La question qui empêche l’ennemi de dormir : <em>Quid</em>, si Nasrallah passe à l’action ?
De même que l’ennemi a été incapable d’anticiper le Déluge (*), il a également échoué dans son évaluation du front libanais, puisque le Hezbollah a fait son entrée sur le front des combats le 8 octobre 2023.
Khaled Barakat, 20 juin 2024
Conjointement à l’escalade des confrontations à la frontière nord de la Palestine occupée, au succès exceptionnel du vol historique du drone Hodhod au-dessus des sites ennemis sensibles en Palestine et à l’échec du régime sioniste dans l’accomplissement de ses objectifs dans la bande de Gaza, et ce, malgré toute cette dévastation génocidaire, la confusion de l’entité sioniste et de ses généraux s’intensifie également en même temps que leurs questions à propos de la direction de la guerre et de leur sort.
Récemment, le rapport « israélien » de 2022 sur la sécurité examinait en détail « des scénarios de guerre à venir avec le Hezbollah », dont tous se sont infirmés, pendant que le Hezbollah lui-même se muait en un cauchemar imminent menaçant l’existence de l’entité sioniste ainsi que les projets de ses alliés et les régimes de normalisation.
Toutes les évaluations de l’ennemi disaient que ce qui s’est passé à l’aube du 7 octobre 2023 n’aurait pu venir que de la frontière libanaise et non pas de la « bande de Gaza » opprimée, comme l’imaginait l’ennemi.
C’était une conclusion très logique, étant donné les événements à proximité de la frontière palestino-libanaise avant la grande explosion du Déluge Al-Aqsa.
De même que l’ennemi a été incapable d’anticiper le Déluge (*), il a également échoué dans son évaluation du front libanais, puisque le Hezbollah a fait son entrée sur le front des combats le 8 octobre 2023.
Les démarches entreprises par la résistance libanaise ont été des décisions stratégiques précises, d’un genre particulier. La chose est confirmée par les résultats auxquels nous avons assisté, quand la résistance libanaise a accablé le régime sioniste, son armée et ses colons, soutenu la résistance palestinienne, privé l’ennemi et ses alliés de nombre d’initiatives et de tactiques et constitué un bouclier et un front afin de protéger le Liban.
En outre, elle a préparé la voie à l’entrée progressive des forces du camp de la résistance dans la bataille. Elle a déplacé le mot d’ordre de l’unité des fronts de résistance de la sphère politique vers le terrain même de la confrontation directe.
L’ennemi est bien conscient de ce que signifie entrer en confrontation totale avec le Hezbollah et il se rend compte de l’ampleur des pertes humaines, matérielles, économiques et militaires qui en découleront.
Toutes les « faiblesses fatales ont été révélées et Nasrallah n’hésitera pas à les frapper durement », disent les sionistes.
Tout ceci est devenu une conviction américaine, israélienne et européenne. Ce n’est un secret en aucun cas, puisque Sayyed Nasrallah tient à rappeler aux sionistes où se situent leurs points faibles, même s’il se contente parfois de les résumer par ces simples mots : Gush Dan (la plus grande conurbation et zone métropolitaine de l’entité sioniste). (NDLR : la métropole de Tel Aviv)
La capacité du Hezbollah de diriger des frappes concentrées de missiles sur le secteur électrique, sur les sites de désalinisation de l’eau, sur les ports de l’ennemi (en particulier sur le port de Haïfa), sur les aéroports militaires et civils, sur les plates-formes gazières, sur les sites de stockage d’ammoniac et de produits chimiques et sur d’autres équipements stratégiques ne serait pas similaire aux effets de telles frappes dans aucun autre pays.
L’entité sioniste constitue une « île chargée d’électricité » et sa société dépend de l’énergie dans tous les aspects de ses sites, et elle n’a pas une profondeur stratégique dans la région. Il sera très malaisé pour l’entité sioniste d’affronter le Hezbollah sans une telle profondeur géographique et en l’absence d’alternatives rapides et déjà prêtes à ces services essentiels. Ce qui a toujours été perçu comme un « avantage d’Israël » – son niveau élevé de technologie militaire et civile – s’est mué en une grave faiblesse.
La réalité a changé : le Hezbollah qui combattait en juillet 2006 n’est plus le même parti en 2024, en termes de capacités, de planning, d’expérience et d’armement.
L’ennemi battu à Gaza et isolé au niveau international n’est plus le même non plus. Nous devons également comparer l’esprit du berceau populaire de la résistance, comparé à l’état de division et d’incertitude qui règne dans la société ennemie.
Depuis 2006, le Hezbollah n’a cessé de combattre et de se préparer, ajoutant à son arsenal au moins dix ans d’expérience des champs de bataille dans des arènes multiples, où il est allé volontairement ou sous la sévère nécessité de l’urgence, et ses forces ont livré des combats dans les vallées, les déserts et les montagnes les plus hostiles, dans des circonstances difficiles et très éprouvantes.
Les centres de recherche de l’ennemi « israélien » disent que le Hezbollah dispose de 150 000 missiles et missiles de précision, de 65 000 missiles d’une portée d’au moins 80 kilomètres, de 5 000 missiles d’une portée de 80 à 200 kilomètres, de 5 000 autres d’une portée de 200 kilomètres et plus, de 2 500 drones, de centaines d’armes sophistiquées et autres encore, et ils concluent en disant : le puissance de feu du Hezbollah consiste à pouvoir lancer 4 000 missiles au cours d’une journée normale de combat !
Le régime sioniste s’est empressé d’étudier ce qui s’est passé en Ukraine après que les forces russes ont utilisé des drones de combat de fabrication iranienne, et il a vu les résultats de ce qu’y ont subi les secteurs de l’électricité et de l’énergie. Dans le cas de l’Ukraine, l’Europe est toujours présente pour apporter une profondeur géographique et une connexion avec les réseaux de livraison et d’énergie, mais l’entité sioniste ne trouvera rien d’un tel niveau de soutien dans son environnement direct. Aucun parti ne sera à même de sauver « Israël ».
Selon le Wall Street Journal, l’ennemi sioniste avait déjà décidé de lancer une attaque massive contre le Liban le 11 octobre 2023 et un message urgent était arrivé à la Maison-Blanche, dans lequel Netanyahou demandait le feu vert pour enclencher une attaque destinée à « dissuader les forces du Hezbollah qui se préparaient à passer la frontière ».
Que ces informations publiées par le Wall Street Journal soient vraies ou fausses, la guerre contre le Liban – comme on le sait très bien – n’aura pas lieu sans l’approbation des EU. Toutefois, la réponse rapportée fut rapide : un rejet du plan « israélien », considéré comme un risque aux conséquences non calculées et sévères.
En dépit de ce qu’on peut dire des rebuts de la politique libanaise, le front interne, malgré ses erreurs, présente plus de cohésion que le front ennemi en train de s’effondrer et que Netanyahou est occupé à recoudre avec du fil et une aiguille. Ce n’est plus un secret pour personne que les forces ennemies, et plus particulièrement ce qu’on appelle les « unités d’élite » vivent leurs pires conditions tant au combat que sur le plan moral après avoir été épuisées par la résistance dans la bande de Gaza au cours des neuf derniers mois.
Il n’y a pas que le pouvoir dissuasif de l’ennemi à s’être érodé, mais aussi sa capacité à avoir une vision claire et à élaborer des plans.
La guerre contre le Liban, si elle a lieu, ne sauvera pas l’économie de l’entité sioniste ; elle ne brisera pas son isolement ni ne facilitera son « intégration » dans la région, mais elle pourrait bien se muer en une longue guerre d’usure en faveur de l’armée de la résistance libanaise, décrite par la plupart des experts militaires comme la plus forte des armées irrégulières du monde.
Finalement, les dirigeants ennemis n’ont pas oublié la menace exprimée par Sayyed Hassan Nasrallah en février 2011 quand il s’est adressé aux combattants de la résistance du Liban, en disant :
« Préparez-vous pour le jour où la guerre serait imposée au Liban : Les chefs de la résistance pourraient vous demander d’assurer la sécurité de la Galilée, en d’autres termes, de libérer la Galilée. »
Ces mots très, très précis résonnent à nouveau dans les têtes des dirigeants ennemis et leurs échos sont perçus à Washington, Paris, Berlin, Londres et ailleurs et leur réponse ne consiste qu’en une question : Quid, si Nasrallah passe à l’action ?
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Ce texte a été publié initialement dans le journal libanais Al-Akhbar. Khaled Barakat est un écrivain palestinien, membre du Comité exécutif de Masar Badil, le Mouvement palestinien de la voie révolutionnaire alternative.
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Publié le 20 juin 2024 sur Masar Badil
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine
(*) L’opération Déluge al-Aqsa
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