Israël intensifie ses frappes aériennes juste avant le cessez-le-feu
À l’approche de l’annonce du cessez-le-feu et au cours des heures qui ont suivi, Israël a poursuivi ses massacres et sa campagne de destruction intensive dans toute la bande de Gaza.
Nora Barrows-Friedman, 17 janvier 2025
Le texte qui suit provient de la synthèse de l’actualité proposée au cours du livestream du 16 janvier 2025. Visionnez la totalité de l’épisode (en anglais) ici.
« Plus on entend parler d’un potentiel accord de cessez-le-feu, plus la fréquence des attaques est élevée, plus il y a de familles ciblées et anéanties »,
a rapporté Hani Mahmoud pour Al Jazeera.
Une soixantaine de Palestiniens ont été tués dans une série d’attaques quelques heures à peine avant que l’accord ne soit dégagé.
La défense civile de Gaza a déclaré que l’armée israélienne avait intensifié ses bombardements sur la ville de Gaza dès l’annonce du cessez-le-feu.
Aux premières heures de jeudi, le journaliste Anas Al-Sharif rapportait que 30 Palestiniens, dont des enfants, avaient été tués à Gaza quelques heures après l’annonce de l’accord de cessez-le-feu.
« L’armée d’occupation israélienne a étouffé cette joie (…) Israël ne veut pas que les enfants, les femmes et les familles qui ont subi cette guerre au cours de la période écoulée puissent vivre en paix, dans la sécurité et le bonheur »,
a-t-il ajouté.
Les attaques se sont poursuivies. Le ministère palestinien de la santé à Gaza a déclaré jeudi que, depuis l’annonce de l’accord de cessez-le-feu, 72 personnes avaient été tuées.
Très tôt, mercredi matin, Israël a bombardé une maison à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, tuant au moins 12 personnes, dont un garçonnet de 7 ans et trois adolescents, rapporte la défense civile palestinienne.
Israël a également bombardé une école servant de refuge à Gaza même, ainsi qu’une maison du camp de réfugiés d’al-Bureij.
Lundi 13 janvier, une série de frappes israéliennes ont tué au moins 33 Palestiniens dans l’enclave, frappes parmi lesquelles figuraient sept attaques séparées contre des Palestiniens à Gaza même.
Le 14 janvier, Israël a bombardé un magasin le long de la route côtière, à Deir al-Balah, ce qui a provoqué un énorme incendie qui, attisé par les puissants vents maritimes, s’est rapidement propagé et a englouti des campements de fortune de personnes déplacées, ont expliqué les Nations unies.
Il n’a été fait état d’aucune victime, mais 67 familles ont perdu tous leurs biens, suite à la destruction de leurs tentes par le feu.
Mercredi, l’armée israélienne a ordonné la poursuite des déplacements forcés à Jabaliya, dans le nord de Gaza.
Le bureau gouvernemental des médias de Gaza a déclaré le 12 janvier que 100 jours s’étaient écoulés depuis l’entame par Israël de sa campagne de destruction et de massacre dans le nord. Quelque 5 000 Palestiniens ont été tués ou portés manquants, 9 500 ont été blessés et 2 600 enlevés.
« Au cours de ces cent jours, notre peuple palestinien dans le nord de Gaza a subi les formes les plus odieuses de tueries, de nettoyage ethnique, de destruction et de déplacement »,
a déclaré le bureau des médias.
« La destruction des maisons, des hôpitaux, des installations et infrastructures publiques montre bien l’intention de l’occupation israélienne d’éliminer délibérément et systématiquement les fondements de la vie dans la bande de Gaza, en provoquant une crise humanitaire profonde qui exacerbe la souffrance de notre honorable peuple palestinien. »
Le bureau des médias d’ajouter :
« Nous affirmons que notre peuple palestinien restera déterminé face à cette agression brutale et que l’occupation ne parviendra pas à déplacer notre peuple et à le priver de ses droits. Ces crimes ne feront qu’accroître la détermination de notre peuple palestinien à obtenir ses droits légitimes et à regagner les terres qu’on leur a volées. »
Les hôpitaux sous attaque
L’organisation humanitaire Relief International (Secours international) rapportait le 10 janvier que l’hôpital Al-Awda de Jabaliya, le dernier hôpital fonctionnant encore (à grand peine) dans le nord, s’est retrouvé sous une attaque directe des forces d’occupation israéliennes.
L’hôpital a reçu des ordres d’évacuation immédiate au début de ce mois et Relief International a déclaré que, depuis lors, l’hôpital attend l’autorisation pour une évacuation en toute sécurité de ses patients vers la ville de Gaza. L’autorisation, toutefois, n’a pas été accordée.
Un correspondant d’Al Jazeera a déclaré le 15 janvier que des bulldozers israéliens avaient commencé à raser la partie est de l’hôpital indonésien, qui a été totalement mis hors service le mois dernier.
Les Nations unies rapportent que ses partenaires pour la santé
« mettent en garde contre de graves pénuries de carburant, ce qui fait courir d’énormes risques aux services essentiels. Selon les partenaires, tous les hôpitaux qui sont toujours en état de fonctionnement (très partiel) ont épuisé leurs réserves de carburant. Ils doivent compter désormais sur des livraisons de carburant au coup par coup, chaque jour, pour tenter de maintenir en état de fonctionnement les services les plus importants ».
Nous poursuivons notre compte rendu avec l’enlèvement par Israël et la disparition qui s’en est suivie du Dr Hussam Abu Safiya, le directeur de l’hôpital Kamal Adwan Hospital à Beit Lahiya, dans le nord de Gaza. L’hôpital a été encerclé et détruit par les forces israéliennes le 27 décembre, après plus de 80 jours d’attaques incessantes du fait que ses médecins refusaient d’abandonner leurs patients et leur personnel.
Al Mezan, une organisation des droits humains, a annoncé mercredi qu’elle confirmait qu’Israël avait transféré le Dr Abu Safiya à la prison militaire d’Ofer le 9 janvier. Les autorités israéliennes continueront d’empêcher le Dr Abu Safiya de rencontrer un avocat d’Al Mezan jusqu’au 22 janvier.
L’American Academy of Pediatrics (Académie américaine de pédiatrie, AAP), représentant des dizaines de milliers de pédiatres et de spécialistes en pédiatrie, a demandé que le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, s’emploie à la libération immédiate du Dr Abu Safiya, pédiatre lui aussi.
L’AAP avait été mise sous pression par des organisations comme Doctors Against Genocide (Docteurs contre le génocide) qui avait demandé à l’institution de prendre position afin de mettre un terme au génocide de Gaza et de libérer un confrère pédiatre ainsi qu’un très grand nombre d’autres médecins palestiniens en détention illégale en Israël.
Six journalistes tués
Israël a tué six journalistes à Gaza cette dernière semaine, portant à 208 le nombre de journalistes et de travailleurs des médias tués depuis octobre 2023.
Le 10 janvier, Saed Sabry Nabhan, un photojournaliste pour la chaîne par satellite Al-Ghad, a été tué par un sniper israélien dans le camp de réfugiés de Nuseirat, a fait savoir le bureau gouvernemental des médias de Gaza.
Le 13 janvier, Muhammad Bashir al-Talmas, un rédacteur en chef de Safa, une agence de presse palestinienne, est mort après avoir encouru de graves blessures lors d’une frappe de l’aviation israélienne sur le quartier de Sheikh Radwan, dans le nord de la ville de Gaza.
Le 13 janvier également, Israël a tué Ahlam al-Nafed, une journaliste et photographe alors qu’elle se rendait à l’hôpital al-Shifa de Gaza, a fait savoir DropSite News.
Ahlam Al-Nafed avait couvert les incessantes attaques contre l’hôpital indonésien.
Deux journalistes, Aqel Salah et Ahmed Abu Alrous, ont été tués mercredi lors de frappes aériennes séparées.
Salah a perdu la vie dans une attaque aérienne qui a ciblé un groupe de personnes dans le camp de réfugiés de Beach, à l’ouest de Gaza, a rapporté Al Jazeera.
Et Abu Alrous a été tué à Nuseirat en même temps que trois autres personnes lors d’une frappe de l’aviation israélienne qui ciblait le véhicule dans lequel ils se trouvaient.
Abu Alrous avait téléchargé une vidéo de lui-même quelques heures à peine avant sa mort, où il exprimait sa joie et un optimisme modéré dans la perspective du cessez-le-feu.
« À tous les braves gens, nous en sommes aux moments finaux. Nous, les gens de Gaza, nous avons besoin de vos prières »,
disait-il dans sa vidéo.
Mercredi également, le journaliste Ahmed al-Shayah a été tué par une frappe de l’aviation israélienne contre un point de distribution de vivres à al-Mawasi, à l’ouest de Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza.
Mise en exergue de la résilience
Finalement, comme d’habitude, nous avons voulu partager des images de personnes exprimant leur défi et leur résilience face à la campagne de destruction israélienne. Ces dernières 24 heures, au moment où se propageait la nouvelle d’un possible cessez-le-feu, les Palestiniens se sont répandus massivement dans les rues pour célébrer la chose dans tout Gaza.
Deux des journalistes sur qui nous comptons pour les nouvelles du nord, Anas al-Sharif et Hossam Shabat, étaient dans les rues afin d’assurer une couverture en direct au moment où l’accord de cessez-le-feu a été annoncé mercredi soir.
Tout en étant porté sur les épaules de sa communauté, Shabat a déclaré que l’atmosphère était à la joie et que ses yeux se remplissaient de larmes.
Dans le centre de Gaza, une femme s’est adressée au journaliste Fadi Thabet pour lui expliquer que les gens allaient reconstruire Gaza.
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Publié le 17 janvier 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine