Un cessez-le-feu met fin à cinq jours d’escalade à Gaza

Samedi, très tard dans la soirée, Israël et le Djihad islamique se sont mis d’accord sur un cessez-le-feu à Gaza, mettant ainsi un terme provisoire à cinq journées d’intenses échanges de tirs transfrontaliers qui auront coûté la vie à 33 Palestiniens et à deux personnes en Israël.

13 mai 2023. Les suites des dernières frappes aériennes israéliennes à Gaza.

13 mai 2023. Les suites des dernières frappes aériennes israéliennes à Gaza. (Photo : Atia Darwish / APA images)

 

Tamara Nassar, 13 mai 2023

Un peu partout à Gaza, les Palestiniens sont descendus dans la rue pour célébrer la déclaration de ce cessez-le-feu négocié par l’Égypte :

 

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Israël a tué six dirigeants de l’organisation de résistance du Djihad islamique à Gaza, depuis le lancement de son attaque surprise, mardi à l’aube.

La faction de la résistance a répondu en tirant des centaines de roquettes vers le centre et le sud d’Israël, perturbant les activités quotidiennes du pays pendant que les sirènes d’alerte contre les raids aériens se faisaient entendre à Tel-Aviv et dans la zone de Jérusalem, ainsi que parmi les communautés israéliennes proches de Gaza.

Le texte de l’accord, dont l’agence Reuters a eu connaissance, stipulerait

« la fin du ciblage des civils, des démolitions de maisons, et la fin du ciblage des individus immédiatement après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu ».

Israël vise des habitations

Lors de sa dernière offensive contre Gaza, Israël a une fois de plus visé des infrastructures civiles, en intensifiant ses frappes vers la fin de l’offensive.

Al Mezan, une organisation des droits humains siégeant à Gaza, a déclaré qu’Israël avait détruit près de 60 unités de logement, forçant au déplacement près de 375 personnes, dont un tiers d’enfants.

Des 33 Palestiniens tués à Gaza depuis mardi à l’aube, au moins 13 étaient des civils et six des membres d’organisations armées, selon le bureau des droits humains de l’ONU, qui a ajouté que le statut des autres « devait encore être confirmé ».

Parmi les 13 civils tués figuraient « quatre filles, trois garçons, quatre femmes et deux hommes », a fait savoir l’ONU.

Certains des décès à Gaza résultent probablement de tirs de roquettes défectueuses qui sont retombées sur le territoire avant d’atteindre Israël.

Le ministère de la santé de Gaza a déclaré que plus de 150 Palestiniens avaient été blessés depuis mardi.

Un tir de roquette depuis Gaza a tué une Israélienne âgée de 80 ans ainsi qu’un ouvrier agricole palestinien originaire de Gaza et qui travaillait dans la région du Naqab (Néguev), dans le sud d’Israël.

Le Djihad islamique avait initialement fait dépendre le cessez-le-feu de deux conditions, entre autres : l’abandon par Israël de sa politique d’assassinat des dirigeants de la résistance palestinienne et la restitution du corps de Khader Adnan, le gréviste de la faim décédé dans une prison israélienne au début de ce mois.

Dans une déclaration publiée peu après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, la salle commune des opérations de la résistance palestinienne a mis en garde Israël contre de futurs assassinats.

« Nous n’avons pas rengainé notre épée et nos mains sont prêtes à appuyer sur la détente. Si vous revenez, nous reviendrons aussi. »

La résistance à Gaza a ajouté qu’Israël voulait mettre un terme aux combats

« dès que possible et selon ses propres conditions, en croyant que cela lui permettrait de réaliser son but et de sortir victorieux de la confrontation ».

Mais Israël « a été surpris par la sagesse et la détermination de la résistance ».

 

Les crimes de guerre

Israël a pris pour cibles plusieurs immeubles résidentiels palestiniens de Gaza, dans la soirée de vendredi et à l’aube de samedi, apparemment pour exercer des pressions sur le Djihad islamique.

Dans nombre de ces cas, il s’avérerait qu’Israël a adressé des mises en garde aux résidents afin d’éviter d’autres pertes en vies humaines. Al Mezan a déclaré que « cela ne l’exemptait pas de se conformer aux normes internationales qui réglementent la conduite des hostilités ».

L’organisation de défense des droits a ajouté que

« cibler directement des objectifs civils tels des immeubles résidentiels est strictement interdit par les lois humanitaires internationales »

et que cela « constituait un crime de guerre », selon les statuts de Rome de la Cour pénale internationale.

Cette dernière a ouvert une enquête sur les crimes de guerre en Cisjordanie et dans la bande de Gaza en 2021, mais il semble bien que cette même enquête ait été remisée dans un tiroir par Karim Khan, l’actuel procureur principal de la Cour.

Samedi, le Centre palestinien pour les droits humains, qui siège à Gaza, a demandé à Khan de condamner publiquement les « crimes d’Israël », et a amèrement reproché au procureur de n’avoir pas sorti de déclaration préventive dès le début de la dernière escalade, vu le long passé d’Israël dans le ciblage des civils et des infrastructures civiles.

Israël a réduit des habitations palestiniennes à l’état de ruines en quelques secondes à peine, a déclaré Al Mezan,

« détruisant ainsi les économies de toute une vie de familles entières ainsi que leurs souvenirs (…) et provoquant par la même occasion de graves traumatismes sociaux et psychologiques ».

La fermeture par Israël des check-points du nord de Gaza mardi matin a fait empirer la situation humanitaire déjà pénible du territoire, qui subit un blocus sévère depuis 2007.

Des centaines de Palestiniens qui ont besoin de traitements médicaux – la plupart sont des patients du cancer et 27 d’entre eux ont besoin de soins susceptibles de leur sauver la vie – ont été empêchés d’accéder à des hôpitaux situés en Cisjordanie ou en Israël.

Pendant ce temps, Israël a interdit l’entrée de carburant destiné à la centrale électrique de Gaza, qui n’a de réserves que pour garantir son fonctionnement jusque lundi, et dont l’une des turbines a déjà été mise à l’arrêt il y a quelques jours, rapporte l’ONU.

Le manque de carburant a forcé la fermeture des sites de traitement des eaux et quelque 120 000 mètres cubes d’eaux usées non traitées doivent être déversés quotidiennement dans la Méditerranée, a déclaré Al Mezan, mettant en garde contre « une catastrophe environnementale et sanitaire ».

En sus des fermetures, l’accès aux soins de santé à Gaza a été perturbé par les bombardements israéliens.

Des sites médicaux proches où les patients sont traités ont été endommagés lors des frappes israéliennes de vendredi, qui ont détruit les maisons de deux familles palestiniennes dans le centre de Deir al-Balah.

Les suites des frappes aériennes israéliennes à Deir al-Balah, Gaza

Les suites des frappes aériennes israéliennes à Deir al-Balah (Photo : Atia Darwish / APA images)

Les explosions ont endommagé l’unité des soins intensifs (USI) de l’hôpital al-Aqsa et ont provoqué la panique chez les patients et leur entourage, le plus souvent des femmes et des enfants, rapporte Al Mezan. Un enfant patient et deux employés de l’hôpital ont subi des blessures mineures suite à ces frappes israéliennes.

L’hôpital, qui est le seul à être situé dans le centre de l’enclave et qui est censé desservir environ 350 000 de ses habitants (sur plus de deux millions) a été contraint de fermer ses portes.

Des obus ont également été tirés contre quatre écoles gérées par l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens.

Israël a complètement interdit de pêcher au large de côtes de Gaza tout au long de la période des combats, « affectant plus de 4 400 pêcheurs et leurs familles, qui dépendent de la pêche pour assurer leur principale source de revenu », a ajouté l’ONU.

 

Des civils tués en Cisjordanie

Samedi, pendant qu’Israël pilonnait Gaza, il a également tué trois hommes palestiniens en Cisjordanie occupée.

Samedi latin, des forces clandestines israéliennes ont envahi le camp de réfugiés de Balata, près de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie, et ont assiégé la maison d’un Palestinien recherché, tirant plusieurs grenades propulsées par fusée sur le bâtiment de deux étages, rapporte le Centre palestinien pour les droits humains (CPDH).

L’organisation de défense des droits a déclaré que, lors de ce raid diurne, Saed Jihad Misheh, un commerçant de 32 ans, tentait de rallier son lieu de travail quand il a été abattu et tué d’une balle dans la tête par un sniper israélien.

En tant d’évacuer Misheh, Wasim Adnan al-Araj, 19 ans, a lui aussi été abattu et tué d’une balle dans la tête par un sniper israélien et son corps s’est écroulé sur celui de l’autre homme abattu.

 

13 mai. Des Palestiniens prennent part aux funérailles de Saed Jihad Misheh

13 mai. Des Palestiniens prennent part aux funérailles de Saed Jihad Misheh, 32 ans, et de Wasim Adnan al-Araj, 19 ans, tous deux abattus par les forces d’occupation israéliennes dans le camp de réfugiés de Balata, près de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie. (Photo : Mohammed Nasser APA images)

 

Des prises de vue d’après l’incident montrent les deux hommes gisant au sol, avec du sang couvrant leurs visages pendant que des Palestiniens tentent vainement de leur venir en aide.

Un témoin a expliqué aux médias que les tirs des Israéliens « visaient la tête et non le sol ; leur intention était bien de tuer ».

 

Même quand des passants ont tenté d’apporter de l’aide et de transporter les corps des deux hommes, les tirs israéliens n’ont pas cessé, a ajouté le témoin.

Le CPDH a dit que les hommes abattus étaient tous deux des civils.

Le ministère de la santé à Ramallah a mentionné qu’en outre, trois Palestiniens avaient également été blessés au cours du même raid.

Samedi également, un adulte palestinien a été abattu et tué par la police israélienne des frontières (un corps paramilitaire) à un check-point dans le nord de la Cisjordanie.

Le ministère palestinien de la santé à Ramallah a identifié l’homme abattu. Il s’agit d’Ahmad Muhammad Atatreh, âgé de 33 ans.

La police israélienne des frontières a prétendu qu’Atatreh s’était mis à courir en direction du check-point 300, à proximité de la colonie de peuplement de Shaked, tout en brandissant un couteau, comme c’est fréquemment le cas lors de supposées attaques se traduisant par un décès palestinien.

L’agende d’information officielle de la Palestine, WAFA, a déclaré qu’Atatreh avait été abattu alors qu’il était à vélo près du check-point et que les militaires l’avaient laissé se vider de son sang au sol jusqu’à son décès, empêchant les infirmiers palestiniens et les passants de lui venir en aide.

La famille d’Atatreh a pu l’enterrer samedi, malgré la politique israélienne de confiscation des corps des Palestiniens tués au cours de prétendues agressions contre des Israéliens.

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Maureen Clare Murphy a contribué à cet article.

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Publié le 13 mai 2023 sur The Electronic Intifada
Traductions : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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Ce dimanche 14 mai sur le marché de Charleroi :

Charleroi soutient Gaza

Nous y avons également distribué des flyers pour un débat le 23 mai :

Palestine / Ukraine : Pourquoi les valeurs européennes sont-elles à géométrie variable ?

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