Khalida Jarrar maintenue en isolement depuis 7 jours !
Ce 20 août, Addameer, une institution civile palestinienne non gouvernementale qui soutient les prisonniers politiques palestiniens, a annoncé que
“les services pénitentiaires israéliens ont maintenu la détenue administrative, militante des droits de l’homme, féministe et ancienne membre du Conseil législatif palestinien, Khalida Jarrar, en isolement dans la prison de Neve Tirza à Ramleh pendant sept jours consécutifs”.
Samidoun, 20 août 2024
La déclaration continue :
“Le 12 août 2024, les forces de sécurité pénitentiaires ont pris d’assaut la cellule de Khalida Jarrar à la prison de Damon et l’ont emmenée de force. Khalida Jarrar a été placée dans une cellule sale et infestée de tiques, où elle est restée une journée entière sans être interrogée. ”
“Le 13 août, sans préavis ni explication, elle a été sortie de sa cellule, sans les lunettes dont elle a besoin et qui lui avaient été confisquées. Elle a été informée qu’elle était transférée, mais on ne lui a pas dit où. Elle est restée dans la bosta (véhicule de transport) pendant 5 heures avant d’être emmenée à la prison de Neve Tirza, qui est utilisée pour isoler les prisonnier•es palestinien•nes. Jarrar a été informée qu’il lui était interdit de recevoir la visite de son avocat et ils ont refusé de divulguer les raisons de son isolement à Neve Tirza ou la durée de son séjour”.
Selon Addameer, Khalida Jarrar, a été placée dans une très petite cellule d’isolement, mesurant seulement 2 mètres sur 1,5 mètre, où le seul espace disponible est occupé par un matelas. La cellule contient également une minuscule salle de bain avec des toilettes et une douche. Elle est complètement fermée, sans fenêtre pour l’aération ou l’air frais.
Khalida Jarrar, féministe palestinienne, militante de gauche et universitaire, a été arrêtée à son domicile à Al-Bireh, en Palestine occupée, dans la matinée du 26 décembre 2023.
Son arrestation fait partie d’une série d’arrestations massives par les forces d’occupation en Cisjordanie, alors que le génocide se poursuit à Gaza.
Avant son arrestation, Khalida Jarrar était universitaire et chercheuse à l’Institut Muwatin de l’Université de Birzeit. Le 27 décembre 2023, elle devait participer à une table ronde organisée par Jadaliyya, un webzine produit par l’Institut d’études arabes, sur l’emprisonnement pendant le génocide. Elle a été arrêtée à son domicile la veille de son intervention.
Leader politique historique du Front Populaire pour la Libération de la Palestine, Khalida Jarrar a été emprisonnée à de multiples reprises par l’État colonial. En 2015, elle a passé 14 mois en prison, dont plusieurs mois en détention administrative, c’est-à-dire sans inculpation ni procès, en 2017 elle a été incarcérée pendant 20 mois toujours en détention administrative et en 2019 elle a été détenue pendant près de deux ans.
Lors de son incarcération en 2019, sa fille Suha est décédée tragiquement. Elle n’a pas été autorisée à voir le corps de Suha ni à assister à ses funérailles avant sa libération en 2021. Elle lui avait écrit ce poème que nous souhaitons vous partager ici :
Je souffre tellement, mon enfant, seulement parce que tu me manques.
Je souffre tellement, mon enfant, seulement parce que tu me manques.Du plus profond de mon agonie, j’ai tendu la main et embrassé le ciel de notre patrie à travers la fenêtre de ma cellule de la prison de Damon, à Haïfa. Ne t’inquiète pas, mon enfant, je me tiens debout et inébranlable, malgré les chaînes et le geôlier. Je suis une mère dans la douleur qui se languit de te voir une dernière fois.
Cela ne peut se passer qu’en Palestine. Tout ce que je voulais, c’était faire un dernier adieu à ma fille, avec un baiser sur son front et lui dire que je l’aime autant que j’aime la Palestine. Ma fille, pardonne-moi de ne pas avoir assisté à la célébration de ta vie, de ne pas avoir été à tes côtés pendant cette déchirure du ciel, aspirant à te voir, à te caresser et à planter un baiser sur ton front à travers la petite fenêtre de ma cellule de prison.
Suha, ma précieuse. Ils m’ont privé de te donner un dernier baiser d’adieu. Je te dis adieu avec une fleur. Ton absence est douloureuse, atrocement douloureuse. Mais je reste inébranlable et forte, comme les montagnes de la Palestine bien-aimée.
Khalida Jarrar, 13 juillet 2021
Au cours de ses différentes détentions, elle a mis en place des programmes éducatifs indépendants pour enseigner aux mineures emprisonnées les cours secondaires qui leur avaient été refusés, et aux femmes adultes leurs droits en tant que prisonnières.
Dans cet article, Khalida Jarrar raconte comment elle avait mis en place ce cursus d’auto formation : « Comment résister et remporter la victoire à l’intérieur des prisons israéliennes ».
“Les souffrances et les violations des droits de l’homme subies par les prisonniers palestiniens, qui vont à l’encontre du droit international et humanitaire, ne sont qu’un aspect de l’histoire des prisons. L’autre aspect ne peut être véritablement compris et transmis que par ceux qui ont vécu ces expériences éprouvantes. Très souvent, l’histoire des prisonniers palestiniens n’évoque pas la trajectoire humaine inspirante d’hommes et de femmes palestiniens qui ont survécu à des moments décisifs, avec tous les détails et les défis douloureux qu’ils comportent.
Ce n’est qu’en approfondissant le récit des prisonniers que vous pourrez commencer à imaginer ce que l’on ressent quand on perd une mère aimante alors que l’on est confiné dans une petite cellule, quand on a une jambe cassée, quand on est privé de visites familiales pendant des années, quand on est privé de son droit à l’éducation et quand on doit faire face à la mort d’un camarade.
S’il est important que vous compreniez les souffrances endurées par les prisonniers, comme les nombreux actes de torture physique, les tourments psychologiques et l’isolement prolongé, vous devez également réaliser la puissance de la volonté humaine, lorsque des hommes et des femmes décident de se battre, de réclamer leurs droits naturels et d’embrasser leur humanité.
La lutte peut prendre de nombreuses formes. Au cours de mes différentes périodes d’emprisonnement en tant que prisonnière politique dans les prisons israéliennes, j’ai moi aussi pris part aux différentes formes de résistance à l’intérieur des murs de la prison. Pour moi, l’éducation des prisonnières palestiniennes est devenue une priorité urgente.”
Initialement détenue pendant 6 mois, la détention de Khalida Jarrar a été renouvelée pour 6 mois supplémentaires le 24 juin. Avant son transfert à l’isolement, elle était détenue dans la prison sioniste de Damon avec plus de 83 femmes, dont au moins 19 étaient en détention administrative. Parmi ces détenues administratives, 12 ont vu leur détention renouvelée au moins une fois au cours des derniers mois.
Un magnifique article avait été publié sur Hadfnews : N’hésitez pas à aller le parcourir pour en savoir plus sur la vie et le combat de Khalida Jarrar : “Khalida Jarrar : « C’est la foi du paysan qui travaille la terre » (par Hind Shraydeh)”
Face aux violences et agressions infligées par l’état génocidaire sioniste aux prisonnier•es palestinien•nes, développons la solidarité internationale et tenons-nous à leurs côtés ! De Georges Abdallah en France à Ahmad Saadat en Palestine : faisons voler en éclats les prisons coloniales et participons à la libération des résistant•es palestinien•nes !
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Publié le 20 août 2024 sur Samidoun
Vous trouverez également des textes de Khalida Jarrar dans le livre SUMUD – Paroles de résistance de prisonnières palestiniennes (Editions Antidote).
Vous pouvez commander le livre en versant 10 € (frais de port compris) sur le compte BE10 5230 8104 6104 de la Plateforme Charleroi-Palestine avec la mention : Sumud, Paroles de résistance de prisonnières palestiniennes + votre adresse postale (uniquement pour la Belgique).