Un extrémiste sioniste planqué en Israël condamné à la prison en France

Grégory Chelli, l’extrémiste sioniste français qui fuit la justice en se planquant en Israël, a été condamné à deux ans et demi de prison par un tribunal pénal de Paris.

 

Grégory Chelli, l’extrémiste sioniste français. Photo via Instagram

Ali Abunimah, 13 janvier 2022

Sous le pseudonyme d’Ulcan, Chelli a consacré des années à terroriser des personnes via ce qu’on appelle des attaques de swatting – de fausses dénonciations adressées à la police et qui peuvent parfois se traduire par des raids policiers extrêmement violents au domicile des personnes dénoncées.

Dans un cas toujours en souffrance, Chelli est accusé d’avoir provoqué une mort d’homme.

Chelli, qui était impliqué dans la section française du groupe extrémiste Ligue de défense juive, a particulièrement ciblé des personnes critiques à l’égard d’Israël ou des personnes qui ont rédigé des rapports sur ses actions.

Le petit documentaire ci-dessous, publié l’an dernier par The Electronic Intifada, donne un aperçu de ce qu’est Chelli et de ce qu’il a fait.

 

Le 11 janvier, Chelli a été condamné par contumace pour quatorze chefs d’accusation, portant sur quatre affaires séparées et impliquant des appels malveillants, des menaces de mort et de faux rapports adressés à la police entre 2014 et 2016.

Il a également été sommé de payer plus de 20 000 dollars de dommages et intérêts à ses victimes et plus de 10 000 dollars de frais de justice.

Le tribunal a également produit un mandat d’arrêt contre cet homme de 39 ans qui, depuis des années, réside dans la ville israélienne d’Ashdod, où il mène une existence consacrée au farniente dans un luxueux appartement surplombant la Méditerranée.

 

« L’incarnation d’un lâche »

Les délits pour lesquels Chelli a été condamné cette semaine comprennent un appel à la police de Lille, en 2014, appel au cours duquel il s’était fait passer pour le mari de Martine Aubry, maire de la préfecture du Nord. Chelli avait prétendu que le mari de Martine Aubry avait tué sa femme.

Le délit avait été commis, a-t-on dit par la suite, en représailles du report par Aubry même d’un plan prévoyant de jumeler Lille et une ville d’Israël.

Une autre de ses cibles a été Olivia Zémor, principale activiste de l’organisation EuroPalestine. Chelli a été condamné pour avoir faussement prétendu que son mari l’avait assassinée.

Zémor a témoigné aux audiences du procès, en décembre dernier, en disant que Chelli avait harcelé le couple à de multiples reprises.

Le tribunal criminel de Paris a imposé une sentence plus sévère que les deux années d’emprisonnement requises par le Ministère public.

Le Ministère public a accusé Chelli d’un « comportement extrêmement violent ». L’homme, qui s’est présenté comme un « activiste sioniste » et un « vigile », était en réalité « l’incarnation d’un lâche », a prétendu le Ministère public.

Gilles-William Goldnadel, l’avocat de Chelli se présentant lui-même comme activiste d’extrême droite pro-israélien et antimusulman, a dit qu’il irait en appel.

Aucun mot n’est sorti de la bouche même de Chelli. Il a souvent utilisé les médias sociaux pour se moquer de ses victimes et accusateurs, mais son compte Instagram est actuellement privé.

 

« Un tremblement de terre »

La condamnation du 11 janvier ne parle toutefois pas de ce qui constitue peut-être l’action la plus tristement connue de Chelli, à savoir la prise pour cible en 2014 de la famille du journaliste Benoît Le Corre.

Chelli avait adressé à la police un appel au cours duquel il s’était fait passer pour le père de Benoît, Thierry Le Corre, avait prétendu avoir tué sa femme et avait menacé ensuite de se livrer à un carnage à l’arme à feu.

Cela avait incité la police à effectuer un raid au domicile de la famille Le Corre. Le stress provoqué par l’opération, en sus du harcèlement intense et des menaces de Chelli à l’égard de la famille, a expliqué le Ministère public, ont précipité une attaque cardiaque et un coma qui se sont traduits par le décès de Thierry Le Corre, âgé de 56 ans.

Chelli avait ciblé la famille Le Corre en guise de représailles contre le fait que Benoît avait présenté un rapport sur les attaques de Chelli contre des activistes de la solidarité avec la Palestine.

La France cherche toujours à obtenir l’extradition de Chelli d’Israël, dans cette affaire Le Corre, au motif de violence délibérée ayant entraîné la mort – un délit qui équivaut à un homicide et qui peut entraîner une peine de 15 ans de prison.

Mais, alors qu’ils continuent de vouloir justice pour Thierry, Benoît Le Corre et sa famille doivent se consoler avec la condamnation de Chelli pour d’autres délits.

Mercredi, Benoît Le Corre a posté sur Instagram une photo de la tombe de son père. Dans un commentaire, Le Corre a accueilli favorablement le jugement contre Chelli et a ouvertement parlé de la douleur qui lui et sa famille avaient endurée.

« J’ai ressenti la mort de mon père comme un tremblement de terre »,

a écrit Le Corre.

« La terre me semble un peu plus solide aujourd’hui. »

Le Corre a fait remarquer qu’il était resté particulièrement silencieux « par crainte des représailles visant les êtres qui me sont chers » – ce qui est bien une preuve de la terreur de longue durée infligée par Chelli.

Il y a un an, le procès contre Chelli à propos du décès de Thierry Le Corre a été renvoyé à un tribunal inférieur afin de remédier à une erreur technique. Cela a ralenti la quête de justice, sans toutefois la bloquer.

Antoine Comte, l’avocat de la famille Le Corre, avait dit à l’époque à The Electronic Intifada que ses clients étaient bien décidés à poursuivre la procédure.

« Que ce soit par contumace ou en France, Chelli devrait affronter un procès devant un tribunal criminel, parce que ce qu’il a fait est un crime et c’est en outre un crime dégoûtant »,

a ajouté Antoine Comte.

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Ali Abunimah,cofondateur de The Electronic Intifada, est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine, paru chez Haymarket Books.

Il a aussi écrit : One Country : A Bold Proposal to end the Israeli-Palestinian Impass

 

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Publié le 13 janvier 2022 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

Lisez également : La famille Le Corre réclame justice de la part d’Israël

Le journaliste Benoît Le Corre sur une capture d’écran en provenance d’un documentaire de Radio-Canada sur Grégory Chelli, en 2020. Chelli est recherché en France dans le cadre de la mort du père de Benoît, Thierry. (Photo : Radio-Canada)

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