Sept personnes tuées lors d’une attaque contre une colonie de peuplement à Jérusalem
Vendredi soir, dans une colonie, un tireur palestinien venu de Jérusalem-Est occupée a tué sept personnes à proximité d’une synagogue, ont annoncé les médias israéliens.
Maureen Clare Murphy, 27 janvier 2023
Les médias israéliens ont identifié l’agresseur présumé, qui a par ailleurs été tué par la police : Khayri Alqam, 21 ans, du quartier d’al-Tur, à Jérusalem-Est.
القناة 13 العبرية: منفذ عملية بيت حنينا هذه الليلة هو الشاب خيري علقم (21 عامًا) من بلدة الطور بالقدس المحتلة.
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Itamar Ben-Gvir, le ministre israélien de la sécurité intérieure, s’est rendu sur les lieux de la fusillade, où il a été houspillé par des protestataires. « C’est dans vos attributions ! », a crié une personne à diverses reprises. « Voyons voir ce que vous allez faire, maintenant ! »
Dans une vidéo montrant Ben-Gvir sur les lieux, on peut entendre les protestataires qui scandent « Mort aux Arabes ! » et « Mort aux terroristes ! ».
Ben-Gvir répond avec approbation : « Mort aux terroristes, c’est juste. »
مصادر عبرية: الشرطة "الإسرائيلية" تخرج بن غفير من موقع إطلاق النار بحماية مشددة بعد أن هاجمه المستوطنون في المكان. pic.twitter.com/BKl8jSUKto
— القسطل الإخباري (@AlQastalps) January 27, 2023
Alors que le Hamas n’a pas revendiqué la responsabilité de la fusillade de Neve Yaakov, une colonie de peuplement à Jérusalem-Est, un porte-parole de l’organisation de résistance a par contre fait les louanges de l’opération et l’a décrite comme « le début d’une riposte » au raid israélien de jeudi dans la ville cisjordanienne de Jénine, raid qui s’est soldé par la mort de neuf Palestiniens.
Le raid de Jénine a été « l’opération israélienne en Cisjordanie la plus meurtrière depuis au moins 2005 », a déclaré un haut fonctionnaire des Nations unies.
Deux enfants et une femme figuraient au nombre des personnes tuées au cours de ce même raid. Vingt Palestiniens ont été blessés, dont quatre sont dans un état critique, a annoncé le ministère de la Santé.
Al-Haq, une organisation palestinienne de défense des droits humains, a déclaré que le raid avait commencé par le siège d’une maison dans le camp de réfugiés de Jénine. Trois occupants du bâtiment avaient été tués par les bombardements israéliens.
L’armée a également rasé au bulldozer une partie de l’organisation communautaire du camp et elle a ciblé les générateurs électriques, coupant ainsi le courant et internet dans toute la zone, y compris à l’hôpital principal de Jénine, a encore dit Al-Haq.
À Gaza, suite au raid meurtrier de Jénine, les Palestiniens ont tiré des roquettes en direction d’Israël et Israël a frappé des sites à Gaza en prétendant qu’ils servaient à fabriquer des roquettes.
Une escalade meurtrière
L’attaque par balles à Jérusalem vendredi a marqué les premières pertes israéliennes en vies humaines de l’année, dans le contexte de l’occupation.
Just a reminder, as the Western media now begins to urgently and extensively cover the attacks in Jerusalem, in which at least 8 Israelis were killed, that 30 Palestinians (9 on Thursday alone) who have been killed in 2023.
— Ayman (@AymanM) January 27, 2023
Instead of linking today's terrible attack in Jerusalem to Holocaust Remembrance Day, which it has nothing to do with, you might connect it instead to the 30 Palestinians that have been killed by Israel just this month. This is a cycle of violence borne of Israeli apartheid. https://t.co/E96VxaRmqK
— Arielle Angel (@ArielleLAngel) January 27, 2023
Les soldats, policiers et colons israéliens ont tué plus de 30 Palestiniens, depuis le début de 2023. D’autres Palestiniens encore sont morts de blessures subies au cours des années précédentes.
Nayef Khaled Nayef Al-Odat, 10, died yesterday from head wounds he sustained from an Israeli airstrike in Gaza in August. He was exiting a grocery store near his grandfather's house when an Israeli warplane fired a missile into a nearby agricultural area. https://t.co/zhav5Et4xN
— Defense for Children (@DCIPalestine) January 27, 2023
En tout, l’an dernier, selon un relevé de The Electronic Intifada, 207 Palestiniens avaient été tués par l’armée, la police et les colons israéliens en Cisjordanie, à Gaza et à l’intérieur d’Israël ou étaient morts des suites de blessures subies au cours des années précédentes.
L’année 2022 a été celle du plus grand nombre de Palestiniens tués par les forces et les colons israéliens en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, depuis la seconde intifada il y a deux décennies. Plus de 50 de ces décès ont eu lieu dans la zone de Jénine, explique Al-Haq.
Une escalade de la violence, peut-être pire encore en 2023, semble garantie d’avance du fait que l’actuel gouvernement israélien est le plus à droite et ouvertement fasciste jamais vu.
Suite au bain de sang de Jénine, jeudi, trois experts indépendants des droits humains de l’ONU ont déclaré ensemble que
« toute cette violence n’aurait pas lieu si, comme le requièrent les lois internationales, Israël mettait immédiatement et inconditionnellement un terme à son occupation illégale, vieille d’un demi-siècle.
Les experts ont fait remarquer qu’Israël n’avait pas été sommé de rendre des comptes suite au massacre qu’il avait perpétré en 2002 dans le camp de réfugiés de Jénine, massacre au cours duquel plus de 50 Palestiniens avaient été tués et plus de 400 maisons détruites.
Al-Haq a déclaré :
« Alors que le nouveau gouvernement est explicite à propos de la façon dont il entend étendre le projet colonial de peuplement, le recours excessif à la violence par Israël n’a rien de neuf. »
Cette politique « constitue une illustration du régime colonial de peuplement et d’apartheid en général », a ajouté Al-Haq.
Jérusalem est un épicentre des efforts d’Israël en vue de déporter les Palestiniens de façon à pouvoir les remplacer par des colons juifs étrangers.
Les Palestiniens à Jérusalem sont soumis à la violence quotidienne des colons, de la police et d’une bureaucratie qui cherche à les chasser de la ville. Des dizaines de milliers de résidents palestiniens de la zone de Jérusalem ont été en état de siège durant plusieurs jours, en octobre dernier.
Des dizaines de Palestiniens de Jérusalem ont été exécutés dans les rues et ruelles de la Vieille Ville au cours d’attaques et d’agressions supposées, depuis fin 2015.
En novembre dernier, deux Israéliens ont été tués au cours d’un double attentat à la bombe commis dans la ville.
Suite à ces attentats, Itamar Ben-Gvir – un dirigeant d’extrême droite membre du nouveau gouvernement d’Israël et disciple du rabbin Meir Kahane dont les théories génocidaires ont inspiré le massacre de la mosquée Ibrahim, en 1994 – a réclamé des exécutions extrajudiciaires à l’encontre les dirigeants de la résistance palestinienne.
Il a déclaré :
« Nous devons revenir aux meurtres ciblés, nous devons imposer un couvre-feu au village d’où sont originaires les terroristes. »
Les Palestiniens à l’étroit à Jérusalem
Neve Yaakov, la colonie où a eu lieu l’attaque par balles de vendredi, a été construite sur des terres confisquées aux communautés palestiniennes voisines de Beit Hanina, Hizma et al-Ram.
Un maître-plan de l’an 2000 pour Jérusalem montre les intentions d’Israël de dominer la ville en garantissant
« un taux démographique de 70 pour 100 de Juifs israéliens contre 30 pour 100 de Palestiniens dans la ville »,
explique Al-Haq.
Human Rights Watch fait remarquer qu’une partie des efforts d’Israël en vue de maintenir sa domination passent par la « judaïsation » de zones à importante population palestinienne », dont Jérusalem.
« Cette politique, qui vise à maximaliser le contrôle israélien juif de la terre, concentre la majorité des Palestiniens qui vivent en dehors des grandes villes israéliennes à prédominance juive dans des enclaves densément peuplées et mal desservies »,
ajoute Human Rights Watch.
Dans le même temps, cette politique restreint
« l’accès des Palestiniens à la terre et au logement, tout en favorisant le développement des communautés juives du voisinage ».
Depuis qu’il occupe le secteur oriental de Jérusalem (1967), Israël a retiré le statut de résidence à plus de 14 500 Palestiniens originaires de la ville.
Au contraire du massacre de Jénine par Israël, la veille, la fusillade mortelle de Jérusalem a été aussitôt sévèrement condamnée par les États-Unis et l’Union européenne.
Israël a tenté de justifier le raid meurtrier de jeudi en prétendant qu’il avait déjoué une attaque imminente des combattants palestiniens de la résistance – bien qu’Israël n’ait pas dit où et quand cette attaque supposée devait avoir lieu.
Ce que prouve une fois de plus de bain de sang de vendredi à Jérusalem, c’est qu’aucune proportion dans les tueries, arrestations, tortures, démolitions punitives, châtiments collectifs et autres formes de persécution qu’Israël peut infliger aux Palestiniens ne parvient à concrétiser ce qu’Israël appelle « la sécurité ».
Tant que le régime brutal et raciste d’Israël continuera de dominer les existences de millions de Palestiniens, la seule certitude est que de plus en plus de vies seront perdues.
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Ali Abunimah a contribué à cet article.
Maureen Clare Murphy est rédactrice en chef de The Electronic Intifada.
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Publié le 27 janvier 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine
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Lisez également : Bain de sang à Jénine