La terre combat, elle aussi

Le poème « La terre combat, elle aussi » reflète les dures réalités qu’il nous faut affronter pendant le génocide en cours à Gaza.

 

La terre combat, elle aussi. Photo : La beauté naturelle de Gaza finit toujours par ressurgir au milieu de la destruction semée par l'armée israélienne.

La beauté naturelle de Gaza finit toujours par ressurgir au milieu de la destruction semée par l’armée israélienne. (Photo : Omar Ashtawy / APA images)

 

Nour Khalil Abu Shammala, 5 août 2024

 

J’ai longtemps compté sur l’écrit comme moyen d’exprimer mes sentiments et mes expériences et ç’a été ma façon de communiquer avec autrui. Ce poème reflète les dures réalités qu’il nous faut affronter pendant le génocide en cours à Gaza.

Après avoir vécu sept mois sous une tente dans le secteur sud, du fait de la « perte », lors de l’offensive israélienne, de notre maison dans la ville de Gaza et de notre maison familiale dans le camp de réfugiés de Khan Younis, mon père a décidé de cultiver la terre en tant que forme de résilience et d’appartenance.

Cet effort visait également à fournir quelques récoltes au milieu du blocus imposé par l’occupation israélienne, qui restreint notre accès aux denrées alimentaires essentielles. Nous avons fait pousser des poivrons, des tomates, des aubergines, de la roquette, des gombos, de la molokhia (corète potagère ou feuilles de jute) et des pastèques à proximité de notre tente. La menthe et le basilic, profondément liés à l’essence de notre terre, sont indispensables dans nos menus.

Un jeune homme appelé Mohammed Hammad cultive la terre dans le nord de Gaza en dépit des graves pénuries d’eau et du danger permanent, et il distribue ce qu’il récolte aux personnes dans le besoin.

Cette résilience a également inspiré mon poème et elle prouve bien que la terre combat parmi nous en refusant de succomber à la destruction, de même que nous continuons de la cultiver parmi les ruines de nos martyrs.

 

La terre combat, elle aussi

 

La terre donne ses fruits,
elle défie le siège et la faim,

elle défie l’occupation.

Les tomates germent,
et les poivrons, les aubergines,
malgré l’eau coupée,

malgré les obus interdits.

 

Vont et viennent

des effluves de menthe et de basilic,
le parfum de la patrie
dans une terre de paix.

Malgré la chaleur de la tente,
le déplacement des enfants
et la perte des rêves,
la terre donne ses fruits,
elle nourrit ses enfants
au nord comme au sud
et refuse que nous mourions de faim.

La terre produit des légumes
et des fruits
arrosés du sang des martyrs.

Elle combat à l’aide de son sol,
qui garde les restes des guerriers
toujours fermes malgré la mort,
quand ils défient les armes,
quand ils défient l’acier.

Notre peuple plante et mange
ce que lui donne le sol de notre terre.
La terre combat côte à côte
aux côtés de sa mer

et de ses braves qui résistent.

Elle cultive la patience,
apaise la faim des enfants,
lisse les larmes des mères
et allège le fardeau des hommes.

Il n’y a qu’à Gaza
que la terre combat aux côtés de son peuple.

 

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Nour Khalil Abu Shammala est avocate en formation à Gaza.

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Publié le 5 août 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

 

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