L’Autorité palestinienne agresse les Palestiniens en deuil
Alors que la résistance palestinienne émergente a déclaré son opposition à Israël, l’Autorité palestinienne (l’AP) a lancé ses services sécuritaires sur le peuple palestinien.
Mercredi 8 mars, à Naplouse, c’est avec une extrême violence que les hommes de l’AP ont dispersé le cortège funéraire qui accompagnait la dépouille d’Abdelfattha Khaousheh, 49 ans, qui était affilié au Hamas et qui venait d’être tué la veille, à Jénine, par l’armée israélienne.
Ramona Wadi, 9 mars 2023
Le porte-parole de l’AP, Talal Dweikat, a déclaré que les services de sécurité n’étaient intervenus que lorsque des partisans du Hamas avaient rallié la procession funéraire et « avaient transformé les funérailles en protestations contre l’AP ». Les Palestiniens avaient alors été empêchés de brandir des drapeaux du Hamas, bien que le défunt, Kharousheh, ait été un membre du mouvement.
Pour les Palestiniens dont des proches ont été assassinés par Israël, les funérailles font non seulement partie du processus de deuil, mais elles constituent également une prise de position politique. Cependant, l’AP n’est pas en position de permettre la moindre dissension ou opposition à l’égard de son pouvoir. En lieu et place, elle préfère rivaliser avec les tactiques israéliennes et adresser un message clair au peuple palestinien, à savoir que Ramallah ne considère rien comme sacré, et surtout pas les vies perdues dans la résistance anticoloniale.
En agissant de la sorte, l’AP continue à sceller son propre sort ; si ce genre d’intimidation a bien fonctionné dans le passé, il est clair qu’elle est futile, aujourd’hui.
Plus l’AP réagit par la force, plus la résistance palestinienne va gagner en intensité.
Le chef de l’AP, Mahmoud Abbas, n’inspire aucune loyauté aux Palestiniens. La coordination sécuritaire avec l’État occupant constituera à la fois son héritage empoisonné et la principale raison pour laquelle l’AP poursuit sa spirale descendante en Cisjordanie occupée, même si la communauté internationale fait de son mieux pour tenter de préserver l’illusion d’un statu quo qui fonctionnerait toujours.
Si l’AP n’était pas intervenue pour perturber les funérailles, elle aurait fait preuve d’un certain niveau de tolérance, sinon d’acceptation de l’importance des autres factions politiques palestiniennes.
L’AP, toutefois, n’a que faire de pertinence, surtout lorsque c’est sa survie qui est en jeu.
N’empêche que ses actions sentent à plein nez le désespoir, le fait qu’elle n’a rien d’autre pour étayer cette survie que de recourir à la force brutale contre le peuple qu’elle est censée protéger.
Naturellement, les responsables de l’AP ont l’habitude de demander à la communauté internationale de protéger le peuple palestinien, même si leur collaboration avec Israël facilite la persécution quotidienne du peuple palestinien.
Qu’y a-t-il de déplacé dans le fait que, lors d’un enterrement palestinien, des gens en deuil déploient les drapeaux des différentes factions palestiniennes ?
Kharousheh était engagé dans la résistance anticoloniale, il était affilié au Hamas et l’enterrement reflétait cette partie de son identité politique. Le cortège était censé refléter ce que Kharousheh défendait ; la façon dont les événements se sont déroulés ne reflétait manifestement pas la marque politique de l’AP.
Du fait que toutes les tentatives de l’AP en vue de définir les autres factions palestiniennes comme non politiques et trop enclines à la violence, ses actions illustrent qu’elle dépend de la violence contre le peuple de la Palestine occupée pour rester au pouvoir.
Sans légitimité politique pour appuyer sa domination brutale, l’AP a l’habitude de recourir à la violence par le biais de ses services de sécurité afin de soumettre le moindre éclat de résistance palestinienne.
L’AP n’est pas rappelée à l’ordre par la communauté internationale parce que la différenciation dans la violence est un acte politique qui sert l’AP temporairement, et Israël à longue échéance.
D’où le silence quand des Palestiniens sont brutalisés par Israël et par Ramallah ; ils sont les dégâts collatéraux dans un jeu de violence coloniale qui revêt des longueurs extrêmes.
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Publié le 9 mars 2023 sur Middle East Monitor
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine