La solidarité avec la Palestine revient à ses racines
Le lobby pro-israélien sort de ses gonds à propos de la base anticoloniale et antisioniste claire de la récente organisation de la solidarité avec la Palestine, particulièrement chez les étudiants et les jeunes.
Marion Kawas, 5 mai 2023
Du 28 au 30 avril, la Conférence de la libération s’est tenue à Ottawa, au Canada, afin d’examiner des stratégies pour faire aller de l’avant le travail de solidarité avec la Palestine en Amérique du Nord. La conférence était organisée par Masar Badil, qui en avait déjà tenu plusieurs autres en Europe, au Brésil et au Liban et qui œuvre en vue d’exploiter l’énergie nouvelle parmi les Palestiniens de la diaspora.
La conférence a été la cible des organisations de lobbying sionistes avant même que le premier orateur ait mis un pied sur l’estrade. L’attaque s’appuyait sur toute une litanie aujourd’hui familière d’accusations mensongères de « terrorisme ». Le Centre pour Israël et les Affaires juives (CIJA), de concert avec le journal National Post, y est allé d’un déchaînement incendiaire, mettant en garde contre certain « réseau de l’ombre connecté au terrorisme et voué à la destruction d’Israël ».
Le Réseau Samidoun de solidarité avec les prisonniers palestiniens était et est toujours l’une des principales cibles de ces campagnes de diffamation et sa coordinatrice internationale Charlotte Kates a commenté la chose comme suit :
« Une fois encore, nous voyons des organisations du lobby sioniste exiger la réduction au silence, la criminalisation et la persécution de ceux qui réclament justice pour la Palestine et refusent de permettre que la Palestine soit exclue des discussions sur la justice sociale. Nous considérons les attaques contre Samidoun en tout premier lieu comme des attaques contre les prisonniers palestiniens mêmes, tentant d’isoler et d’étendre leur emprisonnement en les réduisant au silence et en les intimidant. »
Le lobby pro-israélien sort de ses gonds à propos de la base anticoloniale et antisioniste claire de la récente organisation de la solidarité avec la Palestine, particulièrement chez les étudiants et les jeunes. Cette clarté a souvent été perdue, après la signature des accords d’Oslo, mais elle se ravive, désormais.
Historiquement, les activistes palestiniens au Canada n’ont jamais cessé de défier le discours sioniste. En octobre 1975, le principal journal pro-israélien de Vancouver, à l’époque, déplorait l’organisation antisioniste sur le campus de l’UBC (Université de la Colombie-Britannique), en raison de la visite prochaine du criminel de guerre Moshe Dayan. Cette visite devait impliquer deux rencontres locales et toutes deux furent accueillies par de bruyantes protestations : La banderole réalisée pour ces événements montrait bien la clarté du mouvement de soutien à l’époque – « Soutenez la lutte du peuple palestinien contre l’agression impérialiste sioniste ».
L’internationalisme et la solidarité autochtone faisaient partie intégrante du travail de soutien à la Palestine dans les années 1970 et 1980. Certains des alliés autochtones qui avaient rallié les protestations contre Dayan furent même réprimandés par les sionistes et sermonnés à propos de leur ingratitude quant au soutien qu’ils avaient reçu des organisations pro-israéliennes.
Le rapport sur le discours de Dayan à l’UBC publié par le journal estudiantin Ubyssey était des plus instructifs pour ceux qui croient que les sionistes « libéraux » ou travaillistes sont en quelque sorte plus bienveillants à l’égard des Palestiniens. Dans une réponse à une question posée lors d’une des rencontres, Dayan aurait dit :
« L’OLP est tout simplement une organisation terroriste et nous ne traitons avec eux qu’en les tuant. »
Dans les années 1940, il y avait une opposition au projet sioniste et un soutien aux droits palestiniens parmi les Palestiniens et les Arabes au Canada. En 1947, Muhammad S. Massoud, président de la Canadian Arab Friendship League (Ligue de l’amitié canado-arabe), expliqua au Montreal Optimist Club que le monde arabe
« se ‘souviendrait’ de Lester B. Pearson et du juge Rand (…) qui (…) avaient tout mis en œuvre pour imposer aux Arabes l’infâme plan de partition ».
Lester B. Pearson, plus tard Premier ministre du Canada, joua un rôle d’une telle importance dans l’approbation de plan de partition de l’ONU que les sionistes le surnommèrent le « Balfour du Canada ».
Alors que nous sommes proches du 75e anniversaire de la Nakba, le projet sioniste est en plein confusion et la façade de son invincibilité s’est émiettée. C’est le sacrifice consenti par la résistance palestinienne ces dernières décennies et son intensification de nos jours qui ont amené ce projet et ses partisans internationaux à la crise qu’ils connaissent aujourd’hui.
Le travail de solidarité avec la Palestine au niveau mondial reconnaît ces faits et il est occupé à se concentrer autour de trois principes solides :
-Oslo et la solution à deux États sont morts et ceux qui s’y accrochent ne servent en aucun cas les intérêts du peuple palestinien.
-La clarté à propos de l’opposition au sionisme en tant qu’idéologie et mouvement coloniaux de peuplement est essentielle.
-Le soutien à la lutte palestinienne comprend le soutien à la résistance armée légitime qui est menée comme partie intégrante du combat contre l’occupation et le colonialisme de peuplement.
Comme l’a fait remarquer Charlotte Kates, de Samidoun :
« Il est très important pour nous tous de nous dresser ensemble (…) et de montrer clairement que la lutte du peuple palestinien – pour sa libération, du fleuve à la mer – et la résistance du peuple palestinien par tous les moyens afin de réaliser ce but, sont légitimes, justifiées et, en effet, héroïques. Nous ne nous tairons pas à propos des 5 000 Palestiniens enfermés derrière les barreaux de l’occupation en raison des exigences sionistes. En lieu et place, nous devons nous manifester plus bruyamment et avec plus de clarté encore. »
Le mouvement de la résistance palestinienne est entré dans une ère de force nouvelle et d’optimisme et notre travail en tant qu’activistes de la solidarité consiste à reconnaître et amplifier cette réalité.
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Marion Kawas est membre de l’Association Canada Palestine et elle est cofondatrice de Voice of Palestine (La voix de la Palestine).
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Publié le 5 mai 2023 sur Al-Mayadeen
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine