Refaat Alareer a bel et bien été assassiné par Israël

Israël a assassiné l’écrivain et enseignant, le Dr Refaat Alareer. La frappe aérienne israélienne qui a tué Refaat et plusieurs membres de sa famille le 6 décembre était « apparemment délibérée », a conclu l’Observatoire/Réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme (REMDH).

 

Le Dr Refaat Alareer lors de la cérémonie de remise des diplômes aux étudiants de l’Université islamique de Gaza, en 2022. (Photo : Via Instagram)

Le Dr Refaat Alareer lors de la cérémonie de remise des diplômes aux étudiants de l’Université islamique de Gaza, en 2022. (Photo : via Instagram

 

Tamara Nassar, 9 décembre 2023

Refaat avait travaillé en collaboration étroite avec The Electronic Intifada et il faisait partie des opposants les plus en vue à la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza.

Il avait cherché refuge dans l’appartement de sa sœur Asmaa, dans le quartier d’al-Daraj, à Gaza. Mercredi, vers 18 heures, l’appartement a « subi une frappe chirurgicale, puisqu’il est le seul à avoir été touché dans l’immeuble où il est situé », a déclaré le REMDH, citant la déclaration corroborée d’un témoin oculaire et les récits de la famille.

Refaat a été en compagnie de son frère Salah et d’un des enfants de ce dernier, Muhammad. Sa sœur Asmaa et trois de ses enfants – Alaa, Yahya et Muhammad – ont également été tués, ainsi qu’un de leurs voisins.

D’autres membres de la famille ont eux aussi été blessés par l’attaque israélienne.

« La frappe aérienne a chirurgicalement ciblé l’appartement du premier étage (d’un immeuble à trois niveaux) dans lequel se trouvait Refaat, et non le bâtiment tout entier.  Cela montre que l’appartement était bel et bien la cible et qu’il n’était pas possible qu’il s’agisse de dégâts collatéraux »,

a déclaré le REMDH.

Refaat avait été déplacé à de multiples reprises dans la bande de Gaza après que sa maison avait été attaquée au cours de la deuxième semaine de l’offensive génocidaire lancée par Israël contre l’enclave dès le 7 octobre.

Quelques jours avant d’être tué, Refaat avait déménagé avec sa femme et ses enfants dans une école de l’UNRWA (Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens) située dans le quartier d’al-Tuffah, à Gaza même.

Un ami proche de Refaat a expliqué à l’organisation des droits humains qu’il a pu avoir été contacté par l’armée israélienne alors qu’il se trouvait à l’école.

« Il avait reçu un appel téléphonique anonyme de quelqu’un qui s’était présenté comme un officier israélien et qui avait menacé Refaat en lui disant que l’armée savait exactement dans quelle école il se trouvait »,

a déclaré l’organisation, citant l’ami proche.

Les forces israéliennes

« étaient sur le point de se rendre en cet endroit, vu la progression de leurs troupes terrestres »,

a ajouté l’organisation.

Alors que le REMDH dit que « la crédibilité de la menace même n’est pas claire », ç’a été à coup sûr l’une des raisons qui a incité Refaat à déménager à nouveau au domicile de sa sœur,

« croyant qu’il y serait mieux caché que dans une école ouverte et surpeuplée où il lui aurait été difficile de se dissimuler ».

L’organisation a conclu que Refaat était très probablement ciblé par les forces israéliennes.


« Tout est intentionnel »

Une enquête récente de +972 Magazine et de Local Call a montré comment l’armée israélienne se sert de l’intelligence artificielle pour générer davantage de cibles à frapper à Gaza.

Citant des sources provenant des renseignements, le rapport disait que

« l’armée israélienne a des dossiers sur la grande majorité des cibles potentielles à Gaza – dont des maisons –, lesquels dossiers stipulent le nombre de civils susceptibles d’être tués lors de l’attaque d’une cible particulière ».

 

« Rien n’arrive par accident »,

a affirmé une source.

« Quand une fillette de trois ans est tuée dans une maison à Gaza, c’est parce que quelqu’un dans l’armée a décidé que ce n’était pas un gros problème pour elle d’être tuée – que c’était le prix qu’il valait la peine de payer afin de frapper [une autre] cible »,

a ajouté la source.

« Nous ne sommes pas le Hamas. Ce ne sont pas des roquettes errantes. Tout est intentionnel. Nous savons exactement combien de dégâts collatéraux il y a dans chaque maison. »

Le fait que le logement de la sœur de Refaat était le seul appartement attaqué de l’immeuble ce soir-là contribue à la conclusion qu’il a été délibérément ciblé.


Déjà bombardé précédemment

Ce n’était pas la première fois que Refaat Alareer était bombardé depuis le 7 octobre.

Le 19 octobre, l’armée israélienne avait bombardé le bâtiment où vivait Refaat à Gaza sans le moindre avertissement. Deux appartements avaient été complètement détruits et cinq autres, dont celui de la famille de Refaat, avaient été sévèrement endommagés.

Refaat accueillait quatre familles déplacées, au moment où son immeuble avait été bombardé. Tous les hôtes de sa famille étaient des femmes et des enfants.

À l’époque, la maison de Refaat était pourvue d’un générateur d’électricité, de carburant pour plusieurs mois et de panneaux solaires.

« Depuis le début de l’attaque israélienne, nous avons aidé de très nombreuses personnes à pomper de l’eau, à charger leurs appareils électriques et à garder leurs congélateurs en état de fonctionnement »,

avait écrit Refaat dans The Electronic Intifada le 22 octobre.

« Je crois que c’est une des raisons pour lesquelles notre immeuble a été touché. »

D’autres membres de la famille élargie de Refaat croient qu’il a été spécifiquement visé parce qu’il s’exprimait.

« Nous ne savons pas pourquoi l’immeuble a été ciblé. Ma belle-mère insiste en disant que c’est du fait que je m’adresse aux médias »,

avait-il écrit.

« Ma mère a aussi soulevé la même inquiétude. »

Refaat et sa famille avaient été déplacés, dès ce jour. Ils s’étaient réfugiés dans un hôpital, puis dans une école.

À un moment donné, la famille avait séjourné à l’hôpital Rantisi pour enfants à Gaza même, mais avait dû évacuer du fait que les forces israéliennes approchaient.

Il avait rédigé un article pour The Electronic Intifada, dénonçant le mensonge prétendant que le Hamas opérait depuis l’hôpital.

Dans le passé, Refaat et sa famille avaient été ciblés de nombreuses fois par les forces israéliennes, et des douzaines de ses proches avaient péri.

Sa première contribution écrite à The Electronic Intifada honorait la mémoire de son frère Mohammed, tué dans sa maison par une frappe aérienne des Israéliens, en 2014.

« Mon frère sera le martyr n° 26 de ma famille élargie »,

avait écrit Refaat Alareer à l’époque.

D’autres membres de la famille Alareer ont vécu, sont morts et ont été tués sous l’ombre du siège brutal imposé par Israël et de ses assauts successifs contre la bande de Gaza.


L’assassinat d’un personnage

Comme si le fait de l’assassiner ne suffisait pas, des trolls soutenant Israël et son idéologie d’État le sionisme ont tenté d’assassiner également son personnage, avant et après son assassinat physique.

« Pendant des semaines depuis le début de cette guerre, Refaat a reçu de nombreuses menaces de mort et messages de haine au départ de comptes israéliens sur les médias sociaux, et ce, après que d’éminentes personnalités publiques l’avaient isolé en vue de le harceler et de lancer des incitations contre sa personne »,

a déclaré REMDH.

L’une de ces personnalités publiques était Bari Weiss.

Weiss avait mis en épingle un tweet rédigé par Refaat à propos d’un bobard démystifié en public disant que des militants palestiniens avaient brûlé vif un bébé dans un four, le 7 octobre.

« Et voici Refaat Alareer qui plaisante quant à savoir si oui ou non un bébé israélien, brûlé vif dans un four, l’a été avec ou sans levure chimique »,

écrivait Weiss.

 

Par la suite, Refaat avait reçu des menaces de mort et des messages de haine dans les médias sociaux.

« Bien des soldats israéliens passablement perturbés qui bombardent Gaza prennent ces mensonges et calomnies au sérieux et ils agissent en fonction de cela »

avait écrit Refaat à ce moment.

 

Cette fois, les trolls sionistes recourent à la même tactique pour tenter d’assassiner le personnage de Refaat, un universitaire connu au niveau international, aimé et respecté par des générations de Palestiniens et de personnes du monde entier.

 

Le ciblage d’universitaires

Quelques jours avant l’assassinat de Refaat, Israël avait déjà assassiné le Dr Sufyan Tayeh, président de l’Université islamique de Gaza, où Refaat enseignait la littérature anglaise.

Dans le courant de ce mois, les forces israéliennes avaient également planté des explosifs et bombardé la faculté de médecine de l’Université islamique de Gaza.

Le commentateur de droite, Yinon Magal, a commenté cette attaque en la qualifiant de « cadeau de Hanoucca », du nom d’une fête juive qui se déroule du 7 au 15 décembre [et non « d’après une division de l’armée israélienne », comme le prétend Tamara Nassar !!! NdT].

 

Le fait que l’immeuble n’a pas été frappé par des avions de combat mais plutôt par des militaires mêmes qui y ont planté des bombes, suggère qu’il n’y avait pas de « risque » pour leur vie et qu’ils ne ciblaient pas la résistance palestinienne à l’intérieur de l’immeuble.

Une photo montre un soldat israélien qui pose à proximité d’un bâtiment de la faculté de médecine avec, tout à côté, une menorah (chandelier juif à sept bras, NdT) géante en signe de conquête.

La plaque portant le nom du bâtiment et celui du donateur qui a contribué à le construire a été vandalisée et porte les mots « C’est à nous, désormais » en anglais.

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Publié le 9 décembre 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Charleroi pour la Palestine

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