Premiers cas de coronavirus rapportés à Gaza

Les deux premiers cas de COVID-19, la maladie provoquée par le nouveau coronavirus, ont été confirmés dans la bande de Gaza, l’un des endroits les plus densément peuplés de la planète.

57 cas covid-19 confirmés en Cisjordanie occupée, deux dans la bande de Gaza

De larges campagnes de stérilisation et de prévention ont lieu dans les quartiers et les différents camps de réfugiés palestiniens de la bande de Gaza afin de réduire les risques de propagation de la pandémie de COVID-19 dans l’enclave palestinienne de deux millions d’habitants. Photo via Palestine Vaincra

Yousef Abu al-Rish, un responsable du ministère de la Santé à Gaza, a annoncé que les deux personnes étaient revenues un peu plus tôt du Pakistan et qu’elles étaient déjà en quarantaine au moment de la prise de leur diagnostic.

Les deux patients ont été transférés dans un hôpital de campagne dans la ville la plus au sud de Gaza, Rafah, où ont eu lieu des préparatifs en vue des cas potentiels de coronavirus. Toutes les personnes qui sont entrées en contact avec les patients ont été placées elles aussi en quarantaine obligatoire.

Dans la ville de Cisjordanie occupée de Salfit, un troisième Palestinien, qui avait assisté à la même conférence dans la ville pakistanaise de Raiwind, près de Lahore, a également été testé positif au virus.

Cela porte le nombre de cas confirmés à 57 en Cisjordanie occupée, à deux dans la bande de Gaza et à un millier environ en Israël, où l’on a par ailleurs fait état d’un mort.

Actuellement, on estime à 1 200 environ le nombre de Palestiniens placés dans les 18 centres de quarantaine de la bande de Gaza.

Le confinement en Cisjordanie

Le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammad Shtayyeh, a décrété un confinement de deux semaines pour tous les résidents palestiniens de la Cisjordanie occupée, à l’exception des urgences. Il prendra effet ce dimanche soir (22 mars).

Les personnes travaillant dans des pharmacies, des magasins d’alimentation, des boulangeries et des centres de soins de santé sont exemptées de confirnement.

La décision de Shtayyeh ne concerne en aucun cas les quelque 800 000 colons israéliens vivant dans des colonies illégales en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est. Les colons partagent certaines routes, magasins d’alimentation et stations-services avec les Palestiniens.

Au contraire des Palestiniens, les colons sont libres d’entrer en Israël ou d’en sortir à leur guise et ne sont soumis qu’aux restrictions imposées par les autorités israéliennes.

Dans le cadre des mesures d’urgence prises par l’AP, il ne sera plus permis aux Palestiniens d’aller travailler dans les colonies israéliennes.

La semaine dernière, certains Palestiniens ont bravé les ordres de cesser de travailler dans les colonies, en invoquant le besoin de nourrir leurs familles.

Pendant ce temps, des dizaines de milliers d’ouvriers palestiniens continuent de travailler à l’intérieur d’Israël sans être en mesure de retourner dans leurs foyers en Cisjordanie occupée ou dans la bande de Gaza.

Israël a renouvelé automatiquement les permis des travailleurs palestiniens employés en Israël, mais tout travailleur qui retourne chez lui risquera de se voir privé de son permis.

« Le ministre de la Défense Naftali Bennett a décidé que seuls les travailleurs qui acceptaient de passer leurs nuits en Israël pendant deux mois pouvaient continuer à exercer des emplois considérés comme  »essentiels » », a rapporté le quotidien israélien Haaretz.

Pour les Palestiniens, la situation est désespérée. Un travailleur, identifié sous le seul prénom d’Ibrahim, a expliqué au journaliste de Haaretz :

« Je préférerais être chez moi, comme les juifs et comme vous, avec un masque. Mais que va dire ma femme si nous n’avons pas d’argent ? C’est un choix où il n’y a pas le choix ! »

Le stock de médicaments « chroniquement bas » à Gaza

Michael Lynk, le rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’homme en Cisjordanie et à Gaza, invite instamment Israël, l’Autorité palestinienne et l’organisaiton palestinienne de résistance, le Hamas, a déployer toutes les ressources sanitaires à leur disposition pour faire obstacle à la propagation de la pandémie.

L’Autorité palestinienne dirigée par Mahmoud Abbas exerce un contrôle limité en Cisjordanie occupée, alors que c’est le Hamas qui gère l’intérieur de la bande de Gaza en état de siège.

Lynk a affirmé qu’Israël, en tant que puissance occupante, est obligé par les lois internationales de garantir des services élémentaires et des infrastructures de santé au profit des Palestiniens.

En lieu et place, Israël a réduit les capacités du système de santé de Gaza et a interdit l’entrée dans le territoire de fournitures vitales.

Depuis 13 ans, Israël impose un siège aux deux millions d’habitants de Gaza et il contrôle le passage des marchandises qui entrent dans le territoire et de celles qui en sortent.

Israël interdit l’importation à Gaza d’une longue liste de produits prétendument « à double usage », dont il prétend qu’ils pourraient également servir à des fins militaires.

Parmi ces produits, des fournitures médicales comme la glycérine et le peroxyde d’hydrogène (H2O2, c’est-à-dire de l’eau oxygénée, NdT), utilisé comme désinfectant.

Gisha, une association israélienne de défense des droits, appelle Israël a suspendre son blocus contre Gaza et à y autoriser l’entrée de tous les produits nécessaires.

Gisha a déclaré que

« la bande de Gaza connaissait une pénurie grave de ventilateurs, de lits USI (prévus pour les unités de soins intensifs), de médicaments et d’équipements de protections, au cas où l’épidémie s’aggraverait encore ».

L’association a ajouté que la bande de Gaza n’était pas équipée pour affronter la pandémie, du fait que ses infrastructures sont « inédaquates, même en temps  »normal » ».

« Le système des soins de santé de Gaza était déjà en train de s’effondrer même avant la pandémie », a déclaré le rapporteur spécial de l’ONU, Lynk.

« Ses stocks de médicaments essentiels sont chroniquement bas. Ses sources naturelles d’eau potable sont grandement contaminées. »

Il a encore fait remarquer que la population de Gaza était déjà plus vulnérable,

« du fait de la malnutrition à la hausse, des maladies non contagieuses mal contrôlées, de la grande promiscuité, des conditions de logement et du fait également que la population plus âgée n’a pas accès à des soins adéquats et qu’en outre le tabagisme est très élevé ».

Medical Aid for Palestinians, une ONG américaine, a également mis en garde contre le fait qu’une épidémie dans l’enclave côtière pourrait être « catastrophique ».

Le coordinateur humanitaire des Nations unies, Jamie McGoldrick, a libéré un fonds d’urgence de 1 million de USD pour préparer la Cisjordanie occupée et la bande de Gaza en état de siège à une épidémie et il a lancé un appel pour que soient recueillis davantage de fonds encore.

Les prisonniers menacent d’une grève de la faim

Pendant ce temps, les Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes menacent d’entamer une grève de la faim début avril pour protester contre les mesures prises par les Services pénitentiaires israéliens (IPS) et qui sont susceptibles de les exposer au virus.

On raconte que les gardiens israéliens font irruption dans les cellules des prisons sans masques ni équipements de protection, soumettant ainsi les détenus à des risques de santé, vu la propagation rapide du virus. Les autorités carcérales ont également interdit les visites des familles et des avocats.

La semaine dernière, les autorités carcérales israéliennes ont supprimé quelque 140 produits dans les cantines des prisons, parmi lesquels de la nourriture et des produits hygiéniques.

Quatre détenus palestiniens de la prison de Megiddo, dans le nord d’Israël, ont été placés en isolement après avoir été en contact avec un gardien israélien touché par le coronavirus.

Toutefois, ces détenus n’ont pas été testés contre le virus. Afin d’entrer en ligne de compte pour ces tests, les prisonniers doivent avoir été en contact avec une personne infectée et présenter eux-mêmes les symptômes du COVID-19.

La Jordanie sous couvre-feu

Dans l’intervalle, la Jordanie voisine a imposé un couvre-feu total, sans date limite, sur tout son territoire.

Il prendra effet ce dimanche (22 mars). Tous les citoyens sont forcés de rester chez eux, hormis les cas d’urgence. La quasi-totalité des entreprises et commerces sont fermés.

Les frontières de la Jordanie ont été complètement fermées elles aussi.

Il y a actuellement (ce dimanche 22 mars) 112 cas confirmés de coronavirus en Jordanie, sans décès jusqu’à présent. On signale une guérison.

L’Organisation mondiale de la santé a enregistré plus de 300 000 cas confirmés de coronavirus, en ce dimanche 22 mars, et plus de 13 000 d’entre eux ont eu une issue fatale.

 


Publié le 22 mars 2020 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal

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