Quatre ados de plus tués lors des tueries israéliennes en Cisjordanie

Samedi soir, une opération de la résistance palestinienne à Jérusalem-Est occupée a tué une soldate israélienne et a blessé plusieurs autres militaires. La personne qui a ouvert le feu au check-point militaire près du camp de réfugiés de Shuafat s’est échappée sans que les forces de l’occupation aient eu la possibilité de la capturer. Cette action a eu lieu après d’intenses raids de l’armée en Cisjordanie, au cours desquels les forces israéliennes ont tué quatre ados palestiniens en 24 heures, dont trois enfants.

Des gens en deuil portent le corps d’Adel Ibrahim Adel Daoud, 14 ans, un des quatre ados tués, au cours de ses funérailles à Qalqiliya, en Cisjordanie, le 8 octobre. (Photo : Shadi Jarar’ah / APA images)

Des gens en deuil portent le corps d’Adel Ibrahim Adel Daoud, 14 ans, au cours de ses funérailles à Qalqiliya, en Cisjordanie, le 8 octobre. (Photo : Shadi Jarar’ah / APA images)

 

Tamara Nassar, 9 octobre 2022

Une vidéo partagée par les médias locaux montre une voiture blanche qui monte vers le check-point. Un homme descend calmement du siège du passage. Il se dirige vers un groupe de soldats et de gardes de la sécurité et leur tire dessus à bout portant.

Il s’en va ensuite en courant au moment où la voiture quitte les lieux. Une autre vidéo montre les instants qui suivent immédiatement les coups de feu :

Le conducteur de la voiture et deux autres passagers ont été appréhendés, selon les autorités israéliennes, qui prétendent connaître l’identité du tireur.

La soldate tuée a été identifiée comme étant Noa Lazar. Les médias israéliens ont dit qu’un garde sécuritaire « civil » qui travaillait au check-point était grièvement blessé et que deux agents de la police paramilitaire ses frontières avaient subi des blessures moins graves.

Après cette opération, l’armée israélienne a bloqué complètement le camp de réfugiés de Shuafat et y a effectué un raid.

Les militaires ont lancé des gaz lacrymogènes et ont envahi des maisons.

Cette vidéo montre des soldats qui pointent leurs armes au moment où ils envahissent une maison palestinienne du camp :

https://twitter.com/Alresalahpress/status/1579004337602572288?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1579004337602572288%7Ctwgr%5E70f1247cea02c313409ffa1b741d60c5d332a308%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fblogs%2Ftamara-nassar%2Fisrael-kills-4-teens-rampage-across-west-bank


L’attaque du camp de réfugiés

Israël s’avère incapable de comprendre que son incessante violence à l’encontre de la population civile palestinienne est précisément ce qui génère la résistance ; et l’intensification de ses attaques et punitions collectives n’a jamais apporté la « sécurité » », mais seulement plus de résistance encore.

L’attaque contre Shuafat suivait une série de raids sanglants d’Israël qui avaient laissé les Palestiniens passablement ébranlés, puisque de plus en plus de familles avaient enterré des enfants fauchés par les tirs israéliens.

Samedi matin, l’armée israélienne a envahi le camp de réfugiés de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie, afin d’y arrêter des Palestiniens. Cette vidéo montre un important convoi militaire israélien entrant à Jénine samedi matin :

Selon le Centre palestinien pour les droits humains (CPDH), les forces israéliennes ont « assiégé » la maison de Samir Saleh Abu Zeina et se sont mises à ouvrir le feu dessus – un signe de ce qu’elles appliquaient la fameuse procédure de la cocotte-minute, une forme d’exécution extrajudiciaire au cours de laquelle une personne doit soit se rendre soit subir la destruction de sa maison en étant ensevelie sous ses décombres.

Les forces israéliennes, appuyées par des hélicoptères de combat Apache et des drones armés de missiles, sont parvenues à arrêter le fils du propriétaire de la maison, Saleh, qu’Israël accuse d’activités « terroristes ».

Pendant le siège, des Palestiniens se sont rassemblés pour résister à l’invasion au moyen de pierres, rapporte le CPDH. Israël prétend que ses forces ont également été confrontées à des cocktails Molotov et à des tirs à balles réelles.

Les tirs israéliens ont tué deux personnes et en ont blessé onze autres, dont trois grièvement, fait savoir le ministère de la Santé de l’Autorité palestinienne.

Les tués étaient Ahmad Muhammad Hussein Daraghmah, 19 ans, et Mahmoud Moayad Mahmoud Sous, 17 ans.

Mahmoud Sous, un résident du camp,

« a prétendument lancé un engin explosif artisanal en direction d’un véhicule militaire israélien à 20 mètres (65 pieds) de là environ, lors des confrontations avec les forces israéliennes, et a ensuite reçu deux blessures par balles dans le cou et dans la cuisse droite »,

fait savoir Defense for Children International – Palestine (DCI-P).

Les deux balles l’ont frappé par derrière, selon un rapport médical cité par DCI-P.

Daraghmah, originaire de Tubas, une ville toute proche, a été touché à la tête.

Les soldats tirent sur un groupe d’enfants

Vendredi, les forces d’occupation israéliennes ont ouvert le feu sur un groupe d’enfants et de jeunes à proximité du mur de séparation israélien, tout près de la ville de Qalqilya, dans le nord de la Cisjordanie.

Les jeunes Palestiniens étaient « dans l’un des bosquets, où ils se rendent de temps en temps, à une centaine de mètres » d’une position de l’armée israélienne, explique le CPDH.

Une balle israélienne a touché mortellement à la tête Adel Ibrahim Adel Daoud, 14 ans.

Des photos partagées par des agences d’information locales ont montré les jeunes amis de l’adolescent présents à ses funérailles.

Dans une autre vidéo, la mère de Daoud rappelle avec émotion la dernière journée de son fils et parle de la détresse qui l’a submergée quand elle a appris qu’il avait été abattu.

« Je prie pour que Dieu l’accepte parmi les martyrs, les prophètes et ceux qui sont purs », a-t-elle dit aux personnes qui tentaient de la réconforter.

De même, vendredi, des colons israéliens escortés par l’armée ont envahi le village d’al-Mazra al-Gharbiyeh, au nord de Ramallah, en Cisjordanie occupée, et ils ont agressé des Palestiniens à plusieurs reprises, selon une enquête de terrain de DCI-P.

Des jeunes Palestiniens se sont rassemblés pour résister aux soldats et aux colons en leur jetant des pierres, des bouteilles vides et des cocktails Molotov, rapporte le CPDH.

Les forces israéliennes ont tiré à balles réelles et à balles enrobées de caoutchouc ; elles se sont également servies de grenades incapacitantes et de gaz lacrymogène contre les Palestiniens.

Mahdi Muhammad Ladadwa, 17 ans, a été touché au pelvis, rapporte DCI-P.

Adel Ibrahim Adel Daoud, 14 ans, et Mahdi Muhammad Abdulmuti Ladadwa, 17 ans. (Photo : DCI-P)

Adel Ibrahim Adel Daoud, 14 ans, et Mahdi Muhammad Abdulmuti Ladadwa, 17 ans. (Photo : DCI-P)

« Un soldat israélien a ouvert le feu à une distance de moins de 20 mètres sur Ladadwa, qui ne posait pourtant aucune menace ou danger pour la vie des soldats »,

a rapporté le CPDH, citant un témoin oculaire.

Ladadwa, qui a été touché « au côté gauche de la poitrine », explique le CPDH, a été emmené à l’hôpital dans un état critique, mais est décédé un peu plus tard dans la soirée.

Des vidéos et des photos diffusées par les médias locaux ont montré qu’une foule importante avait participé à son cortège funèbre.

« Non seulement les autorités israéliennes ont chaque fois été incapables d’enquêter sur la violence des colons envers les Palestiniens, y compris les enfants, mais elles soutiennent activement leurs attaques »,

a déclaré Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation de DCI-P.

« Une impunité systémique combinée à une protection militaire de la part de l’État a sans nul doute permis aux colons israéliens de devenir plus audacieux dans leurs agressions. »

Dans une vidéo largement partagée, on voit les soldats israéliens qui attaquent, poussent en tous sens et pointent leurs armes sur les gens, dont des paramédicaux, qui tentaient d’aider un jeune homme gisant sur une civière et saignant dans la région de l’aine.

On peut entendre au moins un coup de feu, dans cette brève vidéo.

Certains médias locaux ont identifié le jeune sur la civière comme étant Ladadwa, bien que son visage ne soit pas clairement visible.

Toutefois, un autre enfant, Nour Ali Shreiteh, 16 ans, a lui aussi été abattu d’une balle réelle dans le pelvis lors du même incident, a fait remarquer le CPDH.

Les forces d’occupation israéliennes « ont tenté de l’arrêter après l’avoir blessé, mais des gens sont parvenus à l’emmener à l’hôpital », a rapporté le CPD. Les forces israéliennes ont alors « arrêté l’une des personnes qui avaient empêché la tentative d’arrestation ».


Silence et complicité au niveau international

Durant toute la journée de vendredi et une bonne partie de celle de samedi, les représentants de la prétendue communauté internationale sont restés silencieux à propos de l’intensification du bain de sang, du moins tant qu’il ne s’est agi que de morts et de blessés palestiniens.

Mais, après que les forces d’occupation israéliennes ont été attaquées à leur tour au check-point de Shuafat samedi soir, Tor Wennesland, l’envoyé des Nations unies pour le « processus de paix » au Moyen-Orient, a sorti une déclaration disant qu’il était « très alarmé à propos de la détérioration de la situation de sécurité » et a lancé un appel au « calme ».

Dans un langage choisi pour éviter de blâmer directement la puissance occupante, Wennesland a fait remarquer que,

« depuis le début de l’année, au moins 100 Palestiniens ont été tués, dont des enfants, lors d’une multiplication significative des opérations militaires israéliennes en Cisjordanie occupée ».

Wennesland a ajouté que,

« durant la même période, 16 Israéliens avaient été tués à l’intérieur d’Israël par une vague d’attentats terroristes menés par des Palestiniens et d’autres Arabes ».

Il convient de remarquer que Wennesland caractérise l’action de tuer systématiquement des Palestiniens en Cisjordanie comme se produisant « au cours » de ce qu’il décrit comme des « opérations militaires »masquant ainsi comment Israël attaque, châtie collectivement et terrorise régulièrement les civils dans le contexte de l’occupation, du colonialisme de peuplement et de la mise en place d’un système d’apartheid.

Pendant ce temps, il décrit des tueries d’Israéliens, dont des membres des forces paramilitaires, par les Palestiniens, comme des « attaques terroristes ».

Cette réticence à tenir Israël pour responsable s’est également étendue à l’UNICEF. L’agence des Nations unies pour les enfants a fait remarquer dans un tweet que « deux enfants palestiniens, de 14 et 17 ans, ont été tués en Cisjordanie » vendredi, mais elle a omis de mentionner que c’étaient les forces israéliennes qui les avaient tués.

Jusqu’à ce jour, cette année, au moins 26 enfants palestiniens ont été tués par les forces d’occupation ou les colons israéliens en Cisjordanie.

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Ali Abunimah a contribué à cet article. °°°°°

Publié le 9 octobre 2022 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

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