Les probabilités de Spotify accumulées contre Lowkey

En mars 2022, The Electronic Intifada révélait comment la tristement célèbre organisation sioniste « We Believe in Israel » (Nous croyons en I. – WBI) tentait de provoquer le retrait du rappeur Lowkey de la plate-forme Spotify, le géant du streaming, en raison de son soutien véhément à la libération palestinienne.

 

Lowkey au Festival Résistance, organisé par Samidoun Bruxelles, le 27 mai. Photo : Johan Depoortere

Lowkey au Festival Résistance, organisé par Samidoun Bruxelles, le 27 mai (*). Photo : Johan Depoortere

 

Kit Klarenberg, 26 mai 2023

En mars 2022, The Electronic Intifada révélait comment la tristement célèbre organisation sioniste « We Believe in Israel » (Nous croyons en I. – WBI) tentait de provoquer le retrait du rappeur Lowkey de la plate-forme Spotify, le géant du streaming, en raison de son soutien véhément à la libération palestinienne.

Cet effort avait déclenché une pétition visant à s’opposer à cette mesure et qui avait rassemblé des dizaines de milliers de signatures. Et Lowkey était resté sur Spotify.

Mais, conformément à son habitude, le groupe de pression n’a pas été intimidé le moins du monde et, depuis, il a encore intensifié sa campagne.

Comme sujet central de la demande de censure, figuraient six plages spécifiques « soulevant une inquiétude particulière » et qui expriment la solidarité avec la Palestine et son peuple. Quatre ont été enregistrées par Lowkey, une par Ambassador MC, et une autre encore par Shadi al-Bourini et Qassem al-Najjar, tous deux palestiniens.

À l’époque, Rachel Blain, directrice de campagne de WBI, avait déclaré mensongèrement que le morceau de Lowkey, Long Live Palestine, en trois parties, était truffé « d’allusions antisémites à l’argent, au pouvoir et à l’influence ».

Avançons rapidement en mars de cette année, et WBI, avec l’aide du Conseil d’administration de « Deputies of British Jews » (Députés de Juifs britanniques, DBJ, une aile du Labour Party, NdT), était parvenu à faire radier de Spotify le morceau Udrub Udrub Tel Abib (Frappez un bon coup sur Tel-Aviv), de Shadi al-Bourini et Qassem al-Najjar.

Deux autres chansons, Arabic Katyusha (Roquette arabe) et The Death of Israel (La mort d’I.), ne seront plus disponibles non plus sur la plate-forme.

Cette nouvelle a été accueillie triomphalement par les deux organisations et le magazine The Algemeiner. Dans cette procédure, il a été révélé que le groupe de lobbying pro-israélien DBJ avait transmis le problème à la ministre britannique de la Culture digitale, des Médias et des Sports, Lucy Frazer.

Il ne fait aucun doute qu’elle n’ait prêté une oreille favorable à la chose, puisqu’elle est une ancienne interne du ministère israélien de la Justice.

« Il est honteux que la ministre de la Culture digitale, des Médias et des Sports ait subi des pressions de cette façon, sans parler de son passé personnel en tant que collaboratrice interne du ministère israélien de la Justice »

a expliqué Lowkey à The Electronic Intifada.

« Une chose est certaine, dans tout système politique au fonctionnement normal, ce conflit d’intérêt ne serait pas possible. »

WBI – qui, de son propre aveu, travaille avec l’ambassade d’Israël en Grande-Bretagne – tire parti d’une autre ligne directe avec le gouvernement britannique. La Rachel Blain susmentionnée est désormais directrice des affaires publiques de l’organisation « Conservative Friends of Israel » (Les amis conservateurs d’I., CFI).

L’ancien ministre des Affaires étrangères, Alan Duncan, un sympathisant conservateur des droits palestiniens tout au long de sa carrière politique, a accusé les CFI d’avoir bloqué sa désignation au poste de ministre du Moyen-Orient auprès de la direction israélienne.

Le profit LinkedIn de Blain affirme qu’elle est une ancienne interne au CA des DBJ ainsi que d’une « ambassade internationale à Londres », sans autre spécification.

Il serait surprenant que ce ne soit pas l’ambassade d’Israël.

 

Un opérateur sérieux

La croisade de WBI contre les musiciens propalestiniens s’est considérablement intensifiée en juin 2022, quand l’« Institute for Strategic Dialogue » (Institut pour un dialogue stratégique – ISD) a rallié le conseil consultatif nouvellement constitué de Spotify concernant la sécurité.

Manifestement, le rôle de l’organisation « était d’aider à enrayer la diffusion de désinformation » sur la plate-forme. Mais The Electronic Intifada a récemment dénoncé l’implication d’ISD dans des opérations secrètes d’espionnage à l’encontre de Palestiniens et ce, pour le compte du gouvernement britannique.

L’ISD a été fondé par George Weidenfeld, ancien conseiller politique et chef de cabinet du premier président d’Israël Chaim Weizmann, et qui a été décrit dans un article – retiré depuis – du New Statesman comme « un opérateur sérieux au niveau du gouvernement, des éditeurs et des propriétaires des médias », qui se servait de son influence « discrète » pour enterrer la couverture médiatique critique envers l’État sioniste.

L’actuel président de l’ISD est Michael Lewis, naguère un acteur clé dans l’United Jewish Appeal (Appel juif unifié), qui a été décrit un jour comme « une importante organisation britannique de collecte de fonds en faveur d’Israël ».

Lewis a également été président adjoint et sponsor du Britain Israeli Communication Research Centre (Centre de recherche britannique sur la communication en Israël).

Pendant ce temps, le conseiller juridique et commercial de Spotify, Andrew Joseph, a passé deux ans dans la Brigade d’infanterie israélienne Nahal. Spotify même opère en partenariat avec Riverside.fm, une firme israélienne fournissant en ligne des services d’enregistrement audio et vidéo de haute qualité.

Se vantant d’avoir Hillary Clinton comme utilisatrice, l’équipe de Riverside.fm est truffée de vétérans de l’armée israélienne. Par exemple, un « ingénieur back-end en chef » de la firme, Yan Nirman, est un vétéran (quatre ans de service) du J6 de l’armée et du Directorat de la Cyberdéfense. Chen Portsia, un analyste de données, a passé de même quatre ans dans l’armée, qu’il a quittée avec le grade de « commandant d’équipe ».

Les cotes de probabilité de Spotify semblent s’accumuler contre Lowkey. Pourtant, ni lui ni ses nombreux fans ne se laisseront intimider par la guerre du lobby israélien contre lui, a-t-il expliqué à The Electronic Intifada, exactement de la même façon que les Palestiniens du monde entier restent bien décidés face aux incessantes tentatives sionistes en vue de les soustraire pour de bon de la vue du public.

« Il est dérangeant que des organisations ayant des liens manifestes avec le groupe qui a initié cette campagne occupent des positions d’autorité une fois qu’il s’agit de décider quel contenu est sûr ou pas sur la plate-forme Spotify »,

dit-il encore.

« Un nombre vraiment énorme de personnes sont opposées à cela et elles feront sentir leur présence si jamais Spotify cède aux exigences du lobby ».

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Kit Klarenberg est un journaliste d’investigation. Twitter : @KitKlarenberg.

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Publié le 26 mai 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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(*) Plus de 700 personnes au Festival Résistance organisé par Samidoun Bruxelles

 

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