Ben-Gvir encense comme « héros » les colons qui abattent des ados

Dimanche après-midi, l’armée israélienne a ouvert le feu sur une voiture à Jénine, tuant trois Palestiniens. C’était la dernière surenchère dans le déchaînement israélien en cours contre les Palestiniens, en y ajoutant, depuis vendredi, l’assassinat d’un adolescent par des colons et l’exécution extrajudiciaire d’un enfant par des soldats.

 

5 août 2023. Des Palestiniens portent le corps de Qusai Jamal Mutan, 19 ans, lors de ses funérailles à Burqa, un village à l’est de Ramallah, en Cisjordanie occupée.

5 août 2023. Des Palestiniens portent le corps de Qusai Jamal Mutan, 19 ans, lors de ses funérailles à Burqa, un village à l’est de Ramallah, en Cisjordanie occupée. (Photo : Ahmad Arouri / APA images)

 

Tamara Nassar, 6 août 2023

Dans le même temps, les agressions et le vol de terre par Israël continuent de provoquer de violentes représailles de la part de la résistance palestinienne.

Un porte-parole de l’armée israélienne a prétendu que les trois Palestiniens s’apprêtaient à commettre un attentat et il a déclaré aux médias que leur mort constituait donc « l’élimination d’une menace réelle et immédiate ».

Selon le quotidien de Tel-Aviv, Haaretz, le porte-parole a prétendu que les trois Palestiniens

« prévoyaient une attaque à coups de feu depuis leur véhicule au moment où ils étaient tombés dans une embuscade préméditée. »

Cette embuscade « préméditée » suggère que ces hommes ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires – ce qui constitue un crime de guerre.

L’armée israélienne a affirmé qu’elle avait découvert une carabine M16 dans la voiture, étayant par-là son assertion qu’il s’agissait d’une « cellule terroriste » se préparant à perpétrer un attentat. Toutefois, on ne voit pas très bien pourquoi un groupe de trois combattants de la résistance palestinienne en voie d’effectuer une opération n’aurait emporté qu’une seule arme pour trois hommes.

Defense for Children International – Palestine (DCI-P) a fait savoir dimanche soir qu’il y avait un enfant, parmi les trois morts :

 

Ces meurtres peuvent avoir été une opération de représailles suite aux coups de feu d’un Palestinien à Tel-Aviv, dimanche soir, qui avaient tué un policier israélien.

Un deuxième policier avait tué le tireur palestinien présumé, Kamel Mahmoud Abu Baker, originaire de Rummanah, à l’ouest de Jénine, en Cisjordanie occupée.

Un reportage dans les médias israéliens révélait qu’Abu Baker était recherché par les autorités d’occupation israéliennes.

 

Des colons tuent un ado

Vendredi soir, une vingtaine de colons ont envahi Burqa, à l’est de Ramallah, en Cisjordanie occupée.

Les colons ont débarqué sur les terres du village avec un troupeau de moutons et se sont mis à vandaliser des propriétés, incitant ainsi les Palestiniens à les chasser.

Un témoin palestinien a expliqué à Haaretz que les colons étaient armés. Les colons ont jeté des pierres contre les Palestiniens et ils ont ouvert le feu sans discrimination.

Deux colons israéliens sont soupçonnés d’avoir tué Qusai Jamal Mutan, 19 ans, qui

« cuisait de la nourriture sur un feu et n’était en rien impliqué dans les événements »,

affirme le Centre palestinien pour les droits humains (CPDH).

Les tirs des colons ont également blessé deux autres Palestiniens, selon le CPDH.

« Le colon n’était qu’à cinq mètres de Mutan quand il a directement ouvert le feu sur lui, le blessant d’une balle dans le cou »,

a expliqué un témoin au CPDH.

Selon Haaretz, l’un des tireurs suspectés a été décrit par un « responsable de la sécurité » israélien comme étant un activiste d’extrême droite qui, précédemment, travaillait comme porte-parole d’un député de Force juive, le parti du ministre israélien de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir.

Cela correspond à la description d’Elisha Yered, un colon fanatique qui a poussé ouvertement et à maintes reprises au nettoyage ethnique et au génocide contre les Palestiniens.

Naguère, Yered a travaillé comme porte-parole de Limor Son Har-Melech, un député de Force juive.

Dimanche, Ben-Gvir a encensé en tant que « héros » les colons soupçonnés d’avoir abattu Mutan.

Précédemment, Yered avait fait circuler sur WattsApp une vidéo réclamant que soit incendiée la ville palestinienne de Huwwara. La vidéo, qui avait été partagée avec des journalistes israéliens, était intitulée : « Questions et réponses : Pourquoi Huwwara devrait-elle être rayée de la carte ? »

En mars, Yered avait tweeté : « Je ne reviendrai pas sur ma déclaration très claire : Le village de Huwwara devrait être rayé de la carte. »

Le même mois, Yered exprimait sa déception de voir « ce village toujours debout ».

On présume que Yered a figuré en haut de la liste de surveillance de la police interne sécuritaire israélienne, le Shin Bet.

N’empêche qu’il exhibait un grand sourire au tribunal israélien où lui et un autre colon se voyaient imposer d’être détenus pour cinq jours seulement – un saisissant contraste avec les mois ou années de détention sans accusation ni procès habituellement infligés par Israël aux Palestiniens soupçonnés de « délits sécuritaires ».

« Le fait que la police n’a requis que cinq jours de détention de plus pour les suspects, et ce, malgré la gravité des charges auxquelles ils sont confrontés, est considéré comme inhabituel »,

rapportait Haaretz.

« Ce peut être un signe que l’affaire contre les suspects est faible. »

Auparavant, les autorités israéliennes avaient déjà relâché cinq autres colons arrêtés après l’incident.

Yehiel Indore, l’autre colon israélien soupçonné dans la mort de Mutan, a été blessé par une pierre, dit-on. Il n’était pas présent au tribunal.

Le meurtre de l’adolescent par les colons a attiré les critiques pour la forme de la part des alliés d’Israël, les États-Unis et la Grande-Bretagne, mais ni l’un ni l’autre n’ont montré de signe qu’ils iraient au-delà des mots dans des actions en vue de responsabiliser Israël.

 

 

L’envoyé de l’Union européenne en Israël n’a condamné que le meurtre du policier israélien à Tel-Aviv et a gardé le silence sur les autres meurtres de Palestiniens par Israël, dont l’apparente exécution extrajudiciaire d’un enfant, vendredi.

 

Exécution d’un enfant en pleine rue

Tôt le matin, vendredi, les forces d’occupation israéliennes ont envahi le camp de réfugiés de Tulkarem, déclenchant ainsi des confrontations avec les Palestiniens défendant le camp.

Au moment où les forces d’occupation se retiraient, des soldats dans un véhicule blindé ont abattu Mahmoud Husam Abu Saan, 17 ans, à une distance d’environ 50 mètres, a révélé une enquête de DCI-P.

« Une fois touché, Mahmoud s’est écroulé en criant »,

a déclaré l’organisation de défense des droits.

« Les forces israéliennes à l’intérieur du même véhicule militaire se sont approchées et ont à nouveau ouvert le feu, lui tirant une balle dans la tête à une distance de trois mètres. »

Une voiture privée a emmené l’adolescent à l’hôpital, où les médecins ont confirmé son décès.

« Lui tirer une seconde balle dans la tête à bout portant, alors qu’il était hors d’état de faire quoi que ce soit, équivaut à une exécution extrajudiciaire et à un étalage flagrant de l’impunité dont bénéficient les forces israéliennes »,

a déclaré Ayed Abu Eqtaish, de DCI-P.

 

Abu Saan est le deuxième enfant palestinien tué par les forces d’occupation israéliennes depuis le début de ce mois.

Le 1er août, les forces israéliennes ont tué un jeune Palestinien de 15 ans et ont emmené son corps.

Deux soldats israéliens se sont approchés de Muhammad Farid Shawqi al-Zaarir alors qu’il se rendait à pied vers un arrêt de bus sur la Route 60, à proximité d’un poste avancé de colonie israélienne au sud de Hébron. Selon DCI-P, l’armée israélienne prétend qu’al-Zaarir a tenté de poignarder les soldats avant qu’ils n’ouvrent le feu pour le tuer.

Au moment d’écrire ces lignes, l’organisation de défense des droits humains était toujours incapable de déterminer combien de blessures par balles Muhammad avait reçues, où elles se situaient sur son corps, si les militaires l’avaient laissé se vider de son sang ou s’il avait reçu des soins médicaux.

 

« Israël est le seul pays au monde appliquant une politique de confiscation des restes humains »,

a déclaré Abu Eqtaish.

« Sans restitution du corps, il ne peut y avoir d’autopsie indépendante pour confirmer comment Muhammad a été tué. »

Depuis juin 2016, Abu al-Zaarir fait partie des 17 enfants dont les forces d’occupation israéliennes ont confisqué les corps après les avoir tués. Seuls trois de ces corps ont été restitués à leurs familles afin d’être enterrés.

Depuis le début de l’année, 38 enfants palestiniens ont été tués dans la violence relative à l’occupation militaire israélienne, fait savoir DCI-P.

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Publié le 6 août 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

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