La crainte de la malaria s’intensifie à Rafah

 

Les moustiques et les maladies qu’ils provoquent deviennent un problème croissant dans les confins surpeuplés des camps à Rafah.

La crainte de la malaria s'intensifie à Rafah. Le surpeuplement des camps pour personnes déplacées et l'eau stagnante constituent un terrain fertile pour les moustiques et les maladies qu'ils provoquent.

Le surpeuplement des camps pour personnes déplacées et l’eau stagnante constituent un terrain fertile pour les moustiques et les maladies qu’ils provoquent. (Photo : Ahmad AbuAbdu)

 

Ahmed AbuAbdu, 25 avril 2024

Asmaa est une jeune femme de moins de trente ans. Elle a grandi dans le quartier de Shujaiya, à Gaza, où elle a vécu entourée de beaux espaces verts et de la chaleur de sa famille. À l’instar de 1,9 million de Palestiniens à Gaza, Asmaa et sa famille ont dû fuir leur maison en raison des bombardements sans discernement des Israéliens.

Ils ont fui vers un camp dans le sud de Gaza et, sous couvert de l’obscurité, ont finalement cherché refuge à Rafah.

Sur place, on les a dirigés vers un camp surpeuplé de personnes déplacées. C’est là qu’ont commencé les véritables problèmes d’Asmaa.

La vie dans le camp est marquée par la pauvreté et le manque. Toute la journée, les mères cherchent de la nourriture pour leurs enfants affamés, pendant que ceux-ci jouent dans des tentes délabrées avec de l’eau contaminée, encourant ainsi un risque constant de maladie.

Les pères font de leur mieux pour fournir de l’eau et de la nourriture à leurs familles, malgré la menace constante des bombardements.

Le camp est rempli de mères et d’enfants qui ont perdu leur maison. Asmaa a entendu bien des histoires de mères luttant pour nourrir leur progéniture affamée et pour fournir des soins médicaux aux personnes malades en raison de la guerre.

En sus des difficultés de déplacement et de la pauvreté, Asmaa et les autres réfugiés du camp sont confrontés à un nouveau problème : la prolifération des moustiques. Les nuits chaudes et l’eau stagnante dans le camp constituent des terrains de reproduction idéaux.

L’anxiété d’Asmaa ne cesse de croître. Elle est enceinte et on peut comprendre aisément qu’elle s’inquiète à propos de la naissance de son futur enfant.

« Nous cherchons de l’aide médicale. La guerre et la situation économique dramatique ont rendu la vie ici extrêmement difficile »,

déclare Asmaa à The Electronic Intifada.

Asmaa ne peut se reposer la nuit en raison de l’incessant vacarme des bombardements intensifs.

Le vrombissement des drones israéliens conspire avec celui des moustiques pour rendre le sommeil très malaisé.

La malaria

Les moustiques deviennent un problème croissant dans les confins surpeuplés des camps à Rafah.

La population de la ville est passée de 230 000 habitants à plus de 1,5 million et les autorités municipales affirment que les institutions de soins de santé sont sollicitées jusqu’au point de rupture.

Muhannad Abu Moamar du département de la Santé et de l’Environnement de la municipalité dit que celle-ci est incapable d’assurer le contrôle de la peste en raison du manque de ressources et de carburant.

Le problème a empiré en raison du sillage de destructions provoquées par l’armée israélienne. Les décombres se muent en environnement fertile pour les moustiques en raison de l’eau stagnante provenant des pluies et des fuites dans les canalisations d’eau et dans l’égouttage des eaux usées.

Abu Moamar craint une augmentation, parmi les personnes déplacées, des maladies provoquées par les moustiques.

Khaled al-Tayebi, un fonctionnaire du ministère de la Santé à Gaza, met en garde contre la menace réelle que constituent les piqûres de moustiques pour la vie des résidents et des personnes déplacées, et tout particulièrement des groupes vulnérables comme les enfants et les femmes enceintes.

Le problème ne vient pas que de l’irritation et des démangeaisons provoquées par les piqûres de moustiques, mais aussi du fait que les moustiques peuvent transmettre des maladies infectieuses. Avec l’effondrement du système de santé et la propagation de nombreuses maladies infectieuses parmi les personnes déplacées et les résidents, les fonctionnaires de la santé disent que la malaria constitue une préoccupation croissante.

Une femme déplacée a dit à Asmaa qu’elle avait mis au monde un bébé en mauvaise santé et qu’elle ne pouvait trouver les moindres soins en raison du surpeuplement des hôpitaux, ce qui fait qu’elle devait lutter pied à pied pour pouvoir soigner son nouveau-né.

Lorsqu’elle avait éprouvé des démangeaisons particulièrement irritantes, la femme avait tenté de se rendre à l’hôpital al-Helal al-Emirati à Rafah même, afin de faire contrôler la santé de son bébé et la sienne en même temps. Mais il y avait bien trop de monde dans la file d’attente des soins et elle était repartie sans avoir été vue par qui que ce soit.

Du fait que l’été approche et que les températures augmentent, les conditions deviennent idéales pour d’autres infestations de moustiques.

Par conséquent, la population de Gaza court un risque croissant de maladies provoquées par les moustiques, dont la malaria, et les municipalités de l’enclave ont émis une alerte générale face à une nouvelle crise imminente de la santé dans tout le territoire.

*****

Ahmed AbuAbdu est responsable du département Santé et Environnement d’une autorité locale à Gaza et il s’est spécialisé dans l’étude des changements climatiques.

*****

Publié le 25 avril 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

Print Friendly, PDF & Email

Vous aimerez aussi...