La violence des colons atteint un niveau record
La violence des colons juifs à l’encontre des Palestiniens en Cisjordanie occupée a atteint un niveau record. Octobre a été « le mois le plus violent » depuis que l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, s’est mise à documenter la violence des colons en 2013.

27 octobre 2025. Les habitants palestiniens du village d’Al-Mazra’a al-Sharqiya, à l’est de Ramallah, récoltent les olives sur leurs terres. (Photo : Avishay Mohar / ActiveStills)
Tamara Nassar, 10 novembre 2025
L’organisation de contrôle de l’ONU, l’OCHA, a également enregistré le nombre le plus élevé d’attaques de colons en un seul mois depuis qu’elle-même a commencé à répertorier ce genre d’incidents en 2006, avec plus de 260 attaques de colons contre des Palestiniens et leurs possessions.
Cela faisait une moyenne de plus de 8 incidents par jour.
Jusqu’en ce moment de la saison en Cisjordanie occupée, l’OCHA a répertorié quelque 150 attaques de colons liées aux récoltes à l’encontre de Palestiniens et de leurs possessions. C’est bien davantage encore que les 110 attaques durant la même période de l’an dernier ou que les 30 à 46 attaques entre 2020 et 2023.
Plus de 140 Palestiniens ont été blessés au cours de ces attaques.
Les colons juifs extrémistes ont infligé plus de dégâts lors de la saison de récolte des olives de cette année qu’ils ne l’ont fait en n’importe quelle année depuis 2020. Plus de 4 200 oliviers et jeunes oliviers ont également été vandalisés par les colons – plus du double du nombre enregistré durant la même période l’an dernier.
« L’étendue géographique des attaques a également augmenté de façon significative »,
a fait savoir l’OCHA la semaine dernière.
Plus de 75 villes et villages ont été ciblés – environ le double du nombre de communautés affectées en 2023, et le triple par rapport à 2020.
Les attaques de colons lors de la saison de la récolte comprenaient de violentes agressions contre les fermiers, le vol d’olives et de matériel de cueillette, l’abattage ou le déracinement d’arbres, l’obstruction de l’accès aux terres et l’incendie de véhicules appartenant à des habitants palestiniens.
« La récolte annuelle des olives représente le premier gagne-pain de dizaines de milliers de Palestiniens et les oliviers sont profondément enracinés dans l’héritage et l’identité des Palestiniens »,
a déclaré Roland Friedrich, responsable des affaires de l’UNRWA pour la Cisjordanie occupée, Jérusalem-Est y compris.
Ces attaques « menacent le mode de vie même de nombreux Palestiniens ».
L’OCHA a répertorié près de 1 500 attaques de colons contre des Palestiniens depuis le début de l’année et la grande majorité de ces attaques impliquaient des colons qui saccageaient la propriété de Palestiniens.
Plus de 180 de ces attaques ont également fait des victimes parmi les Palestiniens.
L’accès à la terre
Les colons ont également limité de façon stricte l’accès des Palestiniens à leurs terres, même lorsque les fermiers avaient la permission explicite de l’armée israélienne d’y accéder.
Un exemple d’intimidation de la part des colons s’est présenté dans le village de Burin – un village du gouvernorat de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie occupée.
Les fermiers palestiniens avaient convenu d’une « coordination préalable » avec les autorités israéliennes en vue d’accéder à leurs terres pour les récoltes. Mais la prétendue garde de la colonie de Yitzhar, qui héberge certains des colons les plus violents de Cisjordanie, a empêché les Palestiniens de le faire en tirant des coups de feu en l’air afin de les forcer à s’en aller.
Il en est résulté qu’environ 300 dounams – 30 hectares – d’oliveraies n’ont pu être récoltés.
C’est la troisième année consécutive que certains villages sont totalement privés d’accès à leurs oliveraies à l’intérieur des colonies israéliennes.
Dans certains cas, les fermiers qui avaient la permission d’accéder à leurs plantations se sont vu accorder un laps de temps limité pour ce faire – comme au village d’Ein Yabrud, près de Ramallah, où on leur a donné trois jours. Quand les colons les ont attaqués, ils n’y sont plus retournés.
Ce sont en particulier les nouveaux avant-postes de colonies qui ont fortement entravé la capacité des fermiers d’accéder à leurs terres, même dans les Zones A et B, des zones plus exiguës de la Cisjordanie occupée sur lesquelles l’Autorité palestinienne exerce un contrôle nominal.
Les « avant-postes » auxquels Israël fait allusion sont souvent établis sans même l’autorisation d’Israël et sont considérés comme illégaux par la législation israélienne.
En décembre 2024, deux organisations israéliennes qui tiennent à l’œil l’activité des colons ont rapporté que les avant-postes d’élevage de moutons couvrent 14 pour 100 de la Cisjordanie – soit plus de 77 600 hectares (776 km²) de terres.
« En moins de trois ans, 70 pour 100 de toutes les terres confisquées par les colons à ce jour l’ont été sous le prétexte d’activités de pâturage »,
rapportent Peace Now et Kerem Navot.
Les colons entament leurs confiscations de terres en déplaçant de force les bergers et fermiers palestiniens de leurs terres et en y installant des avant-postes d’élevage de moutons.
Ensuite, ils se mettent à harceler, intimider et attaquer les communautés palestiniennes, ne leur laissant d’autre choix que de fuir, expliquent les organisations. Après cela, les colons s’emparent des terres et installent de nouveaux avant-postes, consistant d’abord en quelques caravanes ou structures, généralement non connectées à des infrastructures d’eau, d’égouts ou d’électricité.
L’actuel gouvernement israélien s’est employé à rationaliser la procédure de reconnaissance de ces avant-postes en tant que colonies.
Toutes les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, Jérusalem-Est et les hauteurs du Golan y compris, sont illégales en vertu des lois internationales et sont considérées comme des crimes de guerre.
La semaine dernière, le conseil de planification de l’Administration civile devait discuter les plans de 1 973 nouvelles unités de logement pour colons à construire en Cisjordanie occupée. Depuis novembre dernier, ce « Conseil supérieur de la planification » a tenu des réunions hebdomadaires dans le but de faire avancer les projets de logement des colonies.
« Depuis le début de 2025, en comptant les plans devant être approuvés cette semaine, le conseil a promu un total de 28 183 unités de logement,
a fait savoir Peace Now la semaine dernière.
Il s’agit d’un « record absolu ».
Plus tôt, ce mois-ci, le ministère israélien du logement a publié des plans de mise en œuvre pour la construction d’un nouveau quartier dans une colonie établie au sud-est de Ramallah – le siège de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie occupée.
La colonie de Geva Binyamin s’agrandirait de 342 unités de logement, ainsi que de 14 nouvelles maisons unifamiliales destinées en particulier à des officiers de réserve de l’armée israélienne.
Cela permet les appels d’offres lancés en août par le gouvernement israélien pour plus de 4 000 unités dans la méga-colonie de Ma’aleh Adumim, près de Jérusalem, ainsi qu’à Ariel.
Depuis le début de l’année, Israël a publié des appels d’offres pour près de 5 700 unités de logement dans les colonies – Peace Now dit qu’il s’agit d’un « record absolu » et d’une augmentation d’environ 50 pour 100 par rapport au dernier pic, en 2018.
Ces plans pourraient permettre à quelque 25 000 colons de plus de vivre dans des colonies situées en Cisjordanie et exclusivement réservées aux juifs.
Les déportations
Israël a déporté des dizaines d’activistes étrangers qui tentaient de proposer leur soutien ou leur protection aux fermiers palestiniens de Cisjordanie occupée pendant la saison des récoltes.
Rudy Schulkind, un activiste britannique de 30 ans, était l’une de ces personnes déportées.
« Tous les fermiers avec qui nous nous sommes entretenus étaient incroyablement généreux et aimables et reconnaissants du soutien apporté par les volontaires internationaux »,
a-t-il expliqué à The Electronic Intifada.
Mais son séjour en Cisjordanie a été de courte durée.
« Je n’ai cueilli des olives que pendant une journée entière et, le deuxième jour, j’ai été arrêté puis déporté »,
a-t-il ajouté.
Ce deuxième jour, Schulkind dit que les colons israéliens armées de fusils mitrailleurs
« ont essayé, verbalement et physiquement, d’interrompre le travail que nous faisions, de nous empêcher d’encore cueillir les olives ».
Schulkind a expliqué que, lorsque l’armée israélienne est alors arrivée sur place, il est devenu clair
« qu’elle n’avait nullement l’intention de dissuader les colons et qu’elle était là essentiellement pour les soutenir dans leurs tentatives d’empêcher les fermiers palestiniens d’user de leurs droits concernant les terres ».
À leur arrivée dans un autre endroit, des volontaires ont été arrêtés et informés par l’armée israélienne que la zone dans laquelle ils se trouvaient avait été déclarée textuellement zone militaire.
Schulkind dit que lui et plusieurs autres activistes arrêtés ont été embarqués dans un car et emmenés vers un poste de police où on les a interrogés un par un sous diverses accusations, dont des accusations de terrorisme.
Les forces israéliennes ont gardé Schulkind pendant trois jours environ avant de l’expulser vers l’Angleterre le 19 octobre.
« On ne nous a jamais donné la possibilité de parler avec nos proches »,
a-t-il dit à The Electronic Intifada.
Schulkind a ajouté que, avant l’interrogatoire, on lui avait accordé un bref appel téléphonique à un avocat, mais qu’il n’a jamais comparu devant un juge avant d’être expulsé.
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Publié le 10 novembre 2025 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine




