L’Holocauste, utilisé abusivement par l’UE

Titre original : L’Holocauste est utilisé abusivement quand l’UE encourage des vibrations positives avec le lobby pro-israélien

Olivér Várhelyi

Olivér Várhelyi, l’allié le plus ferme d’Israël aux échelons supérieurs de la bureaucratie de Bruxelles. (Photo : via Twitter)

 

David Cronin, 18 avril 2023

Il se passe rarement une semaine sans qu’on se serve abusivement de l’Holocauste.

L’un de ces abus a eu lieu dimanche, lorsqu’une marche a été organisée à Budapest – manifestement afin de rappeler aux Hongrois les juifs tués par les nazis.

Un homme a été très visible à la tribune : Yacov Hadas Handelsman, l’ambassadeur d’Israël en Hongrie. Il représente un État qui a déjà tué près de 100 Palestiniens depuis le début de cette année et plus de 10 000 depuis le déclenchement de la Seconde Intifada en septembre 2000.

Mettre le doigt sur des crimes qui ont eu lieu au 20e siècle est apparemment la meilleure façon de se dépêtrer des crimes du 21e. Du moins cette tactique fonctionne-t-elle pour Israël.

Samedi, sa police a agressé des chrétiens qui célébraient la saison de Pâques dans Jérusalem occupée. Aucun des participants à la marche de Budapest, le lendemain, n’a protesté contre ces agressions – ni non plus contre celles, pires encore, d’Israël contre les fidèles musulmans au cours du Ramadan.

On peut gager que la violence d’État d’Israël n’a pas suscité la moindre angoisse chez Katharina von Schnurbein, la coordinatrice de l’Union européenne contre l’antisémitisme. Elle dirigeait la marche de Budapest en compagnie de l’ambassadeur israélien en Hongrie déjà mentionné.

Von Schnurbein n’a pas lésiné sur les allusions fortes en disant qu’elle était motivée par le sionisme chrétien. Les disciples de cette idéologie perverse pensent que la Bible donne à Israël la permission de voler la Palestine aux Palestiniens.


L’incessante propagation de mythes

La marche était également soutenue par Olivér Várhelyi, le membre hongrois de la Commission européenne (l’exécutif de l’UE).

 

Il est nominalement chargé de gérer les relations de l’EU avec ses pays voisins. Dans le cadre de la « lettre de mission » » qu’il a reçue de la Commission européenne en débutant son mandat, en décembre 2019, on attend de lui qu’il fasse la promotion du « respect des droits humains et du pouvoir de la loi ».

Que ces attentes soient réelles ou pas, Várhelyi ne s’y est pas conformé.

Récemment, il a tenu des discussions avec nombre d’organisations de lobbying pro-israélien.

En janvier, par exemple, il a rencontré Ted Deutch, le nouveau CEO de l’American Jewish Committee.

Un rapport sur cette conversation obtenu suite à une requête au nom de la liberté d’information la décrit comme « un échange de points de vue positif et tourné vers l’avenir sur des questions d’intérêt commun ».

La liste de ces « questions » était brève : les relations entre l’UE et Israël, la lutte contre l’antisémitisme et le soutien aux accords d’Abraham (les traités de normalisation entre Israël et divers pays arabes). Le rapport ne comportait pas d’allusion spécifique aux violations des droits humains par Israël.

Un mois plus tôt environ, Várhelyi avait rencontré des représentants de l’Action and Protection League, une organisation pro-israélienne constituée à Budapest.

Le compte rendu – cf. supra – de cet entretien dit : « Un échange productif a eu lieu sur l’application de la stratégie de l’UE dans la lutte contre l’antisémitisme et l’encouragement de la vie juive ».

Rien n’indique que l’oppression des Palestiniens par Israël n’ait été évoquée au cours de cet « échange productif ».

Loin de défendre les droits des Palestiniens, Várhelyi a témoigné d’une immense cruauté dans le but de plaire au lobby pro-israélien.

Il est allé jusqu’à bloquer l’aide aux hôpitaux palestiniens en s’appuyant sur de fausses allégations disant que les manuels utilisés dans les écoles palestiniennes étaient hostiles envers Israël.

Alors que, finalement, cette aide a été accordée, Várhelyi continue toujours de répandre ses mensonges à propos des manuels scolaires.

Après avoir rencontré en mars le chef de l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, Várhelyi avait tweeté qu’il était « nécessaire de diriger par l’exemple ». Il insinuait là – contrairement aux faits établis – que les écoles gérées par l’agence prêchaient l’intolérance.

La réalité est que l’incessante agression israélienne rend la paix impossible.

Ce ne sont pas les occasions qui ont manqué à Várhelyi de dire à Israël que ses agressions doivent cesser.

Il a pris part à au moins 12 réunions ou conversations avec des représentants d’Israël – distinctes de celles avec le personnel des groupes de pression pro-israéliens – depuis décembre 2019, a confirmé la Commission européenne suite à une requête d’information. Ces réunions comprenaient une « mission en Israël » – le terme utilisé par les responsables de l’UE – entreprise en mars de l’an dernier.

D’après les détails – limités, il est vrai – fournis à ce propos, il est apparu que chacune de ces discussions a examiné des façons de renforcer les relations entre l’UE et Israël.

Dernièrement, il a été beaucoup discuté de la façon dont la position internationale d’Israël pouvait être entachée par l’inclusion de fascistes à sa coalition au pouvoir et par le « chambardement » que leurs « réformes » pourraient provoquer.

Oliver Várhelyi, par contre, maintient une position de continuité dans les affaires. Cela n’est guère surprenant.

Qu’importe qu’Israël ait un gouvernement d’extrême droite ou plus « libéral » : il a prouvé qu’il était son allié le plus ferme aux échelons supérieurs de la bureaucratie de Bruxelles.

Israël peut dépendre de lui pour garder les choses à un niveau positif. Les Palestiniens peuvent attendre de lui qu’il reste dur à leur égard.

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David Cronin est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Europe Israël : Une alliance contre-nature (Ed. La Guillotine – 2013) et  Europe’s Alliance With Israel: Aiding the Occupation (Pluto Press, 2011 – L’Alliance de l’Europe avec Israël contribue à l’occupation). Il a participé à la rédaction du rapport “The israeli lobby and the European Union”. 
Son dernier livre est : Balfour’s Shadow: A Century of British Support for Zionism and Israel (Pluto Press – Londres 2017).

Il a écrit de nombreux articles pour de nombreuses publications, dont The Guardian, The Wall Street Journal Europe, European Voice, the Inter Press Service, The Irish Times and The Sunday Tribune. En tant qu’activiste politique, il a tenté d’appliquer un état d’ “arrestation citoyenne” à Tony Blair et Avigdor Lieberman pour crimes contre l’humanité. 

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Publié le 18 avril sur 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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