La prochaine Intifada : une révolution jusqu’à la fin de l’occupation ?

Le discours du Président Mahmoud Abbas aux Nations-Unies, qui avait été précédé d’une propagande intense annonçant que ce serait une « bombe », s’est avéré n’être rien de plus qu’une litanie de réclamations rebattues et d’appels à la communauté internationale.

Le discours a échoué à coup sûr à soulever de nouveaux défis, à proposer de nouvelles stratégies et à insuffler un espoir parmi les Palestiniens brûlant sous l’occupation israélienne.

Un ado palestinien qui relance une grenade lacrymogène aux soldats israéliens avec sa fronde

Quelques jours après le discours, quand Israël a annoncé que l’Autorité palestinienne (AP) avait pris part à la capture d’un groupe à Naplouse accusé d’avoir commis un attentat contre des colons illégaux, la réaction d’Abbas – la menace habituelle, usée, de ne pas se conformer à des accords violés par Israël – s’est révélée n’être rien de plus qu’une « bombe sonore ».

Les jeunes Palestiniens avaient d’abord espéré que l’annonce signifierait que l’AP allait cesser de se comporter comme un sous-traitant d’Israël dans l’effort pour écraser la résistance palestinienne.

Puis, ils se sont levés pour combattre l’appropriation par Israël du Noble Sanctuaire d’Al-Aqsa à Jérusalem, pour résister contre la fermeture de la ville à son propre peuple, et pour s’opposer aux attaques incessantes des colons contre les villageois en Cisjordanie, comme celle qui a abouti à brûler vive toute une famille, un crime pour lequel personne n’a eu de compte à rendre.

Ces oiseaux de la liberté sont traqués, un par un. Ils sont poussés à l’intérieur de cages israéliennes aussi bien que palestiniennes, pourtant ils sont blâmés en vertu de la dynamique typique des abus : « Ils ont attiré toute cette souffrance sur eux-mêmes et leurs familles ! ».

Nous avons entendu des propos similaires s’agissant de femmes qui avaient été violées : « Elle l’a bien cherché ; elle l’a provoqué ; elle est la seule à blâmer pour cela ».

Israël a ordonné d’ouvrir le feu sur tout enfant palestinien vu en train de jeter des pierres, il a instauré des peines minimales de 4 ans et fixé des amendes prohibitives à leurs parents. Toutes ces mesures ne font qu’inviter d’autres enfants à défier le caractère impitoyable des lois israéliennes.

Muhannad, 19 ans, Amjad, 17 ans, Fadi, 18 ans, Hadil, 18 ans, et Shurouq, 18 ans, ne sont que quelques-uns de ces jeunes Palestiniens qui ont été exécutés sans procès au cours des deux dernières semaines, accusés de porter des armes, de détenir ou d’attaquer des colons ou des soldats israéliens avec des couteaux.

Leurs maisons seront démolies pour punir leurs parents de leur lien biologique avec leurs enfants (même au moyen d’une punition collective prohibée par le droit international).

La police israélienne a la gâchette facile quand il s’agit de Palestiniens, mais elle est tellement patiente avec les criminels juifs.

Yishai Shlissel a poignardé six participants à un défilé de la gay pride en mars dernier, mais aucun agent de police n’a tiré sur lui.

Les crimes des colons contre les Palestiniens sont observés, couverts et même encouragés par les autorités israéliennes, alors qu’aucun Palestinien ne s’en tire à bon compte pour tout acte de résistance.

Des policiers israéliens habillés comme des Arabes pénètrent dans des hôpitaux palestiniens afin d’enlever des personnes blessées sous les yeux mêmes de la police palestinienne, mais Israël échoue toujours à arrêter les Israéliens qui tuent des Palestiniens ; quand des Palestiniens prennent des photos de l’acte criminel, les autorités israéliennes trouvent une infinité d’excuses pour minimiser le délit.

Lors des récents affrontements, Israël s’est servi de colons sans foi ni loi opérant en toute impunité pour terroriser les Palestiniens, tirant sur les passants et brûlant leurs biens, leurs cultures et leurs oliveraies, véhicules et maisons.

Des colons armés ont été observés ouvrant la voie à l’incursion des soldats israéliens dans des villages voisins de Naplouse.

Étant donné l’impunité totale des autorités israéliennes, il n’est pas surprenant que de jeunes aventuriers tentent de briser les chaînes de leur impuissance, réaffirmant un sentiment de responsabilité à travers une action spectaculaire et cherchant à se venger pour leur nation humiliée et leur pays violé.

Aujourd’hui, beaucoup de gens se demandent si oui ou non le bouleversement en cours va mener à une troisième Intifada ; ce nom même, comme la première et la deuxième Intifada, est prophétique d’un destin inquiétant, augurant qu’elle s’interrompe avant la fin de l’occupation.

En effet, elle sera aussitôt interrompue, dès que les politiciens et négociateurs seront en mesure d’en récolter les fruits pour leurs intérêts personnels.

Ma crainte est qu’une telle motivation– la perte de liberté et la perte de vies humaines qui nous ont apporté une telle angoisse indicible – soit exploitée par nos représentants mêmes, fatigués, momifiés, qui se soucient fort peu de la libération ou de la cause nationale, et dont le seul objectif en tant que sous-traitant est de tirer avantage de la résistance palestinienne pour conserver leurs postes de « médiateurs » et continuer à se taire.

Puisse ce bouleversement ne pas être une troisième Intifada dans laquelle nos espoirs seront ainsi anéantis.

Puisse-t-il être une révolution palestinienne finale qui mette fin à l’occupation.

Laissons tous les Palestiniens dignes, et leurs sympathisants à l’échelle internationale, faire ce qu’il faut pour assurer la survie de nos oiseaux de la liberté.

Nous devons maintenir la responsabilité collective et la ferveur morale de notre révolution à la face de tous les oppresseurs, de l’intérieur et de l’extérieur, pour l’ultime libération de notre peuple et de notre terre.


Samah JabrSamah Jabr est est une Palestinienne de Jérusalem, psychiatre et psychothérapeute, dévouée au bien-être de sa communauté, au-delà des questions de la maladie mentale.

Publié le 8 octobre 2015  sur MiddeEastMonitor

Traduction : JPP pour les Amis de Jayyous

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