Palestine : affronter le défi
Après que l’ « intifada des missiles » de Gaza est parvenue à forcer Israël à battre en retraite et à réduire la confrontation en défaite, la question est de savoir de quelle façon les Palestiniens vont pouvoir affronter le défi consistant à tenir le coup et à construire sur cette victoire contre la puissance occupante.
Abdel Bari Atwan, 22 mai 2021
Le combat le plus important ne fait que commencer. De nouvelles batailles, plus dures encore, nous attendent contre les ennemis de cette victoire qui vont tenter de s’en emparer : les clients d’Israël et des États-Unis qui veulent se mettre à semer la discorde et diviser les rangs du front de résistance. Il ne fait pas de doute que certains Arabes, dont des Palestiniens, vont jouer un rôle majeur, sur ce plan. La guerre unifie, mais la paix ou les trêves peuvent diviser.
Ce qui n’est pas très connu, c’est que cette victoire a été obtenue en coordination avec l’axe régional de la résistance. Le Hezbollah, l’Iran et les groupes alliés ne sont pas intervenus dans la guerre parce que les dirigeants de la résistance de Gaza leur ont demandé de ne pas le faire. Ils voulaient obtenir une victoire essentiellement palestinienne et priver ainsi Israël d’une occasion de se faire passer pour une victime aux yeux du monde. Cela aurait sapé cet épanchement massif de solidarité internationale avec la cause palestinienne qui a abouti à l’organisation de manifestations partout dans le monde à une échelle qu’on n’avait plus vue depuis la guerre en Irak en 2003.
Le fait est que ç’a été la résistance à Gaza qui a décidé du timing et de la manière de mener cette guerre, en lançant des volées de missiles en grands nombres sur les villes et colonies israéliennes afin de semer la confusion et de franchir les systèmes de défense du Dôme de Fer.
Mais la déclaration de guerre de Gaza à l’oppression israélienne a également servi – bien que certains puissent ne pas être d’accord – de représailles contre les attaques du Mossad visant les infrastructures nucléaires de l’Iran et contre les centaines de frappes aériennes d’Israël en Syrie.
Ceci explique pourquoi le président syrien Bashar al-Assad a pris parti pour le Hamas, ce qui prépare l’officialisation du retour de l’organisation à Damas et l’ouverture d’une nouvelle page pour les deux camps, en se hissant au-dessus des blessures et querelles et en reprenant une coopération directe.
De son côté, l’Iran a baptisé « Gaza » un drone qu’il a récemment développé, à la fois en l’honneur de sa victoire et pour répondre à la gratitude exprimée publiquement par le dirigeant du Hamas, Ismail Haniyeh, pour le soutien offert par la République islamique.
Les préparatifs de la nouvelle vague de résistance ont débuté dès l’annonce du cessez-le-feu. Une tâche initiale consistera à renouveler les 4 000 missiles qui ont forcé des millions d’Israéliens à se terrer dans leurs abris et qui ont coupé Israël du monde en fermant ses aéroports. Des sources affirment que renouveler et améliorer les missiles de la résistance pourrait prendre deux ans, et même davantage, en raison du blocus, bien qu’il soit possible qu’il y en reste encore, actuellement, cinq fois plus dans les stocks.
Avec la résurrection militaire du territoire assiégé et appauvri de la bande de Gaza et le fait qu’Israël est confronté à une situation qui empire tout en devenant un fardeau pour ses alliés, le compte à rebours a commencé pour la disparition du rêve raciste du sionisme.
Publié le 22 mai 2021 sur le site Rai al-Youm
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine
Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du site Rai al-Youm (“L’opinion d’aujourd’hui”, un site qui se veut nationaliste arabe, antisaoudien et antisioniste). Il est l’ancien directeur du quotidien Al-Quds Al-Arabi et l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
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