Ce que The Jerusalem Post essaie de criminaliser en Europe, de même qu’Israël est parvenu à le faire en Palestine
Dans l’esprit tordu du Jerusalem Post et autres organes de presse sionistes partisans d’Israël, les Palestiniens ne doivent ni défendre leurs prisonniers ni pleurer leurs martyrs. S’ils le font, que ce soit en paroles ou en actes, ils sont des terroristes ou des islamistes en route pour détruire le monde en tant que suppôts de l’Iran. Cette hasbara aussi vicelarde que ridicule est née d’un sens profond du sentiment d’avoir tous les droits et d’être supérieur du sioniste juif, lequel nie l’humanité palestinienne en refusant de reconnaître nos droits dans notre propre patrie.
Dans la tribune exaltée du Jerusalem Post, par exemple, le Réseau Samidoun de solidarité avec les prisonniers palestiniens, « qui travaille pour l’Iran », « devrait être désigné comme une organisation terroriste par l’UE ».
Bien trop souvent, nous, les Palestiniens, nous devons entendre non seulement que l’on banalise notre souffrance, mais également qu’on la criminalise !
Aux yeux d’organes de presse aussi diaboliques que The Jerusalem Post et aux yeux d’Israël même, les Palestiniens ne méritent aucune compréhension, sympathie ou solidarité – ni lors de la mort d’un combattant, ni dans la cruauté de l’emprisonnement, ni non plus dans une existence sans libération.
Le sionisme est une maladie en stade terminal, mais ceux qui pleurent sa mort inévitable sont toujours accrochés au stade de la négation, quand ils expriment leur peine. Pour reprendre les mots d’Alif Safief, prenant la parole à Belfast
« ceux qui choisissent d’être nos ennemis ont mobilisé contre nous Dieu, la Bible, Hitler, l’Holocauste et Hollywood (…) un défi pénible (…) Nous, les Palestiniens, avons souffert trois négations successives.
D’abord, il y a eu la négation de notre simple existence physique. Ceux qui voulaient coloniser notre pays prétendaient que la Palestine était une terre sans peuple pour un peuple sans terre. Notre simple existence physique a été niée.
Puis on nous a nié nos droits individuels et nationaux, nous avons été collectivement déracinés et expédiés à la périphérie de notre patrie.
Et, tertio, pire encore, aujourd’hui, on nous nie la reconnaissance de l’injustice historique qui nous a été infligée, la reconnaissance de nos souffrances.
Combien de fois, chers amis, ne devons-nous pas entendre, nous, Palestiniens, qu’on trivialise et banalise nos souffrances ? ».
Aujourd’hui, aux négations sionistes reprises ci-dessus, ajoutez celle de l’incontestable vérité, la négation qui dit que
« tout le territoire à l’ouest du Jourdain a longtemps constitué un seul État sous pouvoir israélien, où la terre et les gens sont soumis à des régimes juridiques radicalement différents et où les Palestiniens sont traités en permanence comme une caste inférieure. Les décideurs politiques et commentateurs qui ignorent cette réalité à un État seront condamnés à l’échec et à la non-raison d’être en ne faisant guère plus que produire un écran de fumée afin de pérenniser le statu quo ».
L’hystérie sioniste va loin. Israël, par exemple, refuse souvent de restituer les restes des martyrs palestiniens à leurs familles, comme si les Palestiniens effrayés pouvaient encore utiliser leurs organes pour les transplanter, même si, littéralement, Israël leur a arraché le cœur. Mais rester aveugle à la réalité d’un seul État maintenant la suprématie juive (ce qui, en aucun façon, ne constitue une nouvelle réalité), ne devrait être une option pour personne.
Samidoun ne cessera pas de s’occuper des droits palestiniens, qu’importe la ferveur avec laquelle The Jerusalem Post et Israël souhaiteraient que cela cesse. Les Palestiniens ne céderont pas non plus. La toute proche Conférence de libération pour la Palestine (Ottawa, 28-30 avril 2023) organisée par Masar Badil – le Mouvement palestinien de la voix révolutionnaire alternative – dénoncera sans aucun doute le renouveau de la campagne d’incitation contre le Réseau Samidoun.
Les Palestiniens n’abandonneront jamais leurs prisonniers ou leurs martyrs ou, en fait, leur cause. Où les 166 Palestiniens tués par Israël en 2022, dont la majorité étaient des civils, selon les Nations unies et les organisation palestiniennes des droits humains. La même chose vaut pour les prisonniers palestiniens : la majorité ne sont ni du Fatah, ni du Djihad ni d’aucune autre organisation de résistance armée. En Palestine, il n’y a pas de distinction entre civil et combattant.
Lors d’un événement organisé par le Réseau Samidoun en Palestine occupée en compagne du comité des jeunes de Beit Ummar, al-Khalil les 17 et 18 avril 2021 en soutien des prisonniers palestiniens, les jeunes Palestiniens ont affirmé leur engagement à leur rendre visite avec les familles des prisonniers – la totalité des 4.500 prisonniers dans les geôles de l’occupation israélienne.
« Il est de notre devoir aujourd’hui d’être la voix des prisonniers s’adressant au monde et leur voix s’adressant aux communautés palestiniennes en exil et partout dans la diaspora. Il est de notre devoir de dénoncer l’inaction et la complicité internationales dans les crimes contre nos vaillants prisonniers.
Aujourd’hui, il est de notre devoir de rejeter les mesures d’intimidation, les menaces, les portes tournantes et les transactions commerciales autour des droits de nos prisonniers. Aujourd’hui, il est de notre devoir de défendre tous les prisonniers de liberté et de conscience dans les prisons du monde.
Depuis le cœur du camp d’Al-Arroub, nous adressons un message de liberté à l’héroïque prisonnier Georges Abdallah, emprisonné depuis 37 ans dans les geôles françaises pour avoir défendu la cause de la Palestine et sa liberté, et nous lui assurons que son approche révolutionnaire, sa résilience et la détermination de nos prisonniers constituent le moteur quotidien qui nous propulse vers la liberté. »
Voilà l’esprit que The Jerusalem Post tente de criminaliser en Europe, de même qu’Israël l’a criminalisé avec succès en Palestine.
Il n’y a pas qu’al-Quds et le Réseau Samidoun de solidarité avec les prisonniers palestiniens, qui sont sous attaque : c’est l’ensemble de nous tous, les Palestiniens.
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Rima Najjar est une Palestinienne dont la branche paternelle de la famille provient du village dépeuplé de force de Lifta, dans la périphérie occidentale de Jérusalem et dont la branche maternelle de la famille est originaire d’Ijzim, au sud de Haïfa. C’est une activiste, une chercheuse et une professeure retraitée de littérature anglaise, à l’Université Al-Quds, en Cisjordanie occupée.
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Publié le 19 avril 2023 sur le blog de Rima Najjar
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine