Israël détruit et vole pour 2 millions de USD d’aide de l’UE

Par le biais d’une requête au nom de la liberté d’information, j’ai appris qu’au cours des cinq années écoulées, Israël avait causé des destructions pour une valeur de plus de 2 millions de USD à des projets d’aide financés par l’UE en Cisjordanie occupée.

Israël avait causé des destructions pour une valeur de plus de 2 millions de USD à des projets d'aide financés par l'UE en Cisjordanie occupée (Photo : Keren Manor ActiveStills)

À de multiples reprises, Israël a détruit des projets d’aide financés par l’Union européenne. (Photo : Keren Manor ActiveStills)

David Cronin, 16 décembre 2020 

Imaginez que vous auriez des voisins qui ne cessent de voler vos biens ou de détériorer votre propriété.

Comment réagiriez-vous ? En invitant ces voisins à une fête ? En célébrant le fait que leurs valeurs sont les mêmes que les vôtres ?

Israël est un voisin abusif, pour l’Union européenne.

Par le biais d’une requête au nom de la liberté d’information, j’ai appris qu’au cours des cinq années écoulées, Israël avait causé des destructions pour une valeur de plus de 2 millions de USD à des projets d’aide financés par l’UE en Cisjordanie occupée.

Pourtant, plutôt que d’entreprendre la moindre action contre Israël, les représentants de l’UE sablent régulièrement le champagne avec leurs voisins abusifs et les couvrent littéralement de cadeaux.

Une note rédigée par la Commission européenne dit que, depuis 2015, Israël a « démoli ou saisi » près de 560 « structures » faisant partie de projets d’aide. Ces projets étaient financés par l’UE collectivement et individuellement par ses gouvernements.

Cette année, plus de 70 de ces structures ont été détuites ou confisquées entre janvier et octobre, estime la note de la Commission.

Ce serait une erreur que de rester circonspect en examinant ces chiffres.

L’UE a calculé le montant des dégâts infligés par Israël à ses projets d’aide au cours des deux décennies écoulées. Ces exercices de comptabilité n’ont pas été suivis de la moindre action.

Compliqué ?

Le mois prochain verra le 20e anniversaire d’une menace qui s’est avérée vaine. En janvier 2002, les ministres de l’UE avaient sorti une déclaration disant qu’ils « se réservaient le droit de réclamer des réparations » à Israël « sur les forums appropriés ».

Toutefois, cette mise en garde fut retirée peu de temps après avoir été formulée. Chris Patten, à l’époque commissaire des relations extérieures de l’UE, déclara sans insister deux mois plus tard qu’entamer des procédures juridiques contre Israël serait « horriblement compliqué ».

Son affirmation s’appuyait sur la compréhension de ce que l’UE n’est plus propriétaire des projets d’aide qu’elle finance une fois que les vérifications concernées ont été signées. Intenter un procès serait par conséquent une matière à traiter par les bénéficiaires de l’aide.

Contrairement à ce que prétend l’argument de Patten, les questions impliquées ne sont pas du tout compliquées.

Si l’UE ne veut rien entreprendre elle-même, ses avocats peuvent conseiller les bénéficiaires ou les administrateurs de l’aide – qui comprennent les communautés palestiniennes et les ONG internationales actives en Cisjordanie et à Gaza – sur la façon d’intenter un procès à Israël.

D’autres possibilités consisteraient à donner moins d’argent à Israël ou, mieux encore, à ne plus lui donner d’argent du tout.

Israël est l’un des principaux bénéficiaires des subsides de l’UE. Dans le cadre d’Horizon 2020 – un plan pluriannuel de recherche scientifique –, l’UE a octroyé près de 1,4 milliard de USD à des firmes et institutions israéliennes.

Réduire les subsides à Israël en guise de sanction pour la destruction de projets d’aide ne constituerait pas une tâche trop ardue.

Alors qu’il conviendrait de s’opposer à tous les subsides que l’UE accorde à Israël, certains de ces subsides sont même absolument indéfendables. Mekorot, une société d’eau propriété de l’État d’Israël, tire parti d’Horizon 2020, même si elle figure sur une liste noire des Nations unies de firmes actives dans les colonies illégales israéliennes.

Aucune envie de demander des comptes

Le problème essentiel, c’est qu’il n’y a pas, au sein de la bureaucratie de Bruxelles ou parmi les gouvernements de l’UE, la moindre envie réelle de tenir Israël pour responsable de ses actes.

La Belgique a tenté de se dire particulièrement bouleversée par la conduite destructive d’Israël ces quelques dernières années. Le mois dernier encore, la Belgique s’est plainte que quatre maisons palestiniennes qu’elle avait financées à proximité de la ville cisjordanienne de Hébron avaient été démolies par Israël.

Les Belges ont réclamé timidement des compensations à Israël. Ces appels timides sont totalement inutiles, quand on traite avec un occupant brutal.

Ces destructions ont lieu dans le contexte plus large du racisme israélien à l’égard des Palestiniens. Elles font partie d’un tableau bien plus vaste dans lequel Israël traite les Palestiniens avec une cruauté extrême du fait que – du moins en ce qui concerne Israël – ils appartiennent à la « mauvaise » ethnicité.

Les gens qui parlent ouvertement des mesures israéliennes d’apartheid s’exposent au risque d’être diffamés.

Lundi, l’Allemagne, qui occupe la présidence tournante de l’UE, a accueilli en compagnie de l’ambassade d’Israël à Bruxelles une conférence en ligne intitulée « Ensemble contre l’antisémitisme’ ».

Les participants à cette conférence ont recommandé aux gouvernements d’adopter la définition de l’antisémitisme approuvée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA). Cette définition a été formulée délibérément de façon à ce que toute personne décrivant Israël comme raciste puisse être accusée de haine envers les Juifs.

Parmi les orateurs de la conférence, cette semaine, figuraient Felix Klein et Katharina von Schnurbein, autrement dit les coordinateurs contre l’antisémitisme, le premier pour l’Allemagne et la seconde pour l’UE. Tous deux ont affirmé que comparer Israël à l’Afrique du Sud de l’apartheid équivalait à du sectarisme antijuif.

La conférence a fourni un exemple sordide de la façon dont l’UE muselle la liberté d’expression pour le compte d’Israël.

Si l’on poursuit un tel agenda, il n’est guère étonnant qu’Israël puisse continuer à détruire des projets d’aide à l’aide d’une boule de démolition.


Publié le 16 décembre 2020 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal

Lisez également : La Belgique “condamne” mais refuse de sanctionner Israël

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