d’une rhétorique qui, volontairement ou non, associe la simple expression d’une perspective palestinienne à une menace. Cette association est non seulement infondée mais frôle également le racisme, car elle sous-entend que la parole d’un réfugié palestinien serait intrinsèquement dangereuse ou perturbatrice.

La contradiction est flagrante : un appel explicite à la violence contre Gaza est toléré, mais un témoignage d’un réfugié politique palestinien est jugé menaçant pour la sécurité sur le campus.

Comment l’ULB peut-elle justifier cette disparité de traitement ? Pourquoi la liberté d’expression est-elle préservée pour certains discours, mais systématiquement réprimée pour d’autres ?
En censurant cette conférence, l’université renie les principes du libre examen et trahit son engagement envers la pluralité des opinions. Nous restons fermement déterminés à défendre cet espace de discussion et à veiller à ce que l’ULB se montre à la hauteur des valeurs qu’elle revendique.

Le CEAE et le BDS affirment pleinement leurs attachements aux valeurs fondamentales de notre Alma Mater. Nous défendons sans réserve la liberté d’expression et le principe du libre examen, ces idéaux que notre rectorat semble aujourd’hui éprouver des difficultés à assumer et se permet de bafouer.

Nous appelons fermement les autorités académiques à revenir sur cette décision injustifiable et à rétablir la tenue de cet événement dans les conditions initialement prévues.

À défaut, nous continuerons à mobiliser tous les moyens nécessaires.

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Publié le 24 novembre 2024 sur Instagram

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