« Monsieur le Ministre, qu’allez-vous faire pour la libération de Mustapha Awad ? »

Les députés Gwenaëlle Grovonius (PS) et Marco Van Hees (PTB) ont interpellé le ministre des Affaires étrangères le 17 octobre dans la Commission des Relations extérieures 1) à propos de l’arrestation et la détention de Mustapha Awad, citoyen belge,  artiste et cofondateur du Raj’een Dabkeh Group, défenseur des droits humains, ouvrier métallurgiste et résident de la ville d’Alost.

Force est de constater que le ministre ne répond pas à leurs questions pertinentes :  ni sur le rapt de Mustapha à la frontière jordanienne, ni sur sa mise au secret, ses conditions de détention, les interrogatoires qu’il a subis 20 h sur 24…

Marco Van Hees lui demande :

« Monsieur le ministre, je n’aurai qu’une seule question à vous poser: qu’allez-vous faire pour sa libération ? »

Voici la réponse de Didier Reynders, ministre :

Nous suivons le dossier de M. Mustapha Awad de très près depuis le jour de son arrestationau mois d’août. 

Mais de qui Didier Reynders se moque-t-il ? Mustapha a été arrêté le 19 juillet. C’est justement durant les premières semaines depuis son rapt à la frontière jordanienne, qu’il a été torturé par les services secrets et des sections spéciales de la police. Où est-ce une période sur laquelle Reynders veut bien fermer les yeux ? Car effectivement, nous n’avons jamais entendu un seul mot de protestation contre les traitements inhumains que Mustapha a subis.

Ces derniers jours, de nouvelles démarches ont été effectuées auprès des autorités israéliennes par notre ambassade et auprès de celle d’Israël en Belgique.

Ces « démarches » diplomatiques se résument à des simples coups de fil avec traces écrites, dans lesquels l’administration demande des infos. Mais ce n’est pas de cela que nous avons besoin, Monsieur Reynders. Nous voulons que vous preniez la défense du citoyen belge qu’est Mustapha, que vous demandiez des comptes au gouvernement de Nethanyahou, que vous le sortiez de là !

-Des contacts avaient déjà pu avoir lieu par voie consulaire avec M. Awad.  Nous œuvrons à ce que les services consulaires continuent à avoir un accès régulier à M. Awad.

Il n’est pas plus que normal, Mr Reynders qu’une assistance consulaire soit mise en place pour un ressortissant belge. Mais il n’est pas normal que Mustapha n’ait reçu la première visite que le 8 août, après trois semaines d’arrestation. Et que le service consulaire se limite à un minimum : c’est-à-dire uniquement trois visites en plus de 100 jours de temps.

M. Reynders, vous avez menti aux députés de la Commission

Selon les dernières informations de notre poste, les visites consulaires continuent à être autorisées. Elles se déroulent de façon correcte, ce que semble apprécier M. Awad, qui a aussi pu être en contact avec sa famille.

Après consultation des membres de la famille, nous pouvons dire, M. Reynders, que Mustapha n’a pas encore pu donner un seul coup de fil à sa famille, ni avoir un autre contact. Vous avez donc menti aux députés de la Commission des Relations extérieures.

-Notre consul était présent à la première audience de son procès, le 10 octobre dernier. Nos services consulaires vont évidemment continuer à suivre les prochaines audiences. La prochaine est programmée pour le début du mois de novembre.

Le Comité Free Mustapha estime, M. Reynders, que ce procès ne devrait simplement pas avoir lieu. Il n’est pas normal qu’Israël kidnappe un Belge à la frontière, le détienne, le torture et le juge sur la base d’aveux obtenus sous la torture. C’est d’ailleurs votre passivité, votre complicité qui permet à Israël de reculer en permanence ses limites, également en ce qui concerne la maltraitance de personnes d’une nationalité étrangère.

-Voilà tout ce que je peux dire sur cette situation. Nous la suivions bien avant qu’il y ait eu des Cartes blanches ou des manifestations devant mon département.

Notons, M. Reynders, que c’est seulement après la sortie d’une Carte blanche, Nicaragua – Israël : deux poids, deux mesures ? Les cas d’Amaya Coppens et de Mustapha Awad signée par 64 personnalités et après nos manifestations devant votre ministère que vous êtes enfin sorti de votre silence… avec deux tweets lamentables, 2),  qui sont du même calibre que votre réponse dans la Commission. Et notons que vous n’avez jamais répondu à la question de fond soulevée par ces personnalités :  Pas de deux poids deux mesures quand il s’agit des droits de l’homme.

Le Comité Free Mustapha salue les réponses des deux députés au ministre :

Gwenaëlle Grovonius (PS) : « Je n’ai pas entendu dans votre réponse de message politique très clair en ce qui concerne cette situation, et je le regrette. Nous avons abordé plusieurs situations graves touchant à la manière dont les autorités israéliennes prennent des décisions qui vont clairement à l’encontre du droit international. Une fois de plus, nous sommes face à ce genre de cas et la Belgique reste au balcon. Je reviens avec mon idée, que j’ai déjà énoncée deux fois. À quand une volonté de votre part d’envisager les sanctions qui pourraient peut-être enfin faire bouger les choses dans cette région ? »

Marco Van Hees (PTB): « Monsieur le ministre, cette situation très grave crée un précédent: un Belge est arrêté sur base de rien ! Outre la question de ce cas personnel, on peut se demander qui va encore oser voyager à l’étranger si le gouvernement belge ne fait rien quand on est arrêté dans un pays qui, visiblement, pratique la torture et des arrestations arbitraires. C’est votre silence, monsieur le ministre – dans cette affaire et en général sur les crimes commis par Israël –, qui pose problème.

Le seul crime de Mustapha Awad est de se battre pour les droits du peuple palestinien et de demander qu’Israël respecte le droit international. Il fait finalement ce que votre gouvernement et vous-même ne faites pas. C’est pour cela qu’il est emprisonné et torturé en Israël. Dans ce cadre, monsieur le ministre, votre silence est assez honteux. »

MDL
 
 
1. le point 13 du rapport.
2. dans un de ces tweets Reynders dit qu’il veille « à ce que ses proches puissent le contacter et lui rendre visite ». M. Reynders, est-ce que vous pensez que les proches de Mustapha, vivant au Liban ou en Belgique, vont prendre le risque de se voir refouler à la frontière ou d’être arrêtés aussi ? Où est-ce que c’est vous qui les accompagneriez pour rendre visite à Mustapha ?
   
   

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