Israël tue des journalistes et menace les hôpitaux du nord de Gaza

Ces quatre derniers jours, dans le nord de Gaza, les forces israéliennes ont imposé un siège au camp de réfugiés de Jabaliya, ont décrété des ordres d’évacuation forcée et ont entouré le camp de chars et de quadricoptères armés.

 

8 octobre 2024. Des Palestiniens examinent les dégâts provoqués la nuit précédente par une frappe de l'aviation israélienne contre le camp de réfugiés de Bureij, dans le centre de la bande de Gaza.

8 octobre 2024. Des Palestiniens examinent les dégâts provoqués la nuit précédente par une frappe de l’aviation israélienne contre le camp de réfugiés de Bureij, dans le centre de la bande de Gaza. (Photo : Omar Ashtawy / APA images)

 

Nora Barrows-Friedman, 9 octobre 2024

Le texte qui suit est un condensé des actualités proposées dans notre livestream du 9 octobre. Vous pouvez visionnez la totalité de l’émission (en anglais) ici.

Cette semaine, à Gaza, Israël a perpétré une série de massacres dans les régions du nord et du centre, ciblant des abris dans les écoles et des tentes de personnes déplacées.

Ces quatre derniers jours, dans le nord de la bande de Gaza, les forces israéliennes ont imposé un siège au camp de réfugiés de Jabaliya, ont décrété des ordres d’évacuation forcée et ont entouré le camp de chars et de quadricoptères armés.

Mercredi, au moins 10 Palestiniens ont été tués au moment où les forces israéliennes bombardaient des tentes de personnes déplacées à Jabaliya.

 

Bombardement des tentes de personnes déplacées à Jabaliya, dans le nord de Gaza

Bombardement des tentes de personnes déplacées à Jabaliya, dans le nord de Gaza

 

Le reporter d’Al Jazeera Tareq Abu Azzoum a déclaré mardi que l’armée israélienne

« s’employait systématiquement à vider le nord de Gaza ».

De son côté, le journaliste Hossam Shabat a rapporté que, lorsque des gens ont tenté de quitter Jabaliya, ils ont été abattus par des snipers israéliens.

Mahmoud Shalha, en reportage à Jabaliya mardi, a réalisé cette prise de vue d’un quadricoptère en train de tirer à l’intérieur du camp de Jabaliya.

L’armée israélienne a ordonné l’évacuation de l’hôpital al-Awda, de l’Hôpital indonésien et de l’hôpital Kamal Adwan, qui figurent parmi les rares sites médicaux encore partiellement opérationnels dans le nord de Gaza.

Mardi, Abed Zwidie, un autre journaliste opérant dans le nord, a rapporté depuis l’hôpital Kamal Adwan que l’armée assiégeait le site médical qui avait déjà été envahi de morts et de blessés à la suite des récentes attaques israéliennes.

Le Dr Hussam Abu Safia, directeur de l’hôpital Kamal Adwan, a expliqué que son personnel allait braver les ordres d’évacuation.

Il a déclaré à Al Jazeera :

« Nous avons des bébés et des nouveau-nés en USI. Même si nous pouvons évacuer quelques patients, nous ne pouvons quitter l’hôpital parce qu’il n’y en a pas d’autre à même de proposer des services et des traitements pour les enfants, en dehors de l’hôpital Kamal Adwan. »

Un médecin de l’Hôpital indonésien a dit mercredi matin que

« ces deux derniers jours, la route menant à l’hôpital a été bloquée et il nous a été impossible de l’atteindre. Aujourd’hui, l’hôpital a été menacé : ou on l’évacue, ou il est bombardé. Nombre de mes collègues médecins sont coincés à l’intérieur, incapables de s’en aller puisque les drones quadricoptères ciblent le moindre mouvement aux abords de l’hôpital. »

Plus de 40 Palestiniens ont été tués dans la seule journée du mardi, selon des sources médicales palestiniennes.

Lundi, Israël a attaqué la ville de Gaza, ciblant des immeubles résidentiels, a rapporté le journaliste Ibrahim al-Khalili.

Attaques contre la partie centrale de Gaza
Lundi, les forces israéliennes ont attaqué des tentes de personnes déplacées dans le camp de réfugiés d’al-Bureij, dans le centre de Gaza.

Attaques des tentes de personnes déplacées dans le camp de réfugiés d'al-Bureij, dans le centre de Gaza.

Attaques des tentes de personnes déplacées dans le camp de réfugiés d’al-Bureij, dans le centre de Gaza.

 

Certaines zones de la partie centrale de Gaza ont été attaquées à maintes reprises, la semaine dernière, y compris par plusieurs frappes consécutives de missiles, très tôt, samedi à Deir al-Balah, contre la mosquée des Martyrs d’al-Aqsa et contre l’école Ibn Rushid transformée en refuge pour des milliers de Palestiniens déplacés.

Au moins 26 personnes ont été tuées dans ces deux attaques et plus de 90 autres ont été blessées.

Mardi, à Rafah, huit Palestiniens ont été tués au moment où un drone israélien a bombardé des gens rassemblés pour puiser de l’eau à une station de remplissage, fait savoir l’agence palestinienne d’information Wafa.

 

Des journalistes abattus par balles

Ces quatre derniers jours, Israël a tué deux journalistes, pourtant le nombre des reporters et travailleurs des médias assassinés à au moins 175 depuis octobre 2023.

Hasan Hamad était un journaliste de 19 ans qui travaillait pour Al Jazeera et d’autres médias. Il a été tué lors d’une frappe de l’aviation israélienne contre sa maison dans le camp de réfugiés de Jabaliya, dans le nord de Gaza, et ce, quelques jours après avoir été averti par un officier israélien d’avoir à cesser de filmer à Gaza, a fait savoir Al Jazeera.

 

Hassan Hamad

Hassan Hamad

 

Ses amis et collègues ont transporté ses restes dans des sacs en plastique, en même temps que son gilet pare-balles affichant le mot « Presse ».

Mercredi, Israël a ciblé un groupe de journalistes qui couvraient le siège en cours du camp de Jabaliya.

 

Le reporter Anas al-Sharif a déclaré que le cameraman d’Al-Aqsa TV, Mohammad al-Tanani, avait été tué et que le correspondant Tamer Labad avait été blessé. De son côté, le cameraman d’Al Jazeera Fadi al-Wahidi a été blessé lui aussi d’une balle dans le cou.

 

Fadi al-Wahidi

 

 

Une année de « crimes on ne peut plus graves »

Cette semaine, l’organisation basée à Genève, Euro-Med Human Rights Monitor (Euro-Med) a publié un rapport répertoriant

« les crimes les plus graves commis au cours des 12 mois écoulés ».

Depuis le début du génocide d’Israël, il y a un an, ont estime que 10 pour 100 de la population de Gaza a été tuée, blessée, portée manquante ou arrêtée à la suite des offensives de l’armée israélienne.

Cette dernière emploie des méthodes explicites destinées à infliger de sévères traumatismes physiques et psychologiques à la population, explique Euro-Med. +

« Ils comprennent le lancement de milliers d’attaques militaires systématiques contre les civils, lesquelles augmentent considérablement les décès parmi les gens en âge de se reproduire, disséminent les familles, ciblent le système des soins de santé et imposent à la population des conditions de vie brutales marquées par l’affamement et la malnutrition »,

ajoute l’organisation.

« L’obstruction de l’aide humanitaire ne fait qu’exacerber ces atrocités en créant des situations menaçantes pour l’existence de milliers de personnes. »

L’organisation internationale d’aide, Oxfam, a déclaré cette semaine que l’armée israélienne avait tué à Gaza plus de femmes et d’enfants au cours de l’année écoulée qu’il n’y avait eu de tués dans toute période équivalente de n’importe quel autre conflit des deux décennies écoulées.

Les rapports, dont l’organisation dit qu’ils sont loin d’être complets, montrent que les engins explosifs israéliens frappent en moyenne des blocs de logements toutes les quatre heures, des tentes et des abris temporaires toutes les 17 heures, des écoles et des hôpitaux tous les quatre jours et des points de distribution et entrepôts tous les 15 jours.

En même temps, Euro-Med déclare que les forces israéliennes se sont employées à éliminer près de 80 pour 100 des terres agricoles de la bande de Gaza et d’en priver ainsi les Palestiniens.

L’organisation dit qu’Israël l’a fait

« en isolant ces terres en guise de préparation de son annexion forcée à ce qu’on appelle la ‘zone tampon’, ou en les nivelant au bulldozer, ou encore en les détruisant par d’autres moyens, tels les bombardements – et, dans chaque cas, en complète violation des lois internationales ».

Selon l’équipe d’Euro-Med sur le terrain, les forces israéliennes en envahi la zone d’Al-Shimma, à Beit Lahiya, dans le nord de Gaza, voici exactement deux semaines.

« Accompagnées par des bulldozers de l’armée, les troupes ont entamé leurs opérations de ‘nivelage’, détruisant plus de 500 dounums (50 hectares) de terre agricole nouvellement replantée et qui était censée subvenir aux besoins des gens du nord de Gaza, qui sont soumis par Israël à un siège arbitraire et à un affamement systématique »,

déclare l’organisation.

Entre-temps, le ministère palestinien de la santé à Gaza a rapporté cette semaine qu’environ un millier de travailleurs de la santé avaient été tués depuis octobre dernier et que la moitié à peine des hôpitaux de Gaza étaient encore opérationnels, et seulement en partie.

L’Organisation mondiale de la Santé estime que, depuis octobre 2023, il y a eu au moins 516 attaques contre les soins de santé à Gaza.

Israël a également empêché l’entrée à Gaza de médicaments essentiels et de fournitures médicales de première importance, ce qui a considérablement appauvri les stocks.

Cette semaine, Healthcare Workers Watch a publié un rapport montrant que 105 médecins importants ont été tués ou arrêtés par l’armée israélienne ces 12 derniers mois, ce qui représente 23 pour 100 des médecins les plus expérimentés de l’enclave.

Cette semaine, The Electronic Intifada a publié un article écrit par Rasha Abou Jalal, qui décrit comment son beau-frère, Yazan Younis, a tenté d’accéder à des soins de santé élémentaires au moment où Israël continue de décimer les infrastructures de la santé à Gaza.

Rasha Abou Jalal a encore dit :

« D’après le Dr Abdul Latif al-Hajj, du ministère de la santé, il y a un demi-million d’interventions médicales reportées, sur la liste d’attente des hôpitaux de Gaza. »

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Publié le 6 octobre 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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