La situation désespérée des femmes enceintes à Gaza
Il y a extrême urgence, à Gaza, spécialement pour les femmes enceintes. S’il n’y a pas de cessez-le-feu et qu’on ne permet pas que l’aide atteigne chaque région, nous pouvons nous attendre à ce que la situation empire encore.
Roba Almadhoun, 26 avril 2024
Une évaluation prénatale est essentielle si l’on veut garantir la santé et le bien-être et de la femme et de son enfant à venir.
Le stress pendant la grossesse – et particulièrement le stress provoqué par une guerre – peut avoir des conséquences néfastes.
Les guerres bouleversent les services locaux, rendant ainsi plus malaisé l’accès aux soins de santé essentiels. Cela aggrave considérablement la situation des mères et des femmes enceintes.
À Gaza, environ 180 femmes accouchent quotidiennement. Sur les onze hôpitaux qui fonctionnent encore en partie à Gaza, seuls trois fournissent des soins maternels.
Je travaille dans un hôpital de campagne récemment aménagé. Il est situé dans une zone où les gens n’ont qu’un accès très limité à des cliniques.
Lors de mes conversations avec les patients, une femme dans son huitième mois de grossesse m’a dit que c’était son tout premier check-up prénatal.
Wasan est un nom qui me restera à jamais en mémoire, tout d’abord du fait de sa rareté et, ensuite, parce que je l’associe désormais à une tragédie.
Wasan m’a expliqué qu’elle avait manqué quatre mois de rendez-vous de suivi du fait qu’elle avait été déplacée à maintes reprises au cours de la présente guerre génocidaire. Elle s’était rendue à l’hôpital de campagne, vu qu’elle n’avait plus ressenti le moindre mouvement dans son ventre au cours des précédentes 24 heures.
Malheureusement, aucun battement de cœur fœtal n’avait été décelé lors d’un scanner aux ultrasons. Cela indiquait qu’elle avait fait une fausse couche.
Annoncer cette nouvelle à Wasan fut très pénible.
Déchirant
Une femme enceinte appelée Halima avait été diagnostiquée comme faisant de l’hypertension artérielle deux semaines avant qu’Israël ne déclare la guerre à Gaza.
En raison des énormes difficultés pour accéder aux soins de santé, Halima n’avait pu obtenir les soins dont elle avait besoin du fait que sa grossesse devenait plus avancée.
Elle avait été amenée dans la salle d’urgence de notre hôpital de campagne en se plaignant d’un mal de tête que l’on avait attribué aux hausses de sa tension artérielle.
Après avoir été examinée, on avait diagnostiqué chez Halima une pré-éclampsie, ce qui nécessitait l’accouchement prématuré de son bébé.
Il est plus que probable que le bébé ne pourra recevoir les soins que requiert normalement un bébé, du fait que le système des soins de santé de Gaza a été soumis à des attaques directes et placé de la sorte sous une pression impressionnante.
Le cas le plus déchirant que j’aie rencontré a été celui d’une femme appelée Nuha.
Elle s’était évanouie.
Après que nous l’eûmes ranimée, Nuha avait dit :
« Je ne veux pas qu’un docteur m’examine. Je ne veux pas accoucher maintenant. Je veux juste m’en aller et aller voir mon fils Hasan. »
Une heure à peine avant l’arrivée de Nuha à l’hôpital, son fils Hasan avait été tué.
Des proches de Nuha l’avaient transportée chez nous du fait qu’elle était dans ses douleurs. Elle avait perdu conscience dès son arrivée.
Voici quelques instantanés des souffrances endurées par les femmes enceintes que nous soignons quotidiennement.
Il y a extrême urgence, à Gaza, spécialement pour les femmes enceintes. S’il n’y a pas de cessez-le-feu et qu’on ne permet pas que l’aide atteigne chaque région, nous pouvons nous attendre à ce que la situation empire encore.
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La Dre Roba Almadhoun est obstétricienne à Gaza.
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Publié le 26 avril 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine