La diffamation ne doit pas dissuader les étudiants d’agir contre le génocide

Emma Hallali, la présidente de l’UEEJ, l’Union européenne des Étudiants juifs, a prétendu dernièrement que les protestations de solidarité avec la Palestine dans les universités rendaient toute « vie estudiantine normale » impossible pour les juifs.

 

Les étudiants de SciencesPo à Paris ont à tout le moins contrarié l'élite politique française en protestant contre le génocide de Gaza.

Les étudiants de SciencesPo à Paris ont à tout le moins contrarié l’élite politique française en protestant contre le génocide de Gaza. (Photo : Houpline-Renard / SIPA)

 

David Cronin, 30 avril 2024

Le Ciel a interdit aux étudiants de sécher les cours pour tenter de faire cesser un génocide.

Voilà le genre de message qu’envoie l’élite politique française, horrifiée qu’il y ait eu des protestations de solidarité avec les Palestiniens à SciencesPo, une faculté bien connue de l’Université de Paris.

Craignant sans nul doute que ces protestations ne se propagent, les partisans d’Israël prétendent qu’elles sont sous-tendues par une arrière-pensée.

Comme l’Union européenne des Étudiants juifs (UEEJ) se situe aux avant-postes dans les efforts en vue de calomnier les protestataires, un examen de la politique et de la philosophie – pour autant que ce mot convienne – de l’organisation s’impose.

Loin de se consacrer à empêcher le sectarisme, l’UEEJ se définit comme sioniste. Elle est par conséquent accrochée à l’idéologie qui sous-tend la dépossession des Palestiniens dans les années 1940 et le génocide perpétré contre eux en ce moment même.

L’UEEJ a trahi son véritable agenda dans le résumé d’une discussion récente qu’elle a eue avec d’autres organisations de lobbying pro-israélien. Ce résumé a prouvé que l’une de ses principales préoccupations était l’antisionisme dans les universités.

 

 

Du fait que le sionisme s’appuie sur le fait d’accorder aux Palestiniens un statut inférieur à celui des Juifs israéliens, s’opposer au sionisme est un devoir pour toute personne réellement préoccupée par la justice et l’égalité.

L’antisionisme est totalement distinct de l’antisémitisme – la haine des juifs s’appuyant sur leur religion ou leur ethnicité.

Il est essentiel d’être clair sur les différences entre l’antisionisme et l’antisémitisme, d’autant plus que les organisations telles que l’UEEJ prétendent que ce sont des synonymes.

 

Emma Hallali, la présidente de l’UEEJ, a prétendu dernièrement que les protestations de solidarité avec la Palestine dans les universités rendaient toute « vie estudiantine normale » impossible pour les juifs.

 

Prétendre que l’objectif caché des protestations est de transformer les campus en environnement hostile aux juifs doit être dénoncé comme malhonnête.

 

Un jeu sinistre

 

Alors que les protestations visent à faire cesser le génocide à Gaza, l’UEEJ joue un jeu sinistre en insistant sur le fait que tout juif qui se respecte doit prendre fait et cause pour Israël, l’État même qui perpètre ce génocide.

En janvier, l’UEEJ a sorti une déclaration critiquant des organisations comme Jewish Voice for Peace (Voix juive pour la paix).

 

La déclaration prétendait que les actions de ces groupes « risquaient de perpétuer des stéréotypes préjudiciables et des conceptions erronées à propos de la communauté juive, lesquels allaient se traduire par une intensification des préjudices et des discriminations ».

C’est en fait l’opposé qui se produit.

Les organisations antisionistes juives prouvent que la communauté juive n’est pas monolithique. Un nombre significatif de juifs sont indignés par les crimes d’Israël et déterminés à s’exprimer contre ces crimes mêmes.

Si quelqu’un perpétue des stéréotypes préjudiciables, c’est bien l’UEEJ et sa suggestion disant que les seuls juifs qui devraient être écoutés sont ceux qui soutiennent Israël.

De façon scandaleuse, l’Union européenne traite l’UEEJ comme étant représentative de tous les étudiants juifs.

L’UEEJ a reçu près de 900 000 dollars de subventions de la part de l’UE, en 2022.

L’UEEJ profite de relations particulièrement étroites avec Katharina von Schnurbein, la coordinatrice de l’UE contre l’antisémitisme.

 

Bien que la description du boulot officiel de von Schnurbein ne mentionne pas une seule fois Israël, elle agit comme propagandiste au profit d’Israël.

Elle a largement amplifié le mensonge disant que le Hamas avait commis des viols massifs le 7 octobre et les jours suivants. Ce bobard est utilisé comme prétexte au génocide qu’Israël perpètre à Gaza.

Von Schnurbein a déclaré dernièrement qu’il y avait actuellement « un tsunami d’antisémitisme » en Europe.

 

Son choix verbal devrait être remis en question. Très fréquemment, von Schnurbein confond l’antipathie envers le sionisme et la haine envers les juifs.

Von Schnurbein s’est plainte récemment de ce qu’une conférence à propos des prochaines élections au Parlement européen « avait été piratée de telle façon que les juifs ne se sentaient plus en sécurité ».

 

Ses doléances s’appuyaient sur la façon dont le slogan « Free Palestine » était scandé et sur le fait que la délégation de l’UEEJ était décrite comme « fasciste » par certains participants à la conférence. La vidéo de l’incident telle que postée par l’UEEJ n’indique pas qu’il y ait eu la moindre menace contre la sécurité de sa délégation à la conférence.

En lieu et place, la vidéo montre que l’UEEJ a cherché à noyer une discussion sur la situation à Gaza, même s’il s’agit d’une urgence.

 

Ce que voudrait l’UEEJ, c’est que les étudiants restent silencieux quand les Palestiniens se font massacrer, ou qu’ils applaudissent benoîtement Israël, l’État qui perpètre ce massacre.

Heureusement, les jeunes – et nombre de moins jeunes – des deux côtés de l’Atlantique refusent de se faire harceler ou intimider par les partisans d’Israël. La contestation déployée sur les campus est une source d’espoir en ces temps particulièrement sinistres.

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David Cronin est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Europe Israël : Une alliance contre-nature (Ed. La Guillotine – 2013) et  Europe’s Alliance With Israel: Aiding the Occupation (Pluto Press, 2011 – L’Alliance de l’Europe avec Israël contribue à l’occupation). Il a participé à la rédaction du rapport “The israeli lobby and the European Union”. 
Son dernier livre est : Balfour’s Shadow: A Century of British Support for Zionism and Israel (Pluto Press – Londres 2017).

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Publié le 30 avril 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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