Israël viole le cessez-le-feu et ouvre le feu sur un mariage à Gaza
À Gaza, Israël a régulièrement continué de tuer et de blesser des Palestiniens en dépit du cessez-le-feu du 10 octobre, alors que l’aide humanitaire, si désespérément nécessaire – fournitures pour abris, médicaments, denrées alimentaires de base et matériaux de réparation des infrastructures –, reste bloquée et que la plupart des passages sont fermés.

5 novembre 2025, au camp de réfugiés de Nuseirat. À l’approche de l’hiver, les Palestiniens déplacés de force ont bien du mal à se débrouiller dans leurs conditions de vie des plus pénibles que leur imposent les attaques d’Israël. L’État sioniste continue de bloquer l’entrée des matériaux destinés à monter des abris décents. (Photo : Belal Abu Amer / APA images)
Nora Barrows-Friedman, 7 novembre 2025
Le texte qui suit est un condensé des informations communiquées lors du livestream du 6 novembre. Vous pouvez voir l’émission dans sa totalité ici.
Le 5 novembre, Israël a tué deux Palestiniens au cours d’incidents séparés, prétendant qu’ils avaient franchi la prétendue ligne jaune où l’armée israélienne maintient son contrôle. Al Jazeera a fait savoir que peu d’informations avaient été transmises à propos de la position exacte de cette ligne, et comme elle est toujours en cours de marquage physique sur le sol, elle constitue un autre danger mortel pour les Palestiniens.
Le reporter Ebrahim Saeed a fait état de cette partition invisible dans le nord de Gaza, où les Palestiniens expliquent qu’ils ne peuvent accéder à leurs maisons et propriétés et qu’ils sont constamment menacés par les snipers et les chars israéliens.
Le 4 novembre, un Palestinien a été tué et un autre blessé lorsqu’un quadricoptère israélien a ouvert le feu dans la zone est de la ville de Gaza. Un autre a été tué à Jabaliya, dans le nord de Gaza et, cette fois encore, l’armée a prétendu qu’elle avait tiré sur l’homme parce qu’il avait franchi cette fameuse ligne jaune.
Lundi 3 novembre les forces israéliennes ont tué et blessé des Palestiniens dans le sud de Gaza.
Le porte-parole de la défense civile, Mahmoud Basal, a déclaré que, le même jour, les forces israéliennes avaient ouvert le feu sur un mariage dans le quartier de Shujaiya (zone est de la ville de Gaza), blessant plusieurs enfants dont une fillette de 8 ans, Sundus Heles.
Basal a expliqué que l’attaque avait eu lieu à l’intérieur de ce qu’on a appelé la « ligne jaune sûre » dans cette partie est de Gaza,
« une zone qui, dans le cadre du cessez-le-feu concocté par les EU, constitue une limite de première phase au-delà de laquelle les forces d’occupation israéliennes sont censées se retirer, et où elles doivent s’abstenir de toute agression ».
Euro-Med Human Rights Monitor a déclaré le 31 octobre que, depuis le début du cessez-le-feu, 219 Palestiniens avaient été tués, dont 85 enfants.
Dans les parties est, nord et sud de la bande de Gaza, au-delà d’où l’armée israélienne a dessiné cette vague frontière qu’est la ligne jaune, Israël a continué de recourir aux bombes et aux frappes aériennes pour anéantir des blocs entiers et détruire toute trace d’habitations, de terres agricoles et d’infrastructures palestiniennes.
Euro-Med a déclaré que ces actions
« suggèrent qu’Israël consolide une nouvelle réalité en se permettant de mener d’incessantes opérations militaires dans les zones qu’il contrôle – couvrant en gros 50 pour 100 de Gaza – tout en les évinçant du cadre du cessez-le-feu, sans s’engager dans des opérations de combat uniquement destinées à la destruction ou à l’élimination de futurs moyens de subsistance ».
Cinq pêcheurs palestiniens ont été arrêtés mardi après que des canonnières israéliennes ont ouvert le feu sur leurs bateaux de pêche à proximité du port de Gaza, « forçant les pêcheurs à sauter dans l’eau (…) avant de les menotter et de les arrêter », selon une déclaration de l’Union des Comités du Travail agricole.
Israël continue d’interdire de pêcher aux Palestiniens en dépit de l’accord de cessez-le-feu.
Restitution de corps palestiniens
Cette semaine, les corps palestiniens restitués à Gaza par Israël étaient dans un état de décomposition tel qu’il a été difficile de les identifier, a fait savoir un fonctionnaire du ministère de la Santé de Gaza qui s’est adressé à Al Jazeera mercredi.
Le fonctionnaire a déclaré que l’un des corps restitués n’avait pas de tête.
Régulièrement, des corps ont été restitués à Gaza avec des signes visibles d’exécution sommaire et de torture. Des responsables de la santé expliquent que les efforts d’identification des restes ont également été entravés parce qu’Israël ne permet pas l’entrée à Gaza d’équipement en vue de tester l’ADN, a fait remarquer Al Jazeera.
La ministère de la Santé a déclaré que 285 corps palestiniens avaient été accueillis depuis le 10 octobre mais que seulement 84 de ces corps avaient pu être identifiés.
Une fraction de l’aide humanitaire espérée entre à Gaza
Israël continue d’utiliser les vivres et les soins de santé comme armes, 25 mois après le début du génocide et à l’issue de près de quatre semaines d’un prétendu cessez-le-feu.
Le bureau gouvernemental des médias de Gaza a déclaré que, depuis le 10 octobre, 145 camions seulement en moyenne entraient journellement à Gaza, ce qui fait moins d’un quart du minimum convenu de 600 camions qui devraient entrer afin de couvrir les besoins élémentaires des Palestiniens.
Le bureau des médias a ajouté que 10 pour 100 à peine des 1 100 camions de carburant prévus étaient entrés,
« ce qui reflétait la poursuite de la politique de restriction et d’obstruction des fournitures vitales d’énergie nécessaires au fonctionnement des hôpitaux, des boulangeries et des services essentiels ».
Le Conseil norvégien des réfugiés dit qu’il est l’une des neuf agences internationales d’aide humanitaire à avoir été confrontées à des refus répétés de la part d’Israël, qui les a empêchées de livrer des matériaux pour abris vitaux à l’approche de l’hiver et de la saison des pluies.
« Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, les autorités israéliennes ont rejeté 23 requêtes émanant de neuf agences d’aide humanitaire en vue d’apporter des fournitures pour abris nécessaires d’urgence tels tentes, kits d’étanchéité et d’encadrement, literie, ensembles de cuisine et couvertures, le tout réparti sur près de 4 000 palettes. Les organisations humanitaires préviennent que la fenêtre d’opportunité pour intensifier l’aide à l’hivernage se referme rapidement »,
a déclaré l’organisation mercredi.
La directrice régionale du Conseil norvégien des réfugiés, Angelita Caredda, a déclaré :
« Nous avons une très brève occasion de protéger les familles des pluies hivernales et du froid. Après plus de trois semaines de cessez-le-feu, Gaza devrait recevoir bien davantage de matériel pour abris, mais seule une fraction de ce qui est nécessaire est entrée. La communauté internationale doit agir dès maintenant pour assurer un accès rapide et sans entrave. »
Au moins 259 000 familles palestiniennes, autrement dit plus de 1,45 million de personnes, ont besoin d’une aide « abri » urgente, a ajouté l’organisation.
Entre-temps, le 30 octobre, les forces israéliennes ont enlevé un travailleur de l’UNICEF, l’agence de l’ONU pour les enfants, alors qu’il travaillait à l’un des deux seuls passages partiellement ouverts pour la livraison de l’aide humanitaire.
Raed al-Afifi a été arrêté en emmené par les forces israéliennes et Euro-Med Human Rights Monitor dit qu’
« aucune information n’a été fournie par les autorités israéliennes concernant l’endroit où il se trouve ou les accusations portées contre lui ».

Euro-Med dit encore que, la veille de l’arrestation, lors d’une circonstance sans doute liée à l’affaire, l’armée israélienne
« avait demandé à l’agence [l’UNICEF] de retirer ses camions et ses marchandises [du passage] de Kerem Shalom et qu’elle avait par la suite empêché l’entrée de camions transportant des équipements médicaux pour les hôpitaux du nord de Gaza, ainsi que des vaccins pour nouveau-nés et des suppléments nutritifs ».
Le ciblage de l’UNICEF, dit l’organisation,
« fait partie d’une campagne plus large de restrictions à l’encontre des agences des Nations unies et des organisation humanitaires internationales, visant à mettre un terme à leur présence et à leurs opérations après qu’elles avaient assisté à des violations très répandues affectant des civils palestiniens pendant la guerre, et à continuer de priver la population de Gaza de moyens de subsistance et de services essentiels ».
Intensification des attaques et du siège en Cisjordanie
En Cisjordanie occupée, les forces israéliennes ont intensifié leurs attaques et leurs destructions dans la ville de Tulkarem, dans le nord, après de vastes opérations au bulldozer dans le camp de réfugiés de Tulkarem, qui est en état de siège depuis plus de 280 jours.
L’agence d’information Wafa a fait savoir que les soldats israéliens avaient durci les mesures martiales et fermé toutes les entrées du camp, empêchant ainsi les habitants de regagner leurs logements. Des barrières complétées de portes en acier et de blocs de béton ont été installées dans le camp et dans les quartiers de la ville adjacents au camp. L’armée a réquisitionné des maisons toutes proches et les a converties en bases militaires.
Wafa déclare :
« Cette escalade a lieu au moment où l’agression et le siège du camp tout proche de Nur Shams entre dans son 270e jour sans interruption. »
Mercredi, la journaliste locale Wafeya Ulhadi a enregistré une protestation : les habitants demandaient le droit de rentrer chez eux et contestaient furieusement le déplacement forcé.

L’agence Wafa a expliqué que les soldats israéliens avaient bloqué la marche des habitants et qu’ils les avaient obligés de se disperser à la pointe du fusil.
Plus de 5 000 familles ont été déplacées des camps de réfugiés de Tulkarem et de Nur Shams au cours des 10 derniers mois et plus de 600 maisons ont été détruites, rendant ainsi le camp inhabitable.
2 400 attaques de l’armée et des colons en octobre
Les soldats et les colons israéliens ont mené près de 2 400 attaques dans toute la Cisjordanie au cours du seul mois d’octobre, d’après des statistiques émanant de la Commission (palestinienne) de résistance à la colonisation et au mur. L’armée était responsable de près de 1 600 attaques et les colons en ont effectué près de 800.
« Les attaques comprenaient des agressions physiques directes, le déracinement d’arbres, l’incendie de champs, le fait d’empêcher les cueilleurs d’olives d’accéder à leur terre, la saisie de propriété et la démolition de maisons et d’installations agricoles. Par ailleurs, les forces d’occupation ferment de vastes zones de terre sous le prétexte d’appliquer la « sécurité », tandis que les colonisateurs se voient accorder leur expansion dans les terres susdites »,
a déclaré la commission.
L’agence Wafa a fait savoir que, le 5 novembre, les colons israéliens juifs avaient attaqué et blessé trois Palestiniens à l’ouest de Yatta, au sud de Hébron.
Les colons ont lâché leur bétail dans les champs, ont endommagé les plantes et les arbres fruitiers et ont ensuite agressé physiquement les résidents, dont trois ont été blessés.
Mercredi, les colons ont également détruit des oliveraies dans le village de Turmus Aya, en allumant des incendies et en endommageant des arbres chargés de fruits, provoquant ainsi des pertes pour les fermiers et compromettant grandement la révolte des olives de cette année.
Les terres de Turmus Aya et les zones voisines font l’objet d’attaques fréquentes et répétées des colons et plus particulièrement ces dernières semaines.
Et, cette semaine écoulée, dans le sud de la Cisjordanie, des colons ont mené une attaque des plus cruelles contre des moutons appartenant à des fermiers palestiniens.
Des prises de vue d’une caméra de surveillance montrent neuf colons israéliens masqués, armés de bâtons, faisant irruption dans la propriété de la famille Dramin, à la périphérie du village de Samu, dans les collines au sud de Hébron.
La vidéo montre les colons
« brisant des pare-brise et incendiant les récoltes, alors que trois d’entre eux pénètrent dans la bergerie et se mettent à battre les agneaux sous les yeux des brebis. La caméra de sécurité a filmé l’un des colons jetant les agneaux sur le sol, puis lançant sur eux des blocs de béton et continuant de les battre alors qu’un autre colon frappait les autres agneaux. Six agneaux ont été tués et quatre autres grièvement blessés »,
rapportait Haaretz, le quotidien de Tel-Aviv.
D’autres sources ont fait savoir que certains agneaux avaient eu les yeux arrachés par les colons.
Mise en lumière de la résilience
Et, enfin, nous avons voulu mettre en évidence des personnes exprimant leur joie, leur détermination et leur résilience à Gaza et ailleurs dans le monde.
Des étudiants de l’Université Al-Azhar de Gaza s’inscrivent pour des cours après avoir essayé pendant deux ans de compléter leur éducation – tout en essayant de survivre à un génocide.
Dans une brève vidéo produite par Middle East Eye, une étudiante explique qu’elle espère finalement obtenir son droit à l’enseignement, y compris en suivant des cours en présentiel. Muhammad Shabbir, un administrateur d’université, dit qu’en cette troisième année de guerre, l’université a été agréablement surprise de constater que le nombre d’étudiants inscrits était plus élevé qu’il y a un an.
Il explique :
« Ceci prouve qu’il y a une volonté palestinienne, vivace et immortelle, dans les cœurs de tous nos étudiants. »
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Publié le 9 novembre 2025 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine




