Des centaines de tués en Israël et à Gaza après le raid surprise de la résistance palestinienne
Dans la nuit de samedi à dimanche, Israël a pilonné Gaza en représailles de l’offensive surprise sans précédent lancée par les combattants du Hamas à l’aube de samedi.
Maureen Clare Murphy, 8 octobre 2023
Les dirigeants israéliens ont menacé de recourir à une violence exceptionnelle contre Gaza en guise de représailles. Un député du Likoud, le parti du Premier ministre Benjamin Netanyahou, a même réclamé une Nakba pire encore que le nettoyage ethnique de la Palestine en 1948.
Deux tiers de la population de Gaza – plus de deux millions d’habitants – sont des réfugiés chassés de leurs terres en Israël, dont celles situées à la périphérie de l’enclave et qui ont été purgées de leurs résidents palestiniens avant et durant les mois qui ont suivi la création de l’État d’Israël.
Israël a fait état de 300 tués, à la fin de la première journée de ce qui pourrait être un combat prolongé bien plus sanglant que les nombreuses confrontations transfrontalières entre l’armée israélienne et les organisations de résistance à Gaza au cours de ces deux dernières décennies.
Il est question de quelque 230 tués suite au frappes israéliennes contre Gaza. Par ailleurs, six Palestiniens, dont un enfant, ont été abattus samedi en Cisjordanie.
Au moins un commandant de brigade israélien a été tué, dit-on, ainsi qu’un chauffeur d’ambulance israélien qui aurait été tué lui aussi par balle.
Environ 1 500 Israéliens ont été hospitalisés, suite aux milliers de roquettes lancées depuis Gaza et dont certaines ont même atteint Jérusalem. Mille combattants palestiniens au moins se sont infiltrés en Israël et se sont assuré le contrôle des communautés situées à la périphérie de l’enclave côtière.
En fin de journée, il restait encore à Israël à reprendre le contrôle aux activistes palestiniens dans plusieurs colonies de la périphérie de Gaza. Des résidents de ces communautés ont décrit des scènes de « chaos » et certaines personnes, dit-on, ont été confinées dans leurs maisons par les combattants palestiniens.
This is the first time in the history of this struggle that Palestinians have retaken a town from settlers, even if for a brief moment and even if they don't ultimately hold onto it. This is a significant moment in the psychological war.
— Sami Hermez | سامي هرمز (@HermezSami) October 7, 2023
NEW: The Israeli government session was suspended due to a missile attack on Tel Aviv — Israeli Channel 13 https://t.co/0LZ9l64jCU
— Ragıp Soylu (@ragipsoylu) October 7, 2023
https://twitter.com/Mahyar3138/status/1710645227654893883?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1710645227654893883%7Ctwgr%5E3ef8282d5cf18f324b4d0bf19ba0ebe90224461f%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fblogs%2Fmaureen-clare-murphy%2Fhundreds-killed-israel-gaza-after-surprise-resistance-raid
Les combattants palestiniens se sont emparés d’une base militaire au moins, ce samedi, et les autorités israéliennes ont-elles-mêmes détruit l’un de leurs commissariats de police à Sderot, une ville israélienne située près de Gaza, en croyant qu’un militant palestinien s’était barricadé à l’intérieur du bâtiment.
Le ministère de la santé de Gaza a déclaré que 1 700 personnes blessées environ avaient reçu des soins dans les divers hôpitaux du territoire.
Des équipes médicales étaient sur la brèche pour soigner des douzaines de patients dans un état grave ou critique, a ajouté le ministère de la santé.
On rapporte que trois paramédicaux palestiniens ont été tués lors de deux frappes israéliennes séparées contre des hôpitaux dans le nord et l’est de Gaza. Plusieurs ambulances ont été détruites et les hôpitaux de Gaza ont dû faire fonctionner leurs générateurs à l’aide de leurs stocks limités de carburant après qu’Israël eut coupé l’alimentation en électricité du territoire.
There is no way to cut electricity to 2.2 million people in Gaza in a manner that 'complies with international law' or 'preserves humanitarian needs.' This would be a crime of unseen proportions. https://t.co/CcpMcB6D98
— Tania Hary (@taniahary) October 7, 2023
Il a été rapporté que le journaliste palestinien Muhammad al-Salhi avait été abattu et tué alors qu’il travaillait le long de la clôture frontalière, à l’est de Bureij, dans la partie centrale de Gaza :
تغطية صحفية: ارتقاء الصحفي محمد الصالحي خلال تغطيته داخل أراضينا المحتلة شرق قطاع غزة. pic.twitter.com/jfQfSTS4Hp
— شبكة قدس الإخبارية (@qudsn) October 7, 2023
Deux autres journalistes – Nidal al-Wahidi et Haithem Abd al-Wahed – ont été portés manquants.
Israël a bombardé des buildings civils à Gaza, comme il l’avait déjà fait lors de précédentes campagnes militaires contre le territoire :
Watch the moment Israeli fighter jets strike Palestine Tower behind Al Jazeera’s Youmna El Sayed as she reports live from Gaza ⤵️ pic.twitter.com/dXHVRJiCOC
— Al Jazeera English (@AJEnglish) October 7, 2023
Israeli fighter jets destroy an 11-story ( 100 flats) building in downtown Gaza City , the second biggest building in Gaza , after warning the residents to evacuate pic.twitter.com/eYocnoRtdR
— Rushdi Abualouf (@Rushdibbc) October 7, 2023
Netanyahou, qui n’a fait aucun commentaire au cours des premières heures de l’attaque, a déclaré samedi soir que l’armée ratissait les villes prises par les combattants du Hamas un peu plus tôt dans la journée.
Il a prévenu les civils palestiniens de Gaza que l’armée « allait transformer toutes les caches du Hamas en tas de décombres ».
https://twitter.com/YairWallach/status/1710741623309492249?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1710741623309492249%7Ctwgr%5E3ef8282d5cf18f324b4d0bf19ba0ebe90224461f%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fblogs%2Fmaureen-clare-murphy%2Fhundreds-killed-israel-gaza-after-surprise-resistance-raid
If Putin said this, it would be treated as incontrovertible evidence of genocidal intent. https://t.co/N2Rs9GW3Nd
— Tarik Cyril Amar (@TarikCyrilAmar) October 7, 2023
Toutefois, il semblerait que la capacité de manœuvre d’Israël soit limitée du fait que le Hamas détient un peu partout sur le territoire des douzaines de captifs israéliens.
Saleh al-Arouri, chef adjoint du Hamas, a déclaré que ses combattants avaient capturé suffisamment d’Israéliens pour forcer l’occupant à libérer tous les Palestiniens de ses prisons et centres de détention.
« Ce que nous détenons dans nos mains va libérer tous nos prisonniers »,
a déclaré al-Arouri, en ajoutant que
« leur liberté prenait de plus en plus d’ampleur ».
Israël détient actuellement plus de 5 000 Palestiniens, dont plus d’un cinquième sans accusation ni procès, suite à des ordonnances d’arrestation administrative.
Peu ou pas de résistance israélienne
Daniel Hagari, un porte-parole de l’armée israélienne, a déclaré que des centaines de milliers de réservistes allaient être rappelés.
« Nous sommes en guerre : c’est une situation que nous n’avons plus connue depuis de très nombreuses années »,
a-t-il expliqué.
Et d’ajouter samedi soir qu’un nombre « substantiel » de civils et de soldats israéliens capturés plus tôt dans la journée étaient détenus à Gaza. Des rapports ultérieurs ont indiqué que des étudiants népalais travaillant dans une ferme de la zone de Gaza figuraient parmi les personnes blessées qui avaient été emmenées à Gaza.
Abu Obeida, la porte-parole de l’aile militaire du Hamas a expliqué samedi que le nombre de soldats et d’officiers israéliens tués et capturés et détenus à Gaza était bien plus élevé que ne le croyait Netanyahou et il a mis en garde contre les erreurs de calcul dans les frappes israéliennes de représailles contre Gaza
Itamar Ben-Gvir, le ministre israélien d’extrême droite de la sécurité a proclamé l’état d’urgence civile au niveau national samedi soir et a « accordé aux forces de police israéliennes des pouvoirs significativement accrus », ont rapporté les médias israéliens.
Au cours du raid de samedi, les combattants palestiniens ont pris d’assaut une base militaire israélienne et se sont emparés de plusieurs villes israéliennes à proximité de la frontière de Gaza, « apparemment avec peu de résistance de la part des forces israéliennes », s’il faut en croire les médias israéliens.
The Times of Israel a rapporté que, quelques heures après l’offensive,
« des civils israéliens vivant près de la bande de Gaza continuaient de réclamer de l’aide »
en disant que les tireurs palestiniens ouvraient le feu et emmenaient des prisonniers sans qu’il y ait
« la moindre présence militaire israélienne – ou si peu – dans les rues ».
Il a été dit que certains résidents armés avaient tenté de riposter mais qu’on les avait laissés se débrouiller seuls.
On rapporte également que des tireurs palestiniens s’en sont pris à un festival de musique nocturne en plein air et que des douzaines de jeunes présents ont été signalés manquants. Les premiers rapports mentionnaient d’ailleurs bon nombre de tués.
Une personne présente au festival a déclaré à Haaretz, le quotidien de Tel-Aviv,
« qu’il avait fallu cinq heures avant que l’armée n’arrive et que, pendant ce temps, le public se terrait dans les buissons en compagnie des policiers chargés de la sécurité ».
La marine de guerre israélienne a prétendu avoir tué des douzaines de combattants palestiniens qui tentaient de s’infiltrer en Israël à partir de la côte.
Pendant ce temps, des douzaines de vols vers Tel-Aviv ont été annulés samedi. Air France a même bloqué tous les vols vers la ville « jusqu’à nouvel ordre ».
L’attaque lancée par le Hamas a été condamnée par le secrétaire général des Nations unies et par nombre d’États occidentaux qui arment Israël et qui ont soutenu son siège contre Gaza, lequel a plongé la population de l’enclave dans la pauvreté et le désespoir.
Stéphane Dujarric, porte-parole d’Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a déclaré que
« la violence ne peut fournir une solution au conflit »
et que
« ce n’est que par une négociation menant à une solution à deux États que la paix sera réalisée »
– et ce, en dépit de toutes les preuves indiquant le contraire.
Hamas knows the only language Israel understands is force. They are well aware that violence, taking civilians hostage, etc will be met with condemnation far and wide, but they also know it gives them leverage.
2/2 pic.twitter.com/sAh2GzxxIt
— Tariq Kenney-Shawa (@tksshawa) October 7, 2023
The same goes also for the entirety of the Palestinian people. We don’t want their sympathy, nor do we feel the need to explain our actions anymore. https://t.co/5rsfyTw2Ku
— J. Shawa 🇵🇸 جاسم الشوا (@shawajason) October 7, 2023
Des Palestiniens tués en Cisjordanie
On rapporte que, pendant ce temps, en Cisjordanie, six Palestiniens, dont un enfant, ont été abattus et tués samedi par l’armée israélienne.
Mahmoud Bassem Akhmis, 18 ans, a été touché mortellement à la poitrine à Beit Ummar, près d’Hébron, dans le sud de la Cisjordanie.
Yusif Nadir Suleiman Idris, 19 ans, a été tué par des militaires à Hébron, après avoir été touché lui aussi à la poitrine.
Ahmad Abd al-Nasr Rabi, 12 ans, a lui été blessé au corps et tué lors d’une manifestation de soutien à Gaza organisée à Qalqilya, dans le nord de la Cisjordanie.
Israeli forces shot and killed 12-year-old Ahmad Abdulnaser Adnan Rabi today around 7 p.m. near Qalqilya in the northern occupied West Bank during a demonstration in solidarity with Palestinians in Gaza. Ahmad sustained a gunshot wound to the waist. pic.twitter.com/Rteb0IxfcY
— Defense for Children (@DCIPalestine) October 7, 2023
Les forces israéliennes ont abattu et tué Amro Yusif Ibrahim Abed d’une balle dans la tête au cours de confrontations à al-Bireh, près de Ramallah, le siège de l’Autorité palestinienne Cisjordanie.
À Jéricho, dans la vallée du Jourdain, en Cisjordanie, les forces israéliennes ont abattu et tué Karam Nasser al-Aidi, 22 ans, d’une balle dans la tête.
Muhammad Awad Jarbua, 24 ans, a été abattu et tué à al-Lubban al-Gharbi, une localité située à proximité de Ramallah.
La Société du Croissant-Rouge palestinien a déclaré que ses équipes d’ambulanciers avaient opéré 80 interventions en Cisjordanie ce samedi, dont 24 personnes blessés à balles réelles.
8 pm update: @PalestineRCS crews dealt with 80 casualties in the West Bank.
📌24 injuries by live ammunition.
📌6 injuries with rubber bullets.
📌 44 cases of tear gas canisters
📌3 shrapnel injuries
📌Two cases of assault and beating
📌1 case of Knife stab wound— PRCS (@PalestineRCS) October 7, 2023
Des colons ont attaqué des communautés palestiniennes en Cisjordanie, en tentant de déclencher des incendies. On rapporte qu’ils ont également poignardé un jeune homme.
Quatre Palestiniens avaient déjà été abattus et tués en Cisjordanie plus tôt cette semaine.
Selon WAFA, l’agence de presse officielle palestinienne, Labib Muhammad Labib Dumeidi, 19 ans, a été touché à la poitrine et tué vendredi au cours d’une attaque des colons à Huwwara, une ville située à proximité de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie.
On rapporte la mort d’un autre Palestinien à Huwwara également, le même jour, après qu’il aurait prétendument ouvert le feu sur des colons.
Jeudi, deux combattants palestiniens ont été tués par l’armée lors d’un raid dans le village de Shufa, près de Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie.
Avant samedi, plus de 240 Palestiniens avaient été tués par la police, l’armée et les civils palestiniens armés depuis le début de l’année, selon les calculs de The Electronic Intifada. Ce chiffre comprend les personnes décédées suite à des blessures subies antérieurement.
Trente-cinq personnes en Israël ainsi que des Israéliens et autres ressortissants présents en Cisjordanie ont été tués au cours de ce qu’Israël qualifie d’attaques palestiniennes, durant l’année 2023 – avant ce samedi – ou sont décédées de blessures antérieures.
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Maureen Clare Murphy est rédactrice en chef de The Electronic Intifada.
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Publié le 8 octobre 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine