Un bombardement israélien anéantit une famille entière à Tulkarem

Les corps étaient déchiquetés, déclare une paramédicale à propos de la scène après que, jeudi soir, un avion de combat israélien a tiré des missiles sur un immeuble du camp de réfugiés de Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie occupée.

 

4 octobre 2024. Des personnes endeuillées assistent aux funérailles de Palestiniens tués le soir précédent lors d'une frappe de l'aviation israélienne sur le camp de réfugiés de Tulkarem, en Cisjordanie occupée.

4 octobre 2024. Des personnes endeuillées assistent aux funérailles de Palestiniens tués le soir précédent lors d’une frappe de l’aviation israélienne sur le camp de réfugiés de Tulkarem, en Cisjordanie occupée. (Photo : Mohammed Nasser / APA images)

 

Tamara Nassar, 6 octobre 2024

Les corps étaient déchiquetés, déclare une paramédicale à propos de la scène après que, jeudi soir, un avion de combat israélien a tiré des missiles sur un immeuble du camp de réfugiés de Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie occupée.

Le bombardement a tué au moins 18 Palestiniens, dont trois enfants.

« À 80 pour 100, les martyrs ne sont plus que des parties de corps »,

explique aux médias Dalia Hadaideh, la paramédicale.

« Nous ne savons pas de qui sont ces cadavres »,

ajoute-t-elle, en expliquant qu’ils ont découvert

« des scalps, la peau de certains troncs, des oreilles, des bras, des os, des dents éparpillées et des restes d’enfants accrochés à des lignes électriques ».

Un autre témoin, Ibrahim Abu Zahra, dit qu’il a vu

des « corps carbonisés » et brûlés et des « parties arrachées à des corps de femmes et d’enfants ».

Les recherches de Palestiniens piégés sous les décombres de l’immeuble se sont poursuivies jusqu’aux premières heures du lendemain.

Trois missiles israéliens ont percé le toit de l’immeuble, en passant verticalement à travers les troisième et deuxième étages avant d’atterrir au premier. Les missiles ont détruit entièrement le bâtiment et ont endommagé les habitations voisines.

Israël ciblait des membres de la résistance armée palestinienne dans le camp qui se trouvaient apparemment dans un café au rez-de-chaussée.

« Tout le camp fréquente le café », déclare aux médias Yousef Gourab, un témoin oculaire.

« Les gens viennent, ils boivent du thé, c’est un lieu public. »

Nimr Fayed, le propriétaire du café, a perdu son frère dans le bombardement.

« Toute la scène était éclaboussée de sang et cela reflète bien la sauvagerie et le nazisme de cette occupation »,

explique-t-il à Middle East Eye.

Nimr Fayed dit que c’était une soirée ordinaire dans le café. Les gens s’étaient rassemblés pour manger et pour fumer quand des avions de combat israéliens s’étaient mis à tirer sur l’immeuble.

Il n’y avait pas de confrontations entre les organisations armées de Palestiniens et les forces israéliennes, au moment de la frappe, qui a eu lieu sans le moindre avertissement.

Sept membres des Brigades Qassam, l’aile militaire du Hamas, ont été tués lors de cette frappe. L’organisation a reconnu que son commandant, Zahi Yasser Oufi, a également été tué.

 

Toute une famille massacrée

Les frappes israéliennes ont également tué toute une famille palestinienne qui vivait dans un appartement tout près du café.

Muhammad Abu Zahra et sa femme, Saja, étaient chez eux avec leurs deux enfants, Karam Muhammad Abu Zahra, 5 ans, and Sham Muhammad Abu Zahra, 8 ans, quand Israël a bombardé l’immeuble.

Les corps des parents et de leurs enfants ont été découverts enchevêtrés au bout d’une heure de recherches, révèle une enquête effectuée sur les lieux par l’organisation des droits humains Defense for Children International – Palestine (DCI-P).

« Karam et Sham, ainsi que leurs parents, avaient subi des blessures dues aux éclats et présentaient de multiples brûlures sur tout le corps »,

déclare l’organisation.

Enfants tués par l'armée israélienne à Tulkarem : Karam Mohammad Salah Abu Zahra, 5 ans, Sham Mohammad Salah Abu Zahra, 8 ans, et Mohammad Ma'mon Mohammad Anbas, 16 ans

Karam Mohammad Salah Abu Zahra, 5 ans, Sham Mohammad Salah Abu Zahra, 8 ans, et Mohammad Ma’mon Mohammad Anbas, 16 ans



La mère de Saja, Amal Khayroush, explique à Reuters qu’elle a été informée de leur décès par les médias sociaux. Reuters rapporte qu’un cinquième membre de la famille a été tué au cours de la même attaque.

« J’appelais Saja, j’appelais son mari, mes fils, j’ai appelé ma sœur qui vit près de chez Saja, personne ne répondait »,

déclare Amal Khayroush à Reuters.

« Je me suis donc mise à courir vers chez elle dans le camp. Je ne savais pas comment j’allais faire pour arriver au camp. »

Les missiles israéliens

« sont entrés par le plafond et par le sol de leur cuisine, laissant bon nombre d’armoires bizarrement intactes »,

rapporte encore Reuters.

Un troisième enfant, Muhammad Mamun Anbas, 16 ans, se trouvait dans le café au moment de la frappe israélienne.

« Son corps a été complètement brisé »,

dit DCI-P.

On l’a retrouvé sous les décombres avant de le transférer vers un hôpital tout proche, ajoute l’organisation.

« À l’arrivée, on n’a pu que constater son décès. »

« Des enfants comme Karam, Sham et Muhammad grandissent dans des communautés palestiniennes au sein desquelles les forces israéliennes effectuent régulièrement des attaques et incursions en toute impunité et prouvent tant et plus qu’aucun endroit n’est sûr pour les enfants palestiniens »,

dit Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation à DCI-P.


Condamnation

Le bureau des droits de l’homme de l’ONU a déclaré que le bombardement israélien était un exemple de recours à une violence meurtrière, « inutile, disproportionnée et de ce fait illégale », laquelle est devenue la norme en Cisjordanie occupée depuis le 7 octobre 2023.

L’armée israélienne a déclaré qu’elle collaborait avec le Shin Bet, l’agence israélienne de la police secrète intérieure spécialisée dans la torture et l’assassinat, afin de cibler des hommes quand ils se rassemblent, tout en prétendant qu’ils prévoient une agression immédiate contre l’État israélien.

Les exécutions extrajudiciaires constituent une pierre angulaire des efforts d’Israël en vue de réprimer toute résistance palestinienne dans les territoires qu’il occupe et au-delà.

Près de 700 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée depuis le 7 octobre 2023, selon le bureau des droits de l’homme à l’ONU. Quelque 190 d’entre eux ont été tués par des frappes aériennes.

Dans la seule ville de Tulkarem, 88 Palestiniens ont été tués par les frappes aériennes depuis lors.

Cette toute dernière frappe de l’aviation israélienne porte à 83 le nombre d’enfants palestiniens tués en Cisjordanie depuis le début de l’année, y compris deux citoyens américains.

Ce lundi, cela faisait un an qu’Israël a lancé son offensive génocidaire contre les Palestiniens de la bande de Gaza. Depuis ce jour, 164 enfants palestiniens ont été tués dans la seule Cisjordanie occupée.

Le commentateur palestinien Mustafa Barghouti a décrit la frappe aérienne à Tulkarem comme une forme

« d’extension du génocide à la Cisjordanie ».

 

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Publié le 6 octobre 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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