L’UE taxe d’antisémitisme le fait de qualifier Israël d’État d’apartheid

C’est de l’antisémitisme que de prétendre qu’Israël se rend coupable du crime d’apartheid envers le peuple palestinien, selon l’Union européenne.

Le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, a rejeté les conclusions d’Amnesty International disant qu’Israël se rend coupable du crime d’apartheid

Le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, a rejeté les conclusions d’Amnesty International disant qu’Israël se rend coupable du crime d’apartheid (Photo : Euc / ROPI)

 

Ali Abunimah, 23 janvier 2023

Cela voudrait dire, selon Bruxelles, que les principales organisations de défense des droits, dont Human Rights Watch, Amnesty International et B’Tselem en Israël même – et financée par l’UE – sont elles-mêmes coupables de sectarisme antijuif.

Cette allégation extraordinaire de l’UE est venue en réponse à une question adressée directement par plusieurs membres pro-israéliens du Parlement européen au corps exécutif de l’UE, c’est-à-dire à la Commission européenne.

Les députés ont déclaré que le rapport d’Amnesty, de fin février dernier,

« prétendait que l’apartheid était inhérent à la fondation de l’État d’Israël en 1948 et qu’il a continué à être mis et maintenu en place par les gouvernements israéliens successifs ».

Les députés ont demandé si le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, percevait lui aussi Israël comme un « État d’apartheid ».

Ils voulaient également savoir si Borrell considérait le rapport d’Amnesty comme « antisémite » selon la définition de l’antisémitisme donnée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (AIMH ou IHRA),

« étant donné qu’il [le rapport] affirme que l’existence de l’État d’Israël est une entreprise raciste (c’est-à-dire un État d’apartheid) ».

 

« Pas approprié »

Les députés pro-israéliens devraient être pleinement satisfaits de la réponse écrite de Borrell, datée du 20 janvier.

« La Commission considère qu’il n’est pas approprié de recourir au terme ‘apartheid’ en ce qui concerne l’État d’Israël »,

a écrit Borrell.

Borrell a confirmé que l’UE s’appuyait bel et bien sur la définition de l’antisémitisme de l’IHRA et il a ajouté en insistant :

« Prétendre que l’existence d’un État d’Israël est une entreprise raciste fait précisément partie des exemples que l’IHRA a choisis pour illustrer sa définition. »

La définition hautement politisée de l’IHRA, lourdement promue par Israël et ses lobbys, a rencontré une opposition nourrie en raison des inquiétudes de la voir utilisée précisément de la façon dont Borrell la présente ici : afin de qualifier faussement de sectarisme antijuif toute critique d’Israël et de ses crimes.

Borrell n’a pas fourni de base factuelle afin de réfuter les recherches méticuleuses de diverses organisations des droits humains montrant comment Israël se rend bel et bien coupable d’apartheid, un crime grave contre l’humanité repris dans le Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale.

Mais il a poursuivi en réaffirmant l’adhésion ritualiste et complètement creuse de l’UE à « une solution négociée à deux États ».

Un crime contre l’humanité

Sous les lois internationales, le crime d’apartheid est défini comme

« des actes inhumains commis dans le but d’établir et de maintenir en place la domination d’un groupe racial ou de personnes sur tous les autres groupes raciaux ou personnes et de les opprimer systématiquement ».

B’Tselem – l’organisation de défense des droits humains soutenue par l’UE – déclarait en janvier 2021 qu’Israël appliquait « un régime de suprématie juive du Jourdain à la Méditerranée » – la totalité de la zone qui englobe Israël, la Cisjordanie occupée et la bande de Gaza.

« C’est de l’apartheid », a conclu B’Tselem.

Le nouveau gouvernement d’Israël a inauguré son mandat en proclamant son engagement envers la suprématie juive et les mesures d’apartheid qui seront par conséquent nécessaires pour maintenir cette suprématie.

« Les juifs ont un droit exclusif et inaliénable à toutes les parties de la Terre d’Israël »,

a déclaré la nouvelle coalition, en promettant de

« promouvoir et développer le peuplement de toutes les parties de la Terre d’Israël – en Galilée, au Néguev, au Golan et en Judée et Samarie ».

Les hauteurs du Golan sont un territoire syrien occupé, alors que la « Judée et Samarie » constitue une terminologie sioniste pour désigner la Cisjordanie occupée.

Suite à cette déclaration, Borrell a fait savoir aux nouveaux dirigeants d’Israël qu’il

« envisageait de travailler avec eux en vue de continuer à améliorer les relations entre l’UE et Israël ».

En d’autres termes, l’engagement de l’UE envers le régime d’apartheid israélien et son opposition aux droits palestiniens restent solides comme un roc.

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Ali Abunimah, cofondateur et directeur exécutif de The Electronic Intifada, est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine, paru chez Haymarket Books.

Il a aussi écrit : One Country : A Bold Proposal to end the Israeli-Palestinian Impasse

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Publié le 23 janvier 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

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