Harcèlement des pêcheurs de Gaza par la marine de guerre israélienne
En avril, la marine de guerre israélienne a ouvert le feu sur les pêcheurs gazaouis 70 % en plus que pour le total des trois mois précédents
Les ONG à l’attorney général et à l’avocat général de l’armée en Israël : Cessez les attaques militaires violentes contre les pêcheurs et ouvrez des enquêtes ; l’intensification des attaques se produit au moment où Gaza est confronté à l’incertitude économique et à des problèmes de sécurité alimentaire dus à la pandémie de Covid-19.
Ces dernières semaines, la marine de guerre israélienne a de plus en plus recouru à de violentes mesures coercitives en mer, avec des incidents au cours desquels elle a ouvert le feu sur des pêcheurs au large de la côte de Gaza.
Les interventions rien qu’en avril se sont accrues de 70 pour 100 par rapport à l’ensemble du premier trimestre 2020.
Le recours à des tirs à balles réelles menace la vie des pêcheurs et provoque de graves dégâts aux bateaux et aux équipements de pêche.
Tout cela dans un contexte de grande incertitude économique et de préoccupation accrue quant au bien-être et à la sécurité alimentaire de la population civile de Gaza, suite aux mesures prises pour endiguer la propagation du Covid-19.
Les organisations des droits humains Gisha, Adalah et Al-Mezan (de Gaza) ont adressé une lettre urgente à l’attorney général et à l’avocat général de l’armée en Israël, leur demandant d’ordonner à l’armée de mettre un terme immédiatement au harcèlement des pêcheurs et d’enquêter sur les incidents passés.
La violence avec laquelle l’armée applique l’enfermement maritime de Gaza comme s’il s’agissait d’une question de routine comporte des mesures tels l’usage sans restriction de munitions réelles, l’envoi de bateaux par le fond, les traitements dégradants à l’égard des pêcheurs, la saisie de navires et les dégâts infligés aux équipements.
Selon Al-Mezan, 105 incidents lors desquels la marine de guerre israélienne a ouvert le feu sur des bateaux de pêche gazaouis ont été répertoriés au cours des quatre premiers mois de 2020 ; six pêcheurs ont été blessés, sept autres arrêtés, y compris un mineur d’âge.
En outre, sept bateaux ont subi de lourds dégâts, d’importantes quantités d’équipement de pêche ont été détruites et un bateau a été saisi.
Ces pratiques de la marine de guerre israélienne se sont poursuivies ce mois-ci (mai 2020) également.
Dès les premières heures du 8 mai, par exemple, des pêcheurs ont rapporté des tirs navals israéliens contre deux bateaux de pêche.
Des balles enrobées de caoutchouc ont touché un pêcheur à la tête, un autre à la main ; les machines de deux bateaux ont été détruites par des tirs à munitions réelles.
Plus tard, le même jour, la marine de guerre israélienne a utilisé de puissants canons à eau contre plusieurs bateaux, exposant ces mêmes bateaux et leurs occupants à des risques énormes et blessant également un des pêcheurs.
Dans la lettre envoyée au nom des trois organisations, l’avocate de Gisha, Muna Haddad, déclarait que
« la politique consistant à recourir à des moyens potentiellement mortels contre les pêcheurs et à provoquer des dégâts sévères et irréversibles à leur propriété est illégale et disproportionnée ».
D’après les témoignages des pêcheurs, la marine de guerre israélienne recourt à des mesures violentes même lorsque les bateaux de pêche sont à l’intérieur de la zone de pêche autorisée.
Haddad a insisté sur le fait
« qu’en tout cas, naviguer en dehors de la zone de pêche ne pose pas en soi de menace sécuritaire justifiant un recours à la force manifestement destiné à appliquer des restrictions sécuritaires ».
Les restrictions imposées par Israël à l’accès à la zone de pêche à l’intérieur même des eaux territoriales de Gaza, les changements fréquents qu’il apporte à sa démarcation et les méthodes violentes d’application auxquelles il recourt compromettent grandement la gagne-pain de milliers de pêcheurs à Gaza, détruisant ce qui fut jadis un secteur important de l’économie de la bande.
Les actions d’Israël en mer ne sont que l’un des exemples flagrants du contrôle qu’Israël ne cesse d’exercer sur les existences des résidents gazaouis.
Ce contrôle s’accompagne de responsabilités, entre autres l’obligation de donner la possibilité aux résidents de la bande de Gaza de gagner leur vie et de vivre dans la dignité, sans être forcés de risquer leurs vies et leurs biens et sans violation de leurs droits fondamentaux.
Vidéo avec les modifications dans la zone de pêche à Gaza.
Publié le 20 mai 2020 sur Adalah
Traduction : Jean-Marie Flémal
Lisez aussi : Comment Israël a volé la vue et l’odorat de ce pêcheur