L’histoire de quatre parcs du FNJ (Fonds National Juif)

Des icônes de la lutte antiraciste sont cooptées au service de l’épuration ethnique, car il est un fait que l’implication du FNJ (Fonds National Juif) dans de tels crimes est à la fois historique et toujours en cours. 

Mick Napier, juillet 2021

Le FNJ (Fonds national juif) est un pilier de l’apartheid israélien et une composante militante de la coalition sioniste bien décidée à parachever le nettoyage ethnique de la surface tout entière de la Palestine. Une partie importante de ce projet implique de planter des forêts en vue de masquer des scènes de crimes passés – des massacres et des expulsions de Palestiniens de leurs foyers et villages – à l’intérieur même de ce théâtre plus étendu du crime d’épuration ethnique qu’est l’État d’Israël.

Mais les parcs et forêts du FNJ font bien davantage que dissimuler ce nettoyage ethnique. Pour d’autres raisons, bon nombre d’entre eux méritent l’attention de toutes les personnes engagées en faveur de la justice ou qui, du moins, désirent éviter d’être considérées comme des complices des crimes du FNJ.

En conférant à un parc l’appellation de « parc britannique », le FNJ tend à suggérer que, d’une façon ou d’une autre, le peuple britannique soutient le massacre et la dépossession des Palestiniens à qui la terre a été volée au profit de ce même parc.

La forêt Coretta Scott King du FNJ s’approprie l’héritage antiraciste du Dr Martin Luther King afin de le mettre au service du racisme d’État israélien.

De même, la forêt Rd Bastiaan Ader du FNJ déshonore la mémoire d’un homme qui a consenti au sacrifice ultime afin de combattre une ségrégation raciale étatique en Europe.

Le FNJ nomme de la sorte ses parcs et forêts afin d’adresser un message aux Palestiniens également – leur disant qu’Israël les opprime, non seulement avec le soutien actif de nos gouvernements, mais qu’il le fait également avec l’accord de leurs populations – encore que le lobby pro-israélien sache pertinemment bien que la chose est très loin d’être vraie.

Le parc britannique du FNJ

Cette politique consistant à baptiser des dizaines de parcs du nom de pays allant de l’Afrique du Sud au Canada est une tactique de la guerre psychologique et elle fait partie de la campagne israélienne en vue d’écraser et de disperser le peuple palestinien. Faites cesser les campagnes du FNJ autour de ceux dont les communautés jadis prospères furent détruites par les milices sionistes qui recouraient à des escadrons de la mort et à des viols pour chasser les Palestiniens, puis utilisaient le feu et la dynamite pour incendier et détruire leurs maisons afin d’empêcher leur retour.

La section du FNJ au Royaume-Uni (FNJ-GB – dont les présidents d’honneur sont Tony Blair et Gordon Brown) a financé le développement du parc britannique sur les ruines mêmes de villages palestiniens soumis à une épuration ethnique. Un écriteau insolent à l’entrée du parc – qui reste propriété palestinienne – dit ceci : « Parc britannique, don du Fonds national juif de Grande-Bretagne ». Son outrecuidance même révèle la criminalité du FNJ-GB, puisque cet emplacement était précédemment celui des terres volées des villages palestiniens d’Ajjur et de Zakariyya. Le FNJ-GB admet lui-même avoir tiré parti de ce crime grave – comment peut-il faire un don de quelque chose qu’il n’a pas reçu ? – et continue de violer les droits des réfugiés palestiniens, dont les revendications portant sur les terres accueillant le parc britannique sont toujours considérées comme bien fondées par les lois internationales.  

La destruction complète d’une communauté civile, le pillage et la vente ensuite de la propriété constituent un crime de guerre, selon le droit international. Les crimes de guerre ne sont pas soumis aux règles de la limitation juridique. Le FNJ-GB, de même que ses homologues ailleurs dans le monde, est une organisation criminelle, selon le droit britannique, et elle l’est également en tant que composante du FNJ international au sens élargi.   

La forêt Coretta Scott King du FNJ

Outre le fait d’avoir donné à ses parcs des noms de pays, le FNJ masque les scènes de certains massacres israéliens par des parcs et forêts créés selon des thèmes antiracistes. L’organisation promeut la forêt Coretta Scott King comme un symbole de « l’engagement envers la paix et la justice » mais, en fait, la forêt recouvre des villages palestiniens détruits, entre autres, Ayn al-Zaytoun, dont le FNJ a contribué à tuer et expulser les habitants.

Dans All That Remains (Tout ce qui reste), Walid Khalidi fait allusion à trente-sept jeunes villageois choisis au hasard : l’historien israélien Benny Morris conclut que

« ces adolescents faisaient probablement partie d’un groupe de soixante-dix personnes massacrées plus tard dans un ravin situé entre Ayn Al Zaytoun et Safad sur l’ordre de Moshe Kelman qui, en prévision d’une visite de la région par la Croix-Rouge, avait ordonné que leurs mains fussent libérées de leurs liens afin de dissimuler le fait que le massacre avec été perpétré de sang-froid ».

En 1976, le FNJ baptisa également une forêt du nom du Dr Martin Luther King Jr., à l’intérieur même de la forêt du mont Turan, en haute Galilée, près de Nazareth, et dont il prétendit par la suite qu’elle avait fini par compter 10 000 arbres.  

Des icônes de la lutte antiraciste sont cooptées au service de l’épuration ethnique, car il est un fait que l’implication du FNJ dans de tels crimes est à la fois historique et toujours en cours. 

La forêt de la Mémoire du FNJ

La forêt de la Mémoire du FNJ fait elle aussi double emploi, puisqu’elle dissimule une épuration ethnique de Palestiniens tout en masquant le sacrifice par Israël de milliers de Juifs argentins torturés et tués par la junte fasciste… qu’Israël avait armée et contribué à former. Ben Shemen accueille la forêt de la Mémoire et, à l’instar d’autres parcs du FNJ, se situe sur les ruines de villages palestiniens soumis à une épuration ethnique, avec, entre autres, dans le cas présent, Jimzu, dont les archives sionistes rapportent, pour le 10 juillet 1948 :

« Nos forces sont occupées à nettoyer la zone d’Innaba-Jimzu-Daniyal et elles incendient tout ce qui peut être brûlé. »

Alors que les villageois d’Ayn Al Zaytoun ont vu leurs assassins ériger un parc à la thématique « antiraciste » afin de dissimuler leurs foyers et terres détruits, les survivants des Jimzu et autres villageois ont vu l’insulte ajoutée à la blessure : la forêt de la Mémoire plantée sur l’emplacement de leur village et promue au rang de symbole de la tolérance et de l’antifascisme, de tribut à ces 30 000 Argentins, dont 3 000 citoyens juifs de ce pays, qui sont morts des mains de la junte militaire argentine.

Le centre qui accueille les visiteurs de la forêt de la Mémoire, toutefois, cache non seulement l’histoire des villages palestiniens situés jadis en dessous du site, mais aussi le rappel sinistre de ce que ce fut Israël qui arma et forma les officiers militaires qui dirigèrent les massacres des années 1976-1983. Au plus fort de la terreur organisée par la junte, l’ambassade d’Israël à Buenos Aires rapporta qu’il n’y avait

« aucun pays au monde dans lequel autant d’officiers argentins restaient en même temps disponibles dans le but d’acquérir des armes, de se former, etc. ».

L’ambassade d’Israël refusa à des juifs de gauche les passeports qui les auraient sauvés des chambres de torture du régime. Le bourreau Peregrino Fernandez révéla beaucoup plus tard qu’il reçut l’aide dans son travail de Herzl Inbar, de l’ambassade d’Israël (et qui fut plus tard ambassadeur d’Israël en Espagne).

Plus tard encore, le prisonnier Jacobo Timerman écrivit :

« J’oublierai ceux qui m’ont torturé, mais je n’oublierai jamais les dirigeants juifs qui ont donné leur accord pour que des juifs soient torturés. »

Une forêt du FNJ dédiée au Révérend Bastiaan Jan Ader

La forêt Coretta Scott King du FNJ déshonore ce nom de famille exemplaire et les parcs et forêts du FNJ portant des noms de pays impliquent des citoyens de plusieurs pays dans les crimes mêmes du FNJ. La forêt de la Mémoire n’est pas le seul parc du FNJ à exploiter la mémoire de ceux qui ont combattu et sont morts afin de s’opposer au fascisme dans le monde entier, tout en dissimulant la sauvagerie israélienne en Palestine et le soutien d’Israël à des régimes d’extrême droite dans d’autres régions du monde.

Le Révérend Bastiaan Jan Ader était un combattant hollandais de la résistance contre l’occupation nazie au cours de la 2e Guerre mondiale. Il secourut de nombreux juifs et les cacha des nazis. En 1944, il préparait une attaque pour sauver d’autres juifs encore lorsqu’il fut trahi, arrêté, torturé puis tué par la Gestapo. Le mémorial Yad Vashem, en Israël, conclut que Bastiaan et sa femme, Johanna, avaient sauvé les vies d’entre deux cents et trois cents Juifs hollandais.

Le FNJ planta une forêt de 1 100 arbres ainsi qu’une stèle commémoratrice en l’honneur du Rd Ader. La forêt fut plantée sur les ruines du village palestinien de Bayt Natiff, que les Israéliens avaient complètement détruit pour empêcher le retour des villageois chassés par les milices juives en octobre 1948. Bien des villageois s’étaient finalement retrouvés à Bethléem, dans le camp de réfugiés d’Aida.

En 2016, le fils du Rd Ader, Erik, apprit le rôle du FNJ dans l’épuration ethnique et, partant, apprit aussi comment l’héritage du combat de son père contre le régime d’occupation nazie avait été incorporé au service du programme israélien d’épuration ethnique :

« Je ne puis demander à mon père ce qu’il pense du fait qu’on a associé son nom à cette injustice mais, sachant ce pour quoi il luttait, il n’est pas difficile de le deviner. » 

Ce que vous pouvez faire

Si vous vous opposez aux efforts du FNJ en vue d’impliquer des citoyens de votre pays dans ses crimes, si vous honorez la mémoire du Dr King en luttant contre le racisme, si vous êtes dégoûté.e par l’alliance d’Israël avec un régime fasciste et le fait qu’ensuite il pleure les victimes dont il a permis qu’elles soient massacrées par le même régime, si vous êtes inspiré.e par l’héroïsme du Rd Bastiaan Ader en protégeant les juifs sous l’occupation nazie et par la détermination de son fils à s’opposer au nettoyage ethnique en Israël – vous devriez soutenir les efforts de Stop the JNF et vous engager dans le mouvement afin de le dénoncer pour ce qu’il représente en réalité : la « charité envers l’apartheid »,  pour reprendre les termes de Gideon Levy.


Publié en juillet 2021 sur Stop the JNF
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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